Humanite - 2019-08-06

(singke) #1
Mardi 6 août 2019 l’Humanité 5

L’événement

t des Etats-Unis et de la Russie du traité sur les forces nucléaires intermédiaires. P. Zinken/DPA/AFP


Washington

cherche une

renégociation

du traité

qui impliquerait

la Chine.

L

e 6 août 1945, la ville japonaise
d’Hiroshima, 350 000 habitants,

est anéantie par la première bombe

atomique larguée par les États-Unis. Le

9 du même mois, Nagasaki est également

en grande partie rayée de la carte.
Soixante-quatorze ans plus tard, les
plaies ne sont toujours pas refermées.
Les survivants – les hibakushas – et
leurs familles souffrent encore. Triste

anniversaire d’un drame qui a marqué

l’ouverture de l’ère atomique. Une ère

qui non seulement ne s’est pas achevée

mais, au contraire, est en pleine expan-

sion. Pis, le traité sur les forces nu-

cléaires intermédiaires (FNI), signé en

1987 entre l’URSS et les États-Unis,

n’existe plus depuis le 2 août. Ce traité,

en abolissant l’usage de toute une série

de missiles à capacité nucléaire de portée

intermédiaire (de 500 à

5 500 km), avait permis

l’élimination des SS

russes et Pershing amé-

ricains déployés en
Europe.

Washington avait sus-

pendu, début février,

sa participation au FNI

en accusant Moscou de

fabriquer des missiles

non conformes au traité.

Cette suspension avait ouvert une
période de transition de six mois qui
se terminait le 2 août. En cause, les

missiles russes 9M729. Pour le secré-

taire d’État américain, Mike Pompeo
(qui se targue par ailleurs du « plein

soutien » des pays membres de l’Otan),

ceux-ci représenteraient une « menace

directe » pour les États-Unis et leurs

alliés, bien que la Russie assure qu’ils

ont une portée maximale de 480 km.
Il est vrai que, depuis 1987, bien des
choses ont changé.
La surenchère a repris depuis des

années. Vladimir Poutine a effective-

ment promis de développer de nou-

veaux missiles balistiques de portée
intermédiaire en cas de retrait amé-

ricain. Mais les Russes font également

remarquer que les drones armés déve-

loppés par les États-Unis sont simi-

laires à des missiles de moyenne portée

sans violer le traité, puisqu’ils n’exis-

taient pas au moment de la signature!

Depuis six mois, c’est un dialogue de
sourds et d’accusations réciproques

de violation. Les deux puissances ont

laissé expirer l’ultimatum lancé par

l’administration de Donald Trump en

février, sans bouger de leurs
positions.

La France « colle » à la
politique guerrière américaine

La Maison-Blanche cherche en réalité

une renégociation du traité qui, cette

fois, impliquerait la Chine (en 1987,
celle-ci ne pesait pas le même poids

militaire) afin de déployer de nouvelles

armes et empêcher Pékin de renforcer

sa position déjà dominante dans le

Pacifique Ouest. Washington veut, in

fine, endiguer les prétentions chinoises.

Il ne reste désormais en

vigueur qu’un seul ac-
cord nucléaire bilatéral
entre Moscou et Wash-
ington (dont l’arsenal

représente 92 % du stock

mondial) : le traité Start,

qui maintient les arse-

naux nucléaires des deux

pays bien en deçà du

niveau de la guerre froide

et dont le dernier volet
arrive à échéance en 2021. Mais les

chances qu’il soit prolongé sont faibles,

relançant ainsi une course illimitée à

tous les types d’armements, y compris

nucléaires, partout et jusque dans l’es-

pace, avec une force armée désirée par

Donald Trump et un commandement
militaire rêvé par Emmanuel Macron.

Face à ce danger, il conviendrait que la

France, au lieu de « coller » à la politique

guerrière américaine, signe enfin le traité

d’interdiction des armes nucléaires (Tian)

adopté à l’ONU le 7 juillet 2017, seul
véritable garant contre les risques de

guerre nucléaire, comme l’ont déjà fait

71 États de par le monde. P. B.

Il y a soixante-quatorze ans, la pre-
mière bombe A était lâchée sur le
Japon. En dépit de ce drame, les
États-Unis et la Russie viennent de
déchirer le traité sur les forces nu-
cléaires intermédiaires.

Malgré Hiroshima,

le monde à l’heure atomique

9
C’est le nombre de pays détenteurs de
la bombe atomique : États-Unis, Russie,
France, Royaume-Uni, Chine, Corée
du Nord, Pakistan, Inde et Israël.

Pour le PCF, la décision américaine et russe rouvre « une ère de menace
nucléaire pour le monde, à commencer par l’Europe ». Il appelle à « stopper
cette dérive » en marchant le 21 septembre, Journée internationale de la
paix, « contre la mort du traité FNI et pour l’adoption et la mise en œuvre du
traité sur l’interdiction des armes nucléaires (Tian) ».

LE PCF APPELLE À « STOPPER CETTE DÉRIVE »

Pour le Mouvement de la paix, « la solution pour arrêter la reprise de la course
aux armements nucléaires, c’est bien de gagner l’élimination totale des armes
nucléaires à travers la ratification du traité d’interdiction des armes nucléaires
(Tian) », adopté par l’ONU en 2017. L’organisation souligne qu’ « un vaste front
mondial s’est constitué pour l’élimination des armes nucléaires ». Au 2 août 2019,
71 États ont signé le Tian, 25 l’ont déjà ratifié. Il entrera en vigueur lorsque
50 États l’auront signé et ratifié. « Nous sommes en mesure de gagner cet
objectif » , affirme le Mouvement de la paix.

UN FRONT MONDIAL POUR L’ÉLIMINATION DES ARMES NUCLÉAIRES
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