SUD OUESTVendredi 2 août 2019 Gironde
10 heures. La plage de la Jenny est
quasiment déserte. Les surfeurs
lève-tôt remballent et les plagistes
peu friands ici des textiles ne sont
encore que quelques-uns. Bien
trop habillé, on remonte vers le
nord à la rencontre d’Alexandra
Teege partie du Porge quelques mi-
nutes plus tôt. Elle effectue là sa
huitième étape d’une randonnée
particulière : partie du Verdon le
23 juillet, elle va rallier Biarritz le
20 août prochain pour le G7, avec
conférence le lendemain. Objec-
tif : sensibiliser les grands diri-
geants de la planète à la cause
océane, au cœur du projet de l’as-
sociation Surfrider.
Sa compagne de route n’est pas
là aujourd’hui : Vanessa Balci est
occupée à faire réparer l’attelage
voiture-caravane. Véronique Res-
souches a pris le relais : cette retrai-
tée passionnée des fonds du Bas-
sin et de photos (1) est venue faire
l’étape Le Porge-Grand Crohot et
hébergera le duo Surfrider à An-
dernos ce soir. « Je suis depuis long-
temps très proche de l’association
et de ses valeurs, je voulais partici-
per, explique-t-elle. Et la balade est
plutôt sympathique, non? » Le
long de l’estran, entre mer et du-
nes à perte de vue, elles chemi-
nent, discutent, ramassent les
quelques déchets parsemant la
plage. « La plupart des touristes qui
arrivent sur ces plages nettoyées
pour la saison ne réalisent pas les
tonnes de déchets que l’océan
charrie », souligne Alexandra Tee-
ge, professeur d’allemand à Blaye et
Bourg-sur-Gironde, aux vacances
actives. « Nous leur montrons des
photos édifiantes. »
Caravane-médiathèque
S’ils échangent avec les plagistes
au fil de leurs 10 kilomètres quoti-
diens environ, les discussions se
densifient l’après-midi où, près de
leur caravane-médiathèque, tente
et animations interpellent le va-
cancier. Des livres à consulter, des
ateliers cosmétiques maison, des
lectures de contes et des débats :
les deux jeunes femmes croisent
les supports et leurs compétences
(Vanessa, plasticienne, crée des
œuvres à partir des déchets ramas-
sés sur les plages) pour un même
discours : « Exposer la situation dif-
ficile de nos ressources naturelles
et de l’océan en particulier, mais
aussi donner de l’espoir et l’envie
de changer nos comportements,
explique Alexandra. On évoque
évidemment la gestion des dé-
chets et leur production. »
Pas de caravane au Truc Vert au-
jourd’hui ni au Cap-Ferret de-
main : « Nous n’avons pas eu de ré-
ponse de la mairie à notre de-
mande d’autorisation », regrette
Alexandra. Rendez-vous sur la je-
tée d’Arcachon samedi. Ou sur la
plage.
Y. D.
(1) « Ar(t)cachon, le joyau du bassin »
(2016), toujours disponible.
ENVIRONNEMENT Alexandra Teege et Vanessa Balci, bénévoles girondines, rallient Biarritz le long de l’océan et sensibilisent le public
Surfrider foundation : la longue marche vers le G
Alexandra Teege (chapeau) sillonne les plages en duo. PHOTO Y. D.
sud ouest.fr
Sur notre site, l’interview
d’Alexandra Teege.
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Élisa Artigue-Cazcarra
[email protected]
A
la suite de la mort d’une tou-
riste de 65 ans, mercredi soir, à
Grayan-et-l’Hôpital, décédée
après avoir été piquée par un ou des
frelons asiatiques, la question revient :
cet insecte apparu en France en 2004
qui a, en quinze ans, colonisé tous les
départements de l’Hexagone et ga-
gné la plupart des pays voisins, est-il
plus dangereux et agressif pour
l’homme que les espèces autochto-
nes? À ces interrogations, des cher-
cheurs de l’Institut de Systématique,
Évolution, Biodiversité (1) répondent
clairement par la négative, dans un
article publié fin juin intitulé « Dépas-
ser sa peur des espèces invasives grâce
à la science citoyenne ».
« Comme tous les frelons et autres
guêpes sociales, il inquiète aussi le
grand public, à cause de ses piqûres
qui ne sont pourtant pas plus veni-
meuses que celle de l’abeille domes-
tique », soulignent-ils. « Toutes ces es-
pèces sociales, qui attaquent lors-
qu’on s’approche à moins de
5 mètres de leur nid, ne sont vérita-
blement dangereuses qu’en cas de
piqûres multiples (plusieurs centai-
nes) ou chez les personnes allergi-
ques, pour qui une seule piqûre peut
être fatale en l’absence d’un rapide
traitement », insistent les chercheurs
qui rappellent que « l’abeille domesti-
que et les guêpes communes sont
bien plus souvent en cause dans ce
genre d’accidents ».
En France, on dénombrerait une
quinzaine de morts chaque année
liées à des piqûres d’hyménoptères
(qui regroupent les abeilles, guêpes
et frelons). Combien en Gironde et en
Nouvelle-Aquitaine? Sollicitée,
l’Agence régionale de santé n’a pas été
en mesure de répondre, hier. « Con-
trairement au moustique-tigre, le fre-
lon asiatique n’est pas vecteur de ma-
ladies. Il ne fait
donc pas l’objet
d’un dispositif
de surveillance
sanitaire particu-
lier », précise-t-on.
Il faut dire que
cela fait plu-
sieurs années et
plusieurs études,
y compris médi-
cales, qu’il est éta-
bli que Vespa ve-
lutina nigritho-
rax, son petit nom scientifique, n’est
pas plus dangereux pour l’homme
que ses cousins locaux. Très vite après
son installation sous nos cieux, le Co-
mité de coordination de toxicovigi-
lance s’était penché sur le sujet et avait
publié un rapport, en 2009, réalisé sur
plusieurs années d’observations :
« Conséquences sanitaires de l’instal-
lation du frelon asiatique Vespa velu-
tina en France : expérience des Cen-
tres antipoison français ». Le centre
antipoison de Bordeaux, un service
du CHU de Pellegrin, y avait bien sûr
participé. Il s’est retrouvé en première
ligne avec le frelon asiatique, celui-ci
ayant déployé ses ailes pour la pre-
mière fois en France dans notre ré-
gion : il aurait été introduit acciden-
tellement dans un conteneur de po-
teries importées de Chine par un
horticulteur du Lot-et-Garonne.
« Vespa velutina est très probable-
ment dangereuse pour l’homme
dans trois circonstances particulières
qui sont les mêmes qu’avec nos espè-
ces autochtones : piqûres multiples
ou piqûre unique avec une localisa-
tion muqueuse ou encore patient al-
lergique au venin d’hyménoptère »,
concluait le rapport du Comité de
toxicovigilance qui, au vu de ces résul-
tats, jugeait qu’il « n’était pas néces-
saire de poursuivre la surveillance des
centres antipoison sur ce thème ».
Stylo d’adrénaline
D’après les secours qui sont interve-
nus à Grayan-et-l’Hôpital, la sexagé-
naire qui a succombé mercredi au-
rait été victime d’une réaction allergi-
que majeure après avoir été piquée,
dont la forme la plus grave est le choc
anaphylactique, une chute brutale de
la tension artérielle qui peut engager
le pronostic vital. En cas d’allergie aux
hyménoptères, il est indispensable
d’avoir toujours sur soi une trousse
d’urgence prescrite par un médecin et
qui contient un stylo d’adrénaline au-
to-injectable.
(1) Il s’agit d’un laboratoire commun du
CNRS, du Muséum national d’histoire
naturelle, de Sorbonne Université, de
l’École pratique des hautes études et de
l’Université des Antilles.
SANTÉ Alors qu’une femme est
décédée mercredi à Grayan-et-l’Hôpital,
les études montrent que cet insecte
n’est pas plus dangereux pour l’être
humain que les espèces autochtones
Frelon asiatique : pas plus
dangereux pour l’homme
« Les piqûres du frelon asiatique ne sont pas plus venimeuses
que celles de l’abeille », écrivent des chercheurs. ARCHIVES « SO »
En France, on
dénombrerait
une quinzaine
de morts
chaque année
liées à des
piqûres
d’hyménoptères
Pas plus dangereux pour
l’homme mais redoutable pour
l’abeille. Depuis 2012, le frelon
asiatique est classé comme
danger sanitaire de deuxième
catégorie pour l’abeille domes-
tique. Sa surveillance et la lutte
incombent à la filière apicole.
Dans le département, plusieurs
associations d’apiculteurs tra-
vaillent sur le sujet, comme le
Groupement de défense sani-
taire des abeilles de Gironde qui
réunit 800 membres, tous bé-
névoles. Le GDSA est l’une des
structures que les particuliers et
collectivités peuvent contacter
pour détruire des nids. « Cha-
que année, on en détruit plus
de 2 000 », indique son prési-
dent pour qui « la population
de frelons asiatiques en Gi-
ronde ne fléchit pas mais
n’augmente pas ». Une « stabi-
lisation » qu’il explique par le
déploiement de pièges. Cette
stratégie n’est désormais plus
recommandée par les autorités.
Un ennemi
de l’abeille
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