MondeLe - 2019-07-30

(Sean Pound) #1

MARDI 30 JUILLET 2019 france| 7


Emmanuel
Macron, après
une rencontre
avec le maire
de Bormes-les-
Mimosas (Var),
le 27 juillet.
GÉRARD JULIEN/AFP

attendu fin août au sein d’une commission
spéciale, puis le 24 septembre dans l’Hémicycle,
le projet de révision des lois de bioéthique pro-
met de donner du fil à retordre à la majorité. Pre-
mier chantier sociétal du quinquennat, ouvert
autant par nécessité (les lois de bioéthique sont
révisées tous les cinq ans) que par volonté politi-
que, le texte aborde une multitude de sujets, de
la congélation des gamètes à la médecine géno-
mique en passant par la recherche sur les tissus
embryonnaires et l’anonymat des donneurs.
Mais il concentre les oppositions sur son pre-
mier article, qui étend la procréation médicale-
ment assistée (PMA) aux femmes seules et aux
couples de femmes.
Une vingtaine d’associations dont La Manif
pour tous ont d’ores et déjà annoncé une mani-
festation le 6 octobre. L’Eglise catholique, par la
voix du président de la Conférence des évêques
de France, Mgr Eric de Moulins-Beaufort, se dit

« inquiète » et « triste » de ce projet de loi. A l’As-
semblée, la droite promet pour l’heure qu’elle ne
veut pas « refaire le match » du mariage pour
tous et que chaque député sera libre de voter en
conscience.
Mais les débats apaisés souhaités par le pre-
mier ministre pourraient rapidement tourner
au vinaigre, tant le sujet interroge l’identité poli-
tique du parti Les Républicains, en majorité con-
tre la PMA en dépit de l’émergence d’une ving-
taine de députés pour. La République en marche
promet également une liberté de vote, après
avoir cependant exclu Agnès Thill, anti-PMA ac-
cusée de propos homophobes, ce qu’elle con-
teste. La gauche, majoritairement pour, promet
d’être vigilante sur les questions d’égalité entre
couples hétérosexuels et couples de femmes,
notamment quant à la filiation. Les séances pro-
mettent d’être agitées.p
julie carriat

PMA Un débat agité attendu au Parlement


Les locataires de HLM peuvent


désormais s’échanger leurs logements


Le dispositif a permis de réaliser 76 tractations depuis octobre 2018


J’


ai saisi cette opportunité
d’échanger mon logement
social! Si je l’avais laissée
passer, j’aurais probable-
ment dû attendre des années pour
disposer d’un appartement plus
grand », se réjouit Julia.
Cette mère de deux jeunes gar-
çons, assistante de direction de
profession, s’est installée, le
19 juillet, dans 68 mètres carrés,
au quatrième étage sans ascen-
seur d’un immeuble des années
1960 avec une belle vue et, sur-
tout, une chambre pour chaque
enfant, dans le quartier de son
choix du 13e arrondissement de
Paris. Bonus : le loyer de
660 euros charges comprises est
un peu moins élevé.
Son nouveau domicile, Julia l’a
obtenu par échange avec celui de
Manuella, 58 ans, qui, elle, a été
séduite par le deux-pièces de Ju-
lia, 48 mètres carrés bien suffi-
sants pour une personne désor-
mais seule, et plus moderne, avec
terrasse et ascenseur : « Julia et
moi, on s’est tout de suite bien en-
tendues! On était impatientes
d’avoir des nouvelles de notre de-
mande. » L’affaire s’est conclue en
un peu moins de six mois, après
étude du dossier par leurs
bailleurs respectifs, la Régie im-
mobilière de la Ville de Paris
(RIVP) pour Julia et Paris Habitat
pour Manuella.
Car en pareil cas, on vérifie
d’abord que les ressources des
deux candidats sont compatibles

avec les barèmes réglementaires.
Puis il faut le feu vert des deux
commissions d’attribution avant
de procéder aux états des lieux de
sortie et d’entrée de chaque loca-
taire et d’organiser un double dé-
ménagement, le même jour.
Environ 150 ménages ont pro-
fité de ce nouveau dispositif,
lancé en octobre 2018. La bourse
d’échanges de logements (sur le
site Echangerhabiter. fr) a d’abord
réuni les douze bailleurs sociaux
parisiens, dont la RIVP, Paris Ha-
bitat, Immobilière 3F, Elogie-
Siemp, France Habitation ou CDC
Habitat, et, depuis le
1 er juillet 2019, vingt-quatre
bailleurs d’Ile-de-France totali-
sant 750 000 logements. Au
1 er juillet, 7 819 demandes avaient
été déposées sur la plate-forme,
générant 5 912 contacts entre lo-
cataires et 2 187 visites qui ont
abouti à l’étude de 240 dossiers
pour 76 échanges réalisés.

