Beaux Arts - 04.2019

(Grace) #1

MARCHÉ l LES ACTEURS


136 I Beaux Arts


La tribune de...


L’œil du
collectionneur

L


e réseau public des classes préparatoires aux concours d’entrée des écoles supérieures
d’art est une richesse essentielle! Majoritairement situées dans des villes françaises
de taille moyenne, ces prépas permettent aux jeunes des territoires d’embrasser
leurs passions et leurs rêves. Mais les chiffres sont cruels. En 2018, sur les 11 700 jeunes
inscrits en prépa, moins de 1 000 l’étaient
dans une classe publique. Et sur les
2 400 étudiants reçus chaque année dans
les écoles supérieures d’art publiques
en France, 65 % le sont après avoir suivi
cette année préparatoire au concours.
Pour les écoles les plus attractives,
ce pourcentage dépasse les 90 %. Enfin,
les prépas privées sont cinq fois plus chères
et concentrées dans les métropoles.

Prônons plutôt l’égalité
de la réussite
Le législateur a réagi et a voté en 2016
une loi donnant un agrément aux écoles
préparatoires publiques et un statut
d’étudiant aux élèves. Je milite pour que
le relais soit maintenant pris par ces
collectivités qui ont tant besoin d’étudiants
et de revitalisation de leur centre-ville.
Elles doivent multiplier par dix leurs
capacités d’accueil. La responsabilité des
établissements supérieurs sera de jouer
le jeu et de réinventer les modalités
d’entrée. D’accompagner les professeurs d’arts plastiques enseignant dans les collèges
et lycées afin d’affirmer non plus l’égalité des chances face aux concours, mais l’égalité
de la réussite par des orientations pertinentes. Face au coût élevé des études, les droits
d’inscription et les frais pédagogiques devraient être modulables de 0,5 % à 20 % selon les
ressources des familles. Ne nous effrayons pas que les étudiants extra-européens participent
financièrement à la mise en place d’une réelle qualité d’accueil, à un apprentissage en
profondeur de la langue française, à la création de modules internationaux pour une
adaptation pleine de ces étudiants à nos enseignements. Ici encore, l’égalité de la réussite
doit primer sur l’égalité des prix. La mesure la plus efficace serait la création d’un concours
concerté à l’échelle nationale. Notre jeunesse a besoin de sortir de l’époque de la sélection,
d’une méritocratie écrasante pour se tourner vers une ère de l’orientation et corrélativement
du temps modulable des choix où la passion est le critère premier. Nous nous devons de
relever les enjeux des réformes visant à mieux orienter les lycéens, sans vision caricaturale
de Parcoursup. Dire non à la sélection, c’est savoir encourager l’intelligence sensible tout
au long de la vie et accepter les petites et grandes histoires de chacun.

Les études artistiques suscitent un tel engouement que la sélection
se fait de plus en plus drastique. Parallèlement, l’uniformisation
des parcours et des profils devient problématique...

Pierre-Jean Galdin


Les écoles d’art


doivent renoncer à la sélection


«


Quelle est l’histoire
de la collection
Draeger dont vous
êtes l’héritier?
C’est l’histoire d’une
collection familiale
qui a commencé
en 1886 lorsque
mon grand-père
Charles Draeger
a fondé l’imprimerie d’art Draeger
et, en collaboration avec une centaine
d’artistes, produit de très beaux albums
et affiches publicitaires. J’ai moi-même
travaillé dans l’entreprise familiale
jusqu’à sa cession en 1971. Quelques
années plus tard, les archives ont été
vendues par les repreneurs à Drouot,
où j’ai eu l’occasion de racheter un
certain nombre de documents qui ont
complété ce que nos grands-parents
avaient personnellement conservé.

Que va-t-elle devenir?
Pour que la nouvelle génération garde
un souvenir de cette extraordinaire
épopée des maîtres imprimeurs, j’ai
réalisé un livre, Draeger – Les pages d’or
de l’édition, qui sera lancé au Salon
international du livre rare [lire p. 150],
et financé par la vente d’une partie de
la collection, notamment les originaux
conservés par ma famille. L’expert
et spécialiste en livres et catalogues
illustrés Jean Izarn, de la librairie
Chrétien, présentera sur son stand
une centaine d’œuvres originales :
peintures, aquarelles, encres de Chine
et ouvrages signés Matisse, Léger,
Van Dongen, Dufy, Buffet, Dalí,
Jean de Brunhoff – le créateur
de Babar –, Boutet de Monvel...

Avez-vous d’autres domaines
de collection?
Amoureux de l’artisanat de marine
depuis ma plus tendre enfance, j’ai
collectionné des maquettes de bateaux
pendant des années. Cette collection
devenant un peu trop envahissante,
j’ai fini par tout vendre. Depuis je
collectionne tout ce qui touche aux
peuples indiens d’Amazonie – coiffes
en plumes, objets usuels... – que j’ai
eu l’occasion de découvrir durant
mes séjours au Brésil.

Alain Draeger


Je collectionne tout ce
qui touche aux peuples
indiens d’Amazonie»

Ancien imprimeur, à Paris
Directeur général des Beaux-Arts de Nantes et Saint-Nazaire

Examen des beaux-arts de l’Université d’art
et de design du Shandong à Jinan, en Chine.
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