01Net N°913 Du 7 Août au 3 Septembre 2019

(Marcin) #1
complète du plancher océanique. Le
projet, qui a été baptisé Seabed 2030,
fait appel aux acteurs du monde mari-
time en les invitant à partager les don-
nées qu’ils auraient pu collecter lors de
diverses missions.
Ainsi, la compagnie Ocean Infinity
a-t-elle cédé les informations qu’elle avait
récoltées en lançant son bateau Seabed
Constructor sur les traces de l’épave
du Boeing 370 de la Malaysia Airlines,
disparu il y a plus de cinq ans.

INTELLIGENCE EMBARQUÉE. Les quelque
120000 kilomètres carrés prospectés
dans l’océan Indien contribueront donc
à nourrir la carte des fonds marins. Des
navires de prospection pétrolifères, char-
gés de les scanner en quête d’or noir, ont
aussi transmis le fruit de leurs recherches
à Seabed 2030. Au total, depuis les dé-
buts du projet, 570000 kilomètres carrés
ont ainsi pu être cartographiés.
L’avènement de nouvelles techniques
de prospection devrait accélérer les
découvertes. Achevé en juin, le challenge

85 % DU PLANCHER OCÉANIQUE


RESTERAIT À EXPLORER


Ocean Discovery, organisé par la fonda-
tion californienne XPrize, proposait à des
équipes scientifiques de développer un
système automatisé, capable notam-
ment de cartographier au moins 250 ki-
lomètres carrés de reliefs océaniques en
seulement vingt-quatre heures, jusqu’à
une profondeur de 4 kilomètres. C’est
une équipe internationale de chercheurs
basés aux États-Unis qui a raflé le pre-
mier prix, un chèque de 4 millions d’eu-
ros. Baptisé Seakit, leur procédé repose
sur un navire autonome couplé à un
drone submersible, pourvu d’un sonar.
« C’est le genre de technologie qui va contri-
buer à éclairer les mystères des abysses,
inconnus depuis la nuit des temps », s’est
réjoui Jyotika Virmani, la directrice de
l’Ocean Discovery XPrize.
Bien d’autres technologies sont en
cours de développement. Telles ces
« abeilles marines », des minidrones sub-
mersibles, à peu près gros
comme un ballon de foot,
conçus par la start-up ni-
çoise Eauligo. « Nos micro-
robots portent bien leur nom,
car ils se comportent comme
des abeilles. Simplement, au
lieu de chercher des fleurs
puis de divulguer les em-
placements à la ruche, nos
abeilles marines explorent
les planchers océaniques et
remontent [à la surface] afin
de partager leurs données »,
note Christophe Lewis,
leur concepteur. Selon cet
ingénieur en électronique,
une flotte de 20 à 30 de ces
cyberabeilles aurait déjà la
capacité d’explorer

Loin de révéler un manque d’intérêt,
cette terra incognita illustre surtout un
casse-tête technologique. Impossible de
scruter le relief des océans comme on
balaie le relief d’un astre, par exemple. Si
quelques satellites suffisent à étudier
celui de la Lune, ces engins spatiaux sont
incapables de percer les secrets des
abîmes océaniques. Principale raison?
L’eau de mer est opaque aux ondes élec-
tromagnétiques.
L’étude des plissements sous-marins
nécessite donc encore souvent de recou-
rir à des bateaux. Ceux-ci sont équipés
de sonars, des appareils électroniques
chargés de prendre des mesures depuis
le pont. Cet équipement fonctionne en
émettant un son qui va se propager sous
forme d’onde acoustique jusqu’au fond,
avant d’être réfléchie en écho vers la sur-
face. Il enregistre cet écho afin de calcu-
ler le temps mis par l’onde pour effectuer
cet aller-retour. Connaissant sa vitesse
de propagation dans l’eau de mer, on en
déduit la distance parcourue, et donc la
profondeur. L’intensité de l’écho contri-
bue également à définir la
nature du sol (boue, vase,
roche, etc.).
Parcourir de la sorte les
quelque 361 millions de
kilomètres carrés de mers
et d’océans couvrant notre
planète ressemble à un
défi herculéen. La Nippon
Foundation, une grande
organisation philanthro-
pique japonaise, semble
pourtant bien décidée à le
relever. Voilà deux ans, elle
a lancé un important pro-
gramme communautaire
et international qui vise à
produire – d’ici à la fin de la
prochaine décennie –, la
cartographie numérique

Ce robot de l’Ifremer est équipé d’un appareil photo
numérique et d’un sonar pour sonder les océans
jusqu’à 2 500 mètres de profondeur.

Ce minidrone se comporte comme une abeille.
Un essaim d’une vingtaine de ces microrobots
est capable d’explorer 500 m^2 en quatre heures.



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