Les Echos - 01.08.2019

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16 // ENTREPRISES Jeudi 1er août 2019 Les Echos


le fonds de la famille Van der Vorm,
dans GrandVision, pour un prix par
action de 28 euros, soit une prime
de 33 % sur le cours du 16 juillet, à la
veille des premières fuites dans la
presse. Ce qui devrait être réalisé
dans un délai de douze à vingt-qua-
tre mois, après le feu vert des autori-
tés de la concurrence. EssilorLuxot-
tica lancera ensuite une offre sur le
solde du capital, et retirera le distri-
buteur de la Bourse d’Amsterdam.

Se rapprocher
des consommateurs
« C’est un mouvement naturel, qui a
été décidé très rapidement avec
l’accord total des deux conseils d’admi-
nistration », a fait valoir Laurent
Vacherot, le codirecteur général du
groupe. Une surprise alors que ces
derniers mois la crise de gouver-
nance entre Italiens et Français para-
lysait toutes les décisions. En fait, ce
nouveau pas stratégique aurait été
décidé en amont, et son calendrier
était « prévu dans le plan d’intégra-
tion », a fait valoir le dirigeant.
Tout l’enjeu de ce rapproche-
ment est de servir de « catalyseur »
pour développer l’industrie de
l’optique. Et surtout de permettre
au fabricant d’avoir un lien direct
avec les consommateurs. « Il y a un
énorme écart entre l’industrie et les
consommateurs, a souligné Laurent
Vacherot. Il est très difficile via la dis-
tribution de leur expliquer quels sont
leurs besoins pour mieux protéger
leur vision, alors que beaucoup
d’innovations sont développées. » De
nombreuses enseignes d’optique
proposent aujourd’hui à prix c assés
des lunettes et des verres fabriqués
en majorité en Asie. La qualité des
lunettes de soleil, notamment pour
les enfants, n’est pas toujours au
rendez-vous.

Autre intérêt de ce rachat, la com-
plémentarité en termes géographi-
ques de l’activité de GrandVision,
dont le chiffre d’affaires s’élève à
3,7 milliards d’euros, avec un excé-
dent brut d’exploitation de 576 mil-
lions. Propriétaire en France de
GrandOptical et Générale d’Optique,
le distributeur est surtout présent en
Europe (75 % du réseau) et en Améri-
que latine, avec plus de 7.200 maga-
sins et des sites en ligne dans 40 pays.
Un parc qui va s’ajouter aux quelque
10.000 points de vente d’Essilor-
Luxottica, eux localisés surtout en
Amérique du Nord. Sur le Vieux
Continent, ce dernier estime avoir
moins de 10 % de points de vente.
« Avec GrandVision, nous serons à
même de développer notre réseau
commercial de détail, qui s’étendra
enfin à l’ensemble des régions du
monde », a souligné Leonardo Del
Vecchio, PDG d’EssilorLuxottica.
L’opération va donner naissance
à un leader mondial réalisant un
Dominique Chapuis
[email protected]


Le rachat du distributeur néerlan-
dais GrandVision n’est-il pas risqué
alors que les synergies entre Essilor
et Luxottica tardent à se mettre en
place après leur fusion finalisée en
octobre 2018? C’est la question que
se posent les analystes après la con-
firmation mercredi de cette opéra-
tion géante, lors de la publication
des semestriels au beau fixe du
groupe franco-italien. EssilorLuxot-
tica, leader mondial d e la fabrication
et de la distribution de verres et de
montures, va mettre plus de 7 mil-
liards d’euros sur la table (avec en
plus une reprise de dette de 0,9 mil-
liard) pour un rachat en deux temps.
Il va d’abord reprendre la partici-
pation de 76,72 % détenue par HAL,


BIENS DE
CONSOMMATION


Le numéro un mondial
de l’optique va racheter
le distributeur néerlan-
dais GrandVision pour
7,1 milliards d’euros,
plus la dette.


Il ajoutera ainsi
7.000 points de vente
à son parc, essentielle-
ment en Europe.


Une opération géante
qui intervient alors
que l’intégration entre
le français et l’italien
tarde à se mettre
en place sur le terrain.


Le groupe justifie ce recul de la
rentabilité par « l’impact défavo-
rable des taux de change et du coût
des matières premières », ainsi
que par des « investissements
ciblés » de soutien à la marque.
« Nous continuons à f aire face à des
conditions de marché défavorables
dans nos trois catégories, papete-
rie, briquets et rasoirs », a expliqué
le directeur général, Gonzalve
Bich, qui se félicite néanmoins
d’une « dynamique positive »
retrouvée pour les rasoirs.

Trouver
un second souffle
Pour 2019, il anticipe toujours
une « légère croissance » du chif-
fre d’affaires (à base compara-
ble) et compte retrouver du souf-
fle au second semestre grâce à
l’effet favorable du décalage des
ventes de rentrée scolaire et à la
croissance de l’e-commerce. Il
mise aussi sur les résultats du
plan de transformation annoncé
en février, qui met l’accent sur le
numérique (+21 % pour les ven-
tes en ligne au premier semes-
tre), grâce notamment à un par-
tenariat avec Amazon aux Etats-
Unis ou la mise en place d’un site
de vente en ligne en France.
Dans le cadre de ce plan de
transformation à l’horizon
2022, Bic a annoncé la suppres-
sion de 450 postes dans les fonc-
tions administratives, dont une
centaine à son siège de Clichy
(Hauts-de-Seine). Parallèle-
ment, il va créer 400 nouveaux
emplois dans les métiers du
numérique, dont près de la moi-
tié en Bulgarie. Insuffisant
cependant pour redresser une
rentabilité annoncée en baisse
cette année. Elle sera « comprise
entre 16,5 et 18 % », après 18,1 %
en 2018 et 19,6 % en 2017.n

Jean-Michel Gradt
@ogrady

A la Bourse de Paris, le titre Bic
plongeait de plus de 8 % mer-
credi après-midi. Sur le papier,
pourtant, le bénéfice net du
fabricant français de stylos-
bille, de briquets et de rasoirs
jetables a plus que doublé au
deuxième trimestre (+126 %, à
50,3 millions d’e uros).
Un effet d’optique en réalité,
car ce bond s’analyse au regard
d’un deuxième trimestre très
difficile en 2018, où Bic avait dû
déprécier les actifs Cello, sa
filiale de stylos en Inde.
« Impact de cette dépréciation et
des coûts de restructuration mis
à part, le bénéfice net recule de
24 % », précise le groupe. Et si le
chiffre d’affaires a stagné
(+0,2 % sur le trimestre) à
545 millions d’euros, la rentabi-
lité, mesurée par la marge
d’exploitation normalisée, a
reculé d e 3,7 p oints, à 18,1 %. Des
chiffres inférieurs aux attentes
des analystes interrogés par
FactSet, qui tablaient sur un
bénéfice net de 82 millions
d’euros pour 560 millions
d’euros de ventes.

BIENS DE
CONSOMMATION

Les investisseurs
sanctionnent le
recul de la rentabi-
lité au deuxième
trimestre.

Le groupe prévoit
qu’elle sera en
baisse sur la totalité
de l’exercice 2019.

Bic : la rentabilité


s’effrite, le titre


plonge en Bourse


chiffre d’affaires de près de 20 mil-
liards d’euros, avec une moitié de sa
distribution aux Etats-Unis et
l’autre en Europe. « Il est trop tôt
pour parler de synergies. Déjà clients
de GrandVision, nous sommes
confiants, car Luxottica a une exper-
tise dans le rachat et l’intégration de
chaînes de d istribution », a fait valoir
Pierluigi Longo, responsable des
acquisitions. Le but n’est pas de
« réduire les effectifs, a aussi souli-
gné le groupe, mais au contraire de
promouvoir la qualité et les compé-
tences au sein de GrandVision ».
Reste que le calendrier de cette
opération a surpris alors que l’inté-
gration entre Essilor et Luxottica
avance à petits pas sur le terrain et
que l’accord trouvé après la crise de
gouvernance semble fragile. En mai,
les deux nouveaux directeurs géné-
raux français et italien se sont enga-
gés à accélérer l e processus.
Aujourd’hui, 22 axes de travail prio-
ritaires ont été mis en œuvre, notam-
ment pour optimiser la chaîne logis-
tique. Mais le choix du futur patron
pour le groupe n’est pas réglé.

Bonne santé financière
Cette annonce intervient alors
qu’EssilorLuxottica s e porte bien. A u
premier semestre, il a vu son résultat
net ajusté progresser de 1,9 % à taux
constant, à 1,1 milliard d’euros, pour
un chiffre d’affaires de 8,8 milliards,
en progression de 3,9 %. La licence
avec le joaillier Bulgari (LVMH) a été
renouvelée pour la production de
lunettes de soleil et de montures.
Les objectifs financiers ont été
confirmés pour 2019, avec une
croissance prévue des ventes com-
prise entre 3,5 % et 5 %. Mais aussi
une progression du résultat opéra-
tionnel ajusté de 0,8 à 1,2 fois celle
du chiffre d’affaires.n

EssilorLuxottica renforce


sa distribution en Europe


6h-9h


Trois heures d’infoavec


PierredeVilno surEurope 1


Du lundi auvendredi


à suivre


Nucléaire : Orano repasse dans le vert
au premier semestre

ÉNERGIE Le groupe nucléaire français Orano est repassé dans
le vert au premier semestre et se montre un peu plus optimiste
pour son activité en 2019 en envisageant un retour à la crois-
sance dès cette année, a-t-il annoncé mercredi. L’industriel issu
de la restructuration d’Areva a enregistré un bénéfice net de
259 millions d’euros, contre une perte de 205 millions au pre-
mier semestre de 2018. « Cette évolution s’explique principale-
ment par le rendement des actifs dédiés de couverture des obliga-
tions de fin de cycle reflétant la performance des marchés
financiers », explique Orano, qui est contrôlé par l’Etat. Le
groupe est spécialisé dans le cycle du combustible nucléaire:
mines, enrichissement de l’uranium, recyclage des combusti-
bles usés mais aussi logistique, démantèlement et ingénierie.

Bond du résultat net de LafargeHolcim
MATÉRIAUX DE CONSTRUCTION LafargeHolcim a plus que
doublé son résultat net semestriel, qui atteint 1,1 milliard de
francs suisses (1 milliard d’euros) au total, et 780 millions de
francs en part du groupe contre 371 millions au premier semes-
tre 2018. Les charges de restructuration du cimentier suisse ont
été ramenées de 300 à 71 millions de francs, et ses coûts ont
baissé de 548 millions. Le chiffres d’affaires d e LafargeHolcim a
reculé de 1,6 % sur un an, mais progressé de 3,5 % en base com-
parable, à 13,1 milliard de francs. Le groupe a réduit sa dette
nette de 30 % grâce à la cession de ses actifs en Asie du Sud-Est
et au paiement en actions de 73 % de son d ividende en mai 2019.

Thomas Samson/AFP

« Avec
GrandVision,
nous serons
à même de
développer
notre réseau
commercial
de détail, qui
s’étendra enfin
à l’ensemble
des régions
du monde. »
LEONARDO DEL VECCHIO
PDG d’EssilorLuxottica
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