Les Echos - 01.08.2019

(nextflipdebug5) #1
tant bien aux vents contraires, et les
métiers spécialisés (assurance, cré-
dit conso, leasing...) marquant tou-
jours un fort développement.

Les métiers de taux
détonnent
Mais les résultats tiennent aussi à
une excellente surprise : la bonne
tenue de la banque de financement
et d’investissement (BFI ou CIB en
anglais), pourtant sous très forte
pression en début d’année. Ses
résultats 2018 avaient alors marqué
un repli de 21 % donnant le coup
d’envoi à une revue des actifs que la
BFI pourrait abandonner, ainsi qu’à
350 millions d’euros d’économies
supplémentaires à horizon 2020.
Rien de tel au deuxième trimes-
tre 2019 : les revenus progressent
sur un an de 4 % (à 3,1 milliards
d’euros) et le résultat avant impôts
de 6,2 %. Au sein de CIB, les métiers
de taux, change et émissions pri-
maires (FICC) détonnent avec des
revenus en hausse de 11,7 %. Dans la
journée de mercredi, deux autres
banques européennes, en l’occur-
rence Credit Suisse et Intesa, ont
également surpris par la bonne
tenue de certains de leurs métiers
de marché.
Plus généralement, la banque a
dû batailler ferme pour défendre
son produit net bancaire (PNB), qui
n’augmente que de 0,2 %, à
11,22 milliards d’euros. Il est certes
pénalisé par un effet de périmètre
défavorable, mais les taux faibles
pèsent : pour un même volume de
crédit, une banque dégage désor-
mais des revenus bien plus faibles.
Ainsi, la division « domestic mar-
kets » (activités de banque de détail
en France, en Belgique et en Italie),
ne parvient que d’une courte tête à
compenser la chute de ses revenus
par des efforts d’économies.
Autre effet négatif des taux fai-
bles : la banque de la rue d’A ntin a
dû déprécier de 500 millions
d’euros dans ses livres sa filiale
américaine B ancWest. « On a rééva-
lué les perspectives de résultats
futurs en étant conservateurs pour
ne pas avoir à y revenir plus tard »,

Edouard Lederer
@EdouardLederer


BNP Paribas tire son épingle du jeu
au deuxième trimestre. Alors que
les taux faibles jouent les prolonga-
tions en Europe et vont bientôt
signer leur « come-back » outre-At-
lantique, la deuxième capitalisa-
tion bancaire de la zone euro a
annoncé mercredi un bénéfice net
en hausse de 3,1 %, à 2,47 milliards
d’euros, pour le deuxième trimes-
tre. Les grands moteurs de la ban-
que sont bien au rendez-vous, les
activités de banque de détail résis-


BANQUE


La deuxième capitali-
sation bancaire de la
zone euro enregistre
un bénéfice net en
hausse de 3,1 %, à
2,47 milliards d’euros.


Mais le contexte
de taux faible reste
mordant, et la banque
décidée à réduire
ses coûts.


BNP Paribas


parvient à déjouer


les pronostics au


deuxième trimestre


Le bénéfice


de Lloyds


plombé


par le


scandale


des PPI


La banque britannique
Lloyds n’a pas encore
tourné la page des « PPI »,
ces assurances-crédit ven-
dues massivement dans les
années 2000 dans des con-
ditions litigieuses.
Sur son premier semes-
tre 2019, Lloyds a dégagé un
bénéfice net de 2,193 mil-
liards de livres (–4 %). Un
chiffre amputé de 650 mil-
lions de livres de provisions
liées aux dommages et
amendes dont elle a dû
s’acquitter. L’annonce,
supérieure aux attentes du
marché, a fait chuter le
cours de la banque de 5,3 %
à Londres.

Une arnaque
organisée
Depuis les années 2000,
Lloyds, la plus grande ban-
que de détail du Royaume-
Uni, a vendu 16 millions de
produits d’assurances-cré-
dit. Ceux-ci étaient destinés
à soutenir l’emprunteur en
cas d’insolvabilité ou de dif-
ficulté à faire face à ses
échéances. Or il s’est avéré
qu’une grande part de ces
assurances ont été vendues
sans que le client en soit
informé ou dans des condi-
tions cachées. De plus,
nombreuses sont les assu-
rances qui n’ont pas fonc-
tionné correctement lors-