Cinéma
Lee contrefait des lettres d’écrivains. Ce thriller d’arnaque intelligent, inspiré
d’un fait réel, décrit le fascinant milieu littéraire new-yorkais des années 90.
Les Faussaires
de manhattan
marieLLe heLLer
Melissa McCarthy
réussit à nous
rendre attachante
l’irascible Lee
(avec Richard
E. Grant).
vaine et faussaire arrêtée par le FBI en
1993, rend le milieu littéraire capti-
vant! Au fil d’un scénario qui, en ac-
cord avec son héroïne, privilégie l’in-
telligence par rapport à la facilité, ce
thriller d’arnaque s’attache de ma-
nière délicatement romanesque au
quotidien de l’irascible Lee, pour la
suivre, ensuite, dans un Greenwich
Village des années 90 où chaque librai-
rie et recoin de bar de nuit fleure bon
le bourbon et l’érudition mélanco-
lique de ceux qui savent, encore, qui
est Dorothy Parker ou Noel Coward.
La réalisatrice dévoile, ainsi, un petit
monde de collectionneurs dont les
tractations à mi-voix sont dignes d’un
film d’espionnage. Surtout, plus Lee
falsifie, plus son appartement s’emplit
de vieilles machines à écrire qui sont
autant d’instruments du crime, et plus
n
Spécialisée dans les biogra-
phies de grandes figures fé-
minines américaines, Lee a
connu, il y a dix ans, un vrai succès
avec un de ses livres, mais ses sujets
n’intéressent plus personne. Ecrire
des histoires plus croustillantes et ven-
deuses? Plutôt crever! N’ayant plus un
sou pour payer son loyer ou les médi-
caments de son chat, cette auteure al-
coolique et aimable comme un bou-
quet d’orties se met à inventer et à
vendre des lettres d’écrivains et d’ac-
teurs décédés. Elle est si douée pour se
fondre dans le style des autres que les
collectionneurs n’y voient que du feu.
Elle trouve même un complice idéal
en la personne de Jack, homosexuel li-
bertaire, aussi solitaire, désargenté et
caustique qu’elle... Cette adaptation
de l’autobiographie de Lee Israel, écri-
elle devient attachante. Il faut dire
qu’elle est incarnée par une Melissa
McCarthy étonnante, loin de ses em-
plois comiques habituels : elle donne à
cette femme de plume(s) la chair par-
faitement rugueuse et fière d’un génie
singulier. — Guillemette Odicino
| Can You Ever Forgive Me ?, Etats-Unis
(1h47) | Scénario : Nicole Holofcener,
Jeff Whitty. Avec Melissa McCarthy,
Richard E. Grant, Dolly Wells.
Télérama 3629 31 / 07 / 19
©CARACTÈRES CRÉDITS NON CONTRACTUELS UN FILM DE KANTEMIR BALAGOV
7 AOÛT