Télérama Magazine N°3629 Du 3 Août 2019

(Joyce) #1

cinéma


30

Alfredo C

Apozzi - 2019 SCUdeTT

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Ski - 2018 TwenTieTh CenTUry

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CorporATion. All

righTS

reServed

,
on aime un peu

N
beaucoup

B
passionnément

.
on n’aime pas

Gloire et déclin de l’idole du foot née dans un bidonville argentin. S’il néglige


le génie de Maradona, ce document émeut quand il évoque les failles de Diego.


Diego MaraDona


asif KapaDia


réalisateur a choisi en vérité un autre


angle, voisin de celui d’Amy, son précé-


dent documentaire, consacré à la chan-


teuse Amy Winehouse : celui d’une su-


perstar, aux frasques retentissantes,


connaissant la gloire et la décadence.


Voici donc l’épopée d’El Pibe de Oro


(« le gamin en or »), qui a grandi dans un


bidonville de la banlieue de Buenos


Aires, qui a soutenu très tôt financière-


ment toute sa famille (parents et sœurs)


grâce à ses premiers contrats de joueur


professionnel et qui est vite devenu


une idole du foot international. Sont


rappelés sa Coupe du monde fabuleuse


de 1986 avec l’équipe d’Argentine et ses


deux buts historiques, l’un de la main,


l’autre après un slalom unique où il


dribble six adversaires anglais.


Mais le chapitre consacré aux an-


nées passées dans le club du SSC Napo-


li reste le plus intéressant. Parce qu’il


est nourri d’images d’archives iné-


dites, parce qu’il concentre l’amour


démesuré et quasi religieux des Napo-


litains pour leur héros, qui leur a fait


,


Sur le génie du ballon rond,


Emir Kusturica avait déjà


œuvré, en signant un docu-


mentaire assez médiocre, égocen-


trique et hagiographique, mais qui


contenait quelques perles du boni-


menteur invétéré, dont celle-ci : « Vous


imaginez ce que j’aurais pu faire si je ne


m’étais pas drogué? Au fond, on est pas-


sé à côté d’un grand joueur de foot. »


Dans ce film-ci, la parole de l’Argentin,


entendue par intermittence en voix


off, est moins provocante, moins vive


aussi. Elle survole les grandes lignes,


sans rien apporter de vraiment signifi-


catif. Le plus pertinent vient plutôt des


commentaires d’autres intervenants,


comme ceux du journaliste sportif Da-


niel Arcucci, de la sœur du joueur ou


de Fernando Signorini, son prépara-


teur physique.


Asif Kapadia aime-t-il le foot? Pas sûr.


Sur la technique exceptionnelle du


joueur, son sens du dribble, sa vista, il


n’y a pas grand-chose, mis à part l’ava-


lanche de buts extraits de matchs. Le


oublier les offenses et le racisme infli-


gés par les puissants du Nord. Parce


que c’est là-bas, enfin, qu’il finit par


chuter. Maradona, payant le prix fort,


se retrouve seul, lâché par tous ceux


qui ont su largement tirer profit de lui :


les dirigeants du club, la Camorra, la


presse, une part des supporters...


Le film omet la facette « révolution-


naire » (pro-cubaine !) du joueur, mais


passe en revue la plupart des autres,


faisant du numéro 10 un fanfaron aga-


çant, charmant, anticonformiste, dé-


magogue, bref, pétri de contradictions.


Ecrasé surtout par la célébrité, le


poids des responsabilités de toutes


sortes et l’addiction à la cocaïne.


L’émotion du film, forte, bien que par-


fois racoleuse, naît de l’empathie pour


ce drôle de gamin grandi trop vite, his-


sé trop haut. Un ange déchu, visage ra-


cé et corps râblé d’haltérophile, à la


beauté aussi éclatante que laide. Mais


lui au moins, à la différence d’Amy


Winehouse, est toujours vivant.


— Jacques Morice


| Documentaire anglais (2h10).


Lire Télérama n°3628, page 19.


Le prodige
au talon d’Achille
dans son âge d’or
napolitain.

MiDsoMMar


ari aster


,


Frappée par un deuil brutal,


une jeune Américaine suit


son petit ami en Suède, où il


comptait draguer des blondes avec


des copains. Mais l’été nordique se ré-


vèle sombre pour cette bande de


jeunes qui, après avoir ingurgité des


champignons hallucinogènes,


perdent le contrôle des réjouissances...


Comme dans Hérédité (2018), du


même talentueux réalisateur, le cha-


grin lié à la mort d’un proche finit par


exposer les personnages aux mal-


heurs et à la cruauté du cinéma d’hor-


reur. Le réalisme de la situation se dis-


sout malheureusement trop vite dans


une vision totalement délirante du


folklore nordique, plus comique qu’ef-


frayante. Si les bizarreries du scénario


ne passionnent pas, la folie visuelle,


en revanche, impressionne : Midsom-


mar est un objet arty qui vaut le coup


d’œil. — Frédéric Strauss


| Etats-Unis (2h20) | Avec Florence Pugh,


Jack Reynor, Will Poulter.


Télérama 3629 31 / 07 / 19

©CARACTÈRES CRÉDITS NON CONTRACTUELS UN FILM DE KANTEMIR BALAGOV


7 AOÛT

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