Vaste brassage
« Sur les 700 000 candidats franci-
liens à l’attribution d’un logement
social, 210 000 y habitent déjà et
demandent seulement à en chan-
ger, explique Claude Knapik, di-
recteur du GIE Echanger Habiter
qui gère la plate-forme. Répondre
à leur attente permettrait de fluidi-
fier la gestion très tendue de nos
parcs et de gagner du temps, car
les temps d’attente sont très longs,
soit deux ou trois ans en première
couronne et dix ans à Paris. »

Un vaste brassage devient possi-
ble, à condition de parvenir à cons-
tituer un binôme dont les apparte-
ments respectifs correspondent
aux besoins de l’autre. Selon Paris
Habitat, une majorité des deman-
deurs (65 %) visent à s’agrandir.
Cette démarche responsabilise
les locataires : à eux de s’inscrire,
de rechercher les annonces, de
prendre contact avec l’autre, d’or-
ganiser les visites réciproques
puis de soumettre le dossier aux
bailleurs. « Les locataires sont
amenés à dire du bien de leur loge-
ment ce qui leur fait porter sur lui
un autre regard », se félicite Sté-
phane Bettiol, directeur général
adjoint de Paris Habitat. « Lors-
qu’on choisit ainsi son logement,
on est moins dans la plainte envers
le bailleur. On positive », observe
Catherine Sallaz, responsable de
la gestion locative de l’Office dé-
partemental Haute-Savoie Habi-
tat qui fut précurseur, ouvrant,
dès octobre 2012, son site
Echangeonsnoslogements74.fr.
L’échange de logement social à
l’initiative des locataires bouscule
les habitudes des bailleurs des di-
vers organismes – préfectures,
communes, Action Logement –
ayant un droit de réservation. Il
préfigure la réforme à venir qui
envisage que ces réservataires
abandonnent à la collectivité leur
pouvoir d’attribuer des loge-
ments précis et l’exercent sur le
flux des appartements libres.p
isabelle rey-lefebvre

Procès Pastor : le condamné


attaque son avocat


Le gendre de la milliardaire monégasque assassinée


s’en prend à son défenseur, M
e
Eric Dupond-Moretti

D

ans une lettre adres-
sée au bâtonnier de
l’ordre des avocats de
Paris, dont dépend
Me Eric Dupond-Moretti, Woj-
ciech Janowski conteste avoir
donné mandat à son avocat pour
plaider coupable au procès de l’af-
faire Pastor, en octobre 2018. Le
gendre de la milliardaire moné-
gasque demande également la ré-
trocession partielle des honorai-
res versés à Me Dupond-Moretti


  • il évoque un virement bancaire
    de 215 000 euros – au motif que
    son avocat ne lui aurait rendu vi-
    site que deux fois pendant les
    cinq années de détention provi-
    soire qui ont précédé son procès.
    Le 16 octobre 2018, au terme
    d’une audience de cinq semaines
    pendant lesquelles Wojciech Ja-
    nowski n’avait cessé de clamer
    son innocence dans les deux
    crimes qui lui sont reprochés – la
    commandite de l’assassinat de sa
    belle-mère monégasque Hélène
    Pastor et celle de son chauffeur et
    majordome Mohamed Darwich à
    la sortie de l’hôpital de Nice le
    6 mai 2014 –, Me Dupond-Moretti
    avait créé la surprise en ouvrant
    sa plaidoirie par ces mots : « Woj-
    ciech Janowski est coupable
    d’avoir commandité l’assassinat
    d’Hélène Pastor. J’entends vous
    dire pourquoi ces mots que vous
    attendiez de lui sortent de ma
    bouche. Wojciech Janowski a
    voulu s’expliquer mais il n’a pas
    été entendu. »
    Contrairement à ce qu’il avait
    initialement soutenu, l’avocat
    avait ensuite repris, pour les vali-
    der, à la fois les aveux passés par
    son client en garde à vue – dont
    l’enregistrement avait été diffusé
    dans la salle d’audience – et les ex-


