Télérama Magazine N°3629 Du 3 Août 2019

(Joyce) #1
72 t On aime un peu... y ... beaucoup u ... passionnément r ... pas du tout I Pas vu mais... faut voir

câble | satellite


u 23.00 Ciné+ Club Film

Un homme intègre


| Film de Mohammad Rasoulof (Lerd, Iran, 2017)
| 115 mn. VO | Avec Reza Akhlaghirad (Reza),
Soudabeh Beizaee (Hadis), Nasim Adabi
(la mère de l’étudiante), Zeinab Shabani
(l’assistante de Hadis à l’école).
| GeNRe : RéSIStANce.
Mohammad Rasoulof est un cinéaste cou-
rageux. Il sait qu’il peut être envoyé en
prison à tout moment. Mais cela ne l’a pas
dissuadé de tourner ce brûlot. Un impres-
sionnant thriller social, qui se révèle une
charge implacable contre la corruption
généralisée au pays des mollahs.
Ici, tout s’a chète, tout se négocie : un
coup de pouce pour qu’une plainte soit
traitée en priorité par le juge ; un certificat
bidon délivré par un médecin légiste com-
plaisant... Reza, modeste éleveur de pois-
sons rouges, semble le seul à refuser ce
système de petits arrangements et de
passe-droits où tout le monde est com-
plice. Dans ce contexte, les intérêts écono-
miques, le pouvoir politique et les inter-
dits religieux se confondent pour mieux
contrôler les citoyens. Et exclure tous ceux
qui ne rentrent pas dans le rang...
Rasoulof entretient, par sa mise en
scène chirurgicale, une tension perma-
nente. Le film devient vite un cauchemar
éveillé aux images et aux sons traumati-
sants. Dès que Reza pense avoir résolu un
problème, il doit faire face à une nouvelle
catastrophe, plus dramatique encore.
Son beau-frère l’avait prévenu : « Certains
apprennent vite, d’autres moins. » Reza,
lui, prendra son temps, mais s’endur cira.
A son tour, il ourdira une machination
machiavélique... Et quelle ironie! Voilà
l’homme intègre récompensé pour son
intransigeance par ce système corrup-
teur qu’il a tant combattu... et dont il
pour rait, s’il le souhaitait, devenir l’un
des rouages interchangeables. Terrible
morale, pessimiste et rageuse, de ce
grand film. — Samuel Douhaire
Rediffusions : 8/8 à 15.10, 9/8 à 4.30.

u 22.05 OCS Géants Film

Lola


| Film de Jacques Demy (France/Italie, 1961) | Image : Raoul coutard.
Musique : Michel Legrand | 95 mn. NB | Avec Anouk Aimée (Lola/cécile),
Marc Michel (Roland cassard), Jacques Harden (Michel), Alan Scott
(Frankie), elina Labourdette (Mme Desnoyers), Margo Lion (Jeanne),
Annie Duperoux (cécile Desnoyers), catherine Lutz (claire), corinne
Marchand (Daisy), Yvette Anziani (Mme Frédérique).
| GeNRe : DRAMe pOétIque.
Lola danse dans un cabaret nantais et séduit des marins de pas-
sage. Depuis sept ans, elle attend le retour de son unique amour,
le père de son enfant. Elle retrouve un ami d’enfance qui tombe
amoureux d’elle. Ailleurs dans la ville, Mme Desnoyers élève sa
fille, qui ressemble à l’enfant que fut Lola.
Pour son premier film, Jacques Demy rêvait de couleurs, de
danses et de chansons, mais les producteurs refusèrent de déblo-
quer leurs fonds. « Il a bien fallu qu’au lieu de faire de la peinture je
fasse du fusain. Travailler avec le noir et blanc, puisque c’étaient les
deux seules couleurs que j’avais à ma disposition. » Résigné, Demy
pose les jalons de tous ses films futurs, dans un chef-d’œuvre
d’une éblouissante blancheur cotonneuse. Une fausse comédie
musicale, où les hésitations, les soupirs, les déhanchements
composent un hymne au hasard. Les personnages entrent dans
la ronde du destin, se frôlent et s’évitent. Le cinéaste tisse patiem-
ment la toile qui servira de trame à tous ses films : Roland Cassard
reviendra dans Les Parapluies de Cherbourg, où il évoquera, en
chanson, son amour impossible (« Autrefois, j’ai aimé une femme,
on l’appelait Lola... »), et Lola deviendra strip-teaseuse à Los An-
geles dans Model Shop, avant de finir découpée au fond d’une
malle dans Les Demoiselles de Rochefort! Diaphane et frivole, avec
son rire en escalier ponctué par un soupir amer, Anouk Aimée
redonne tout son sens au mot « apparition ». — Marine Landrot
Rediffusions : 10/8 à 7.52, 12/8 à 19.12, 16/8 à 17.50.

t 20.55 Warner TV Série

I’m Sorry


| Série créée par Andrea Savage (saison 2, 1 à 5/10, uSA, 2019) | 5 × 25 mn.
VM. Inédit | Avec A. Savage (Andrea), tom everett Scott (Mike),
Olive petrucci (Amelia), Kathy Baker (Sharon), Lauren Gaw (emily).
Andrea Warren, scénariste à Los Angeles, n’est pas du genre à dire

« I’m sorry », à s’excuser de parler trop fort ou de se mêler de ce qui


ne la regarde pas. Grande enfant excentrique, elle se pose sans
cesse des questions existentielles, comme combien gagnerait-elle
si elle se prostituait ou est-il malsain de regarder un film érotique
avec ses parents... et rien ne l’arrête pour obtenir des réponses.
Même quand sa fille, qui entre en primaire, est concernée.
Dans la catégorie très concurrentielle de l’autofiction comique,
I’m Sorry est moins originale, plus proche d’une sitcom tradition-
nelle que ses illustres prédécesseurs Larry et son nombril ou Louie.
Andrea Savage, créatrice et actrice à l’énergie communicative,
trouve le ton juste entre tendresse et provocation, soigne des dia-
logues souvent percutants et profite de partenaires de jeu sympa-
thiques. Dommage qu’elle soit un peu trop systématique dans sa
façon de provoquer l’embarras. — Pierre Langlais CauChetier/Cine

tamaris

« ... celle qui rit à tout
propos, celle qui dit
l’amour c’est beau,
celle qui plaît sans
plaisanter, reçoit
sans les dédommager
les hommages des
hommes âgés et les
“bravos” des braves
gars, les “hourras”,
les “viens avec moi”,
celle qui rit de tout
cela, qui veut plaire
et s’en tenir là... »

Télérama 3629 31 / 07 / 19
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