LeSoir - 2019-08-02

(Michael S) #1
économie 13

MON ARGENT

Un déménagement,

combien ça coûte?

NOEL GALLAGHER

« Je me fiche

des fans

d’Oasis »

LÉNA

Le « slow travel »,

la tendance

qui réconcilie voyage

et planète

CE WEEK-END


DANS LE SOIR


Autriche (groupe)
3,23 %

Pays-Bas/ Belgique
(groupe) 5,43 %

France 4,03 % Italie (groupe) 4,13 %

Espagne/Mexique (groupe)
5,31 %

Royaume-Uni
4,03 %

Suède (groupe) 3,29 %

Arabie saoudite
2,02 %

Russie
2,68 %

Allemagne 5,32 %

Droits de vote des administrateurs du FMI

Le conseil d'administration du Fonds monétaire international (FMI) est composé
de 24 administrateurs, élus par les pays membres ou par des groupes de pays,
et du directeur général, qui en assure la présidence. La Belgique et les Pays-Bas se partagent
la présidence d’un groupe qui réunit le Luxembourg, l’Arménie, la Bosnie-Herzégovine,
la Bulgarie, la Croatie, Chypre, la Géorgie, Israël, la Macédoine, la Moldavie, le Monténégro,
la Roumanie et l’Ukraine.

Etats-Unis 16,52 %

Japon 6,15 %

Chine 6,09 %

Reste
du Monde
31,77 %

DOMINIQUE BERNS
ELODIE LAMER

S

i la crise n’est plus qu’un mauvais
souvenir, les divergences nord-
sud en Europe sur les politiques
économiques restent aussi vivaces que
jamais. Difficile, en effet, pour les Euro-
péens de se rassembler derrière un seul
nom à proposer pour la direction géné-
rale du Fonds monétaire international
(FMI).
Ils sont pourtant à l’origine de la déci-
sion de rappeler à Francfort l’actuelle
patronne de l’institution de Washing-
ton, Christine Lagarde, qui deviendra à
l’automne la nouvelle présidente de la
Banque centrale européenne. Ils consi-
dèrent, du reste, que la direction du
FMI leur revient en vertu d’un accord
tacite avec les Américains, ces derniers
ayant la mainmise sur la Banque mon-
diale – d’ailleurs, Donald Trump, en jan-

vier, s’est empressé d’envoyer à la
Banque mondiale son favori, David
Malpass, après la démission surprise de
Jim Yong Kim, d’origine coréenne mais
citoyen américain.
Les Européens n’imaginent pas qu’on
puisse déroger à cette règle, même si le
poids économique et géopolitique du
Vieux Continent n’est plus ce qu’il était.
L’arrangement est, par ailleurs, d’autant
plus favorable aux Etats-Unis qu’ils ont
les moyens de défendre leurs intérêts au
FMI, disposant du poste de premier di-
recteur général adjoint (occupé actuel-
lement par Daviod Lipton) et, avec
16,52 % des droits de vote, d’une mino-
rité de blocage – les décisions les plus
importantes requérant une majorité
qualifiée de 85 %. Autrement dit : la
succession de Christine Lagarde est une
affaire intra-européenne. Mais le Brésil
et l’Inde pourraient voir les choses au-
trement, et profiter du moment de flot-
tement pour placer un des leurs. D’où
l’urgence pour les Européens de se déci-
der.

Cinq noms, zéro consensus
Dès la désignation de Lagarde, début
juillet, à la BCE, les ministres de l’UE
ont rapidement fait savoir qu’ils dési-
raient présenter un unique candidat
commun pour la remplacer au FMI. As-
sez rapidement, le profil qui avait la cote
en juillet, le gouverneur de la Banque
d’Angleterre, Mark Carney, a disparu
des radars. Pour les officiels de l’UE, il
n’était pas assez européen, car canadien
de naissance, malgré son passeport bri-

tannique et irlandais.
Fin de la semaine dernière, les Fran-
çais annonçaient avoir été choisis pour
mener les consultations et que la liste
des prétendants avait été réduite à cinq
noms : l’actuelle ministre des Finances
espagnole, Nadia Calvino, le ministre
des Finances portugais et président de
l’Eurogroupe (le cénacle des ministres
de la zone euro), Mario Centeno, son
prédécesseur et l’ancien ministre néer-
landais des Finances, Jeroen Dijssel-
bloem, l’ancien commissaire européen
aux Affaires économiques, Olli Rehn,
l’ancienne vice-présidente de la Com-
mission et actuelle numéro 2 de la
Banque mondiale, Kristalina Georgieva.
La rumeur disait que les deux pre-
miers avaient été écartés en début de se-
maine, mais il est ressorti d’une confé-
rence téléphonique entre grands argen-
tiers européens, jeudi midi, qu’aucun
des cinq n’a retiré sa candidature. Les
pays du sud ne veulent pas de Dijssel-
bloem ou d’Olli Rehn, qui ont chacun
incarné la rigueur excessive qui leur a
été imposée pendant la crise. Mais ces
deux-là étaient aussi les favoris de Ber-
lin, pour les mêmes raisons d’ailleurs.
La France aurait alors braqué quelques
délégations en poussant Georgieva.
Mais celle-ci a une faiblesse : elle a dé-
passé de quelques mois l’âge maximum
pour pouvoir arriver au poste. Inca-
pables de se mettre d’accord par consen-
sus, les ministres européens tiendront
un vote ce vendredi matin. En espérant
limiter les dégâts après une semaine de
tensions nord-sud.

Succession de Lagarde au FMI :

les Européens divisés

INSTITUTIONNEL

Les Européens peinent

à se ranger derrière un

candidat unique pour

remplacer Christine

Lagarde au FMI. Ils

craignent que les pays

émergents aient des

vues sur le poste.

Nadia Calvino, ministre
espagnole des Finances.
© PHOTO NEWS.

Mario Centeno, pré-
sident de l’Eurogroupe.
© PHOTO NEWS.

Jeroen Dijsselbloem,
ministre néerlandais
des Finances. © PHOTO NEWS.

Olli Rehn, ancien com-
missaire européen aux
Affaires économiques.
© PHOTO NEWS.

Kristalina Georgieva,
numéro 2 de la Banque
mondiale. © PHOTO NEWS.

Les Européens aiment se
présenter comme les
grands défenseurs du
multilatéralisme, en
particulier face au pré-
sident Trump. Pour au-
tant, ils jugent absolu-
ment légitime la « tradi-
tion » qui leur accorde la
direction générale du
FMI, sans y voir la
moindre contradiction.
Il faut dire que les règles
de fonctionnement de
l’institution leur
confèrent un poids im-
portant dans le proces-
sus de prise de décision.
Ensemble, les 28 dé-
tiennent directement
29 % des droits de vote.
Mais l’influence euro-
péenne est plus élevée.
L’Allemagne, la France et
le Royaume-Uni ont le
privilège de nommer leur
propre administrateur
(tout comme les Etats-
Unis, le Japon, la Chine,
la Russie et l’Arabie saou-
dite). Et cinq autres Etats
membres président des
groupes de pays dont la
composition déborde les
frontières de l’UE. De
sorte qu’au total, les
Européens contrôlent
plus du tiers des droits
de vote, un niveau bien

supérieur à leur poids
économique ou géopoli-
tique. Qu’en outre, la
présidence du FMI appa-
raisse comme une mon-
naie d’échange dans une
négociation de mar-
chands de tapis visant à
pourvoir les « top jobs »
européens contribue à
miner la légitimité du
FMI. D’autant que le
reste du monde ne peut
s’empêcher de penser
qu’Américains et Euro-
péens instrumentalisent
l’institution à leur profit.
Le FMI n’est-il pas inter-
venu en Grèce en violant
ses propres règles, qui lui
interdisent de prêter à un
pays insolvable? Sauf à
imposer préalablement
un allégement de dette
dont Français et Alle-
mands, soucieux de
protéger leurs banques,
ne voulaient pas. Avec
l’aval du président Oba-
ma, le Fonds, dirigé par
Dominique Strauss-Kahn,
est passé outre l’avertis-
sement de ses écono-
mistes et l’opposition,
notamment, des adminis-
trateurs brésilien et
indien. Nous l’avons
peut-être oublié. Pas les
pays émergents. D.B.

Un «fief» européen
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