plications alors données par Woj-
ciech Janowski à cette comman-
dite : la souffrance de sa compa-
gne, Sylvia Ratkowski, face au har-
cèlement permanent de sa mère,
Hélène Pastor, le cancer « lié au
stress » que cette tension quoti-
dienne aurait entraîné chez elle,
et la volonté de « sauver » sa fa-
mille en « réglant le problème de
sa belle-mère ». « Ma seule motiva-
tion, c’était l’amour pour ma
femme et la souffrance de mes en-
fants », avait-il déclaré.
« Voilà le mobile, voilà le crime de
Wojciech Janowski! La belle-mère,
oui, sans équivoque, avait pour-
suivi Me Dupond-Moretti. Moha-
med Darwich, non. Je vous de-
mande de condamner Wojciech Ja-
nowski pour l’assassinat de sa bel-
le-mère et de l’acquitter pour celui
de Mohamed Darwich. »
Le lendemain, juste avant que la
cour ne se retire pour délibérer,
l’accusé avait présenté ses « excu-
ses » à sa compagne de vingt-cinq
ans, à la fille de celle-ci, Olivia, et à
leur fille commune, Lara. L’aveu
partiel formulé par la bouche de
Me Dupond-Moretti n’avait pas
convaincu la cour et les jurés
d’Aix-en-Provence qui ont con-
damné Wojciech Janowski à la

réclusion criminelle à perpétuité
pour les deux assassinats. Le gen-
dre d’Hélène Pastor avait aussitôt
interjeté appel de cette condam-
nation. Il a, depuis, changé de con-
seil et a fait appel à Me Jean-Jac-
ques Campana, du barreau de
Marseille.

« Vous me laissez faire »
Depuis sa prison, Wojciech Ja-
nowski a d’abord écrit plusieurs
longues lettres à l’avocat général
Pierre Cortès qui avait requis con-
tre lui, pour défendre son inno-
cence et surtout démentir l’aveu
fait en son nom par Me Dupond-
Moretti. Il a ensuite adressé un
courrier au bâtonnier de Paris,
qui n’est pas une plainte mais
prend la forme d’une contesta-
tion d’honoraires et doit être, à ce
titre, instruite par l’ordre.
A l’appui de cette contestation,
Wojciech Janowski répète qu’il n’a
pas donné son consentement à
son avocat, tout en reconnaissant
que Me Dupond-Moretti l’a in-
formé de son intention de plaider
coupable lors d’une visite dans les
geôles du palais de justice d’Aix-
en-Provence juste après le réqui-
sitoire de l’avocat général. « Vous
me laissez faire », lui aurait dit
l’avocat, en lui demandant seule-
ment de présenter des excuses
dans la foulée.
Cette initiative de Wojciech
Janowski contre son ancien avo-
cat est concomitante de la de-
mande de mise en liberté qu’il a
déposée début juillet. Elle sera
examinée dans les premiers jours
de septembre par la chambre de
l’instruction. Le procès en appel
de l’affaire Pastor devrait avoir
lieu au printemps 2020.p
pascale robert-diard

Cette initiative
est concomitante
à la demande
de remise en
liberté déposée
par Wojciech
Janowski
début juillet

ment de la taxe sur le gazole dont
ils bénéficient. « Il ne faut pas
donner des braises à des foyers qui
pourraient vouloir reprendre »,
ajoute cet élu.
Dans ce contexte inflammable,
le gouvernement veut placer la
rentrée sous le thème de l’Etat
protecteur. D’autant que les
grandes réformes de transforma-
tion de l’économie ont déjà été
faites (ordonnances travail, for-
mation professionnelle...). Sur la
pauvreté ou la protection de l’en-
fance, il prévoit de revenir sur ce
qui a été lancé, voire de prendre
de nouvelles dispositions. Le
3 septembre, le Grenelle des
violences conjugales sera aussi
l’occasion d’annonces fortes,

promet-on dans l’entourage du
premier ministre.
« Il nous faut convaincre que les
critiques sur notre bilan écologi-
que en demi-teinte ne sont pas
justifiées », ajoute-t-on à Mati-
gnon. Plusieurs projets de loi
(énergie-climat, sur l’économie
circulaire, sur l’organisation de la
mobilité) seront examinés au
Parlement au sortir de l’été, dont
l’exécutif espère qu’ils lui per-
mettront de marquer des points
sur ces thématiques. Et, de ce
point de vue, le changement de
ministre, pense-t-on dans l’en-
tourage du président, peut être
« une opportunité ».
En attendant que le gouverne-
ment se retrouve au grand com-
plet pour le conseil des ministres
du 21 août, Emmanuel Macron a
fait une dernière recommanda-
tion à ses troupes, avant de partir
en vacances : de la sobriété.
« Vous le savez, nous vivons une
époque où rien ne nous est
épargné. Ayez bien cela en tête »,
leur a lancé le président, qui les
recevait le 23 juillet à l’Elysée,
quelques jours après la démis-
sion de François de Rugy, autour
d’un « buffet dînatoire ». Sans ho-
mard au menu.p
virginie malingre
avec manon rescan

DE LA CRÉATION D’UN


SYSTÈME DE RETRAITE PAR


POINTS À L’EXTENSION


DE LA PMA AUX FEMMES


CÉLIBATAIRES ET


HOMOSEXUELLES,


LES DOSSIERS À RISQUE


SONT NOMBREUX

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