Beaux Arts - 05.2019

(Steven Felgate) #1

128 I Beaux Arts


GALERIES l EXPOSITIONS


Nos coups de cœur


Galerie &Co119
Shoji Ueda, l’homme des sables
Il a fait des dunes de Tottori, qui s’étendent le long de la mer du Japon, son studio,
sa signature et sa source inépuisable d’inspiration : «On ne peut pas trouver d’arrière-
plan plus parfait, l’horizon est étirable à l’infini. La dune est un paysage presque
naturellement photographique.» Entre la grâce légère d’un Lartigue et la dinguerie
métaphysique d’un Magritte, Shoji Ueda (1913-2000) a toute sa vie composé
des images dans sa région natale, en marge des grands courants photographiques
qui secouèrent l’archipel après guerre. La galerie-librairie &Co119, très prisée des
collectionneurs de livres de photos pour ses rares imports japonais, montre quelques
images iconiques de l’artiste, mettant en scène sa femme, ses enfants ou ses voisins
dans d’irréelles abstractions de sable. On y voit aussi ses photographies de mode,
autant de jeux avec les échelles, les superpositions et le comique de situation :
un cliché facétieux montre ainsi des cintres plantés dans le sable à défaut de voir
les mannequins, partis prendre un bain de mer. Conçue avec son petit-fils Yutaka
Masutani, cette exposition enchanteresse ne réunit que des tirages réalisés par
le photographe même, où la poésie le dispute toujours à une imagination infinie.
Comme si le sablier ne devait jamais cesser de s’écouler. Natacha Nataf
«Le monde de Shoji Ueda» jusqu’au 17 mai
119, rue Vieille du Temple • 75003 Paris • 09 70 97 59 18 • https://8co119.co
À voir aussi : l’exposition documentaire «Shoji Ueda – Portraits intimes» du 2 au 17 mai
à l’espace Japon • 12, rue de Nancy • 75010 Paris • http://www.espacejapon.com

«J’aime photographier sous terre»... Stéphane Duroy ne saurait mieux décrire sa démarche qu’à travers
cette phrase taiseuse : du Berlin d’avant le mur aux plaines américaines, de Dublin à Douaumont, il sait
déceler sous la surface les tremblements de l’histoire, les traces sourdes du malheur, l’écho des bombes.
Ses images en livrent les indices ténus, tragiques sous leur velours mat. Sur l’Europe en perpétuelle
reconstruction, il porte un regard à la mélancolie glacée, qui semble aujourd’hui de plus en plus sceptique
quant à la force d’évocation des images. Et pourtant, impossible d’oublier les siennes... La galerie Vu
retrace quarante-cinq ans d’un parcours hors norme, éclairé également par un entretien avec Sophie
Bernard (Rencontres) qui vient de paraître chez Filigranes Éditions. Âpre témoignage de cet intranquille
enfant du siècle. Emmanuelle Lequeux

Galerie Vu


Stéphane Duroy,
mélancolie du regard
«Stéphane Duroy» jusqu’au 31 mai
58, rue Saint-Lazare • 75009 Paris
01 53 01 85 85.• http://www.galerievu.com

Extrait de la série Mode dans les dunes, 1983


Extrait de la série Unknown, 2001


QQQ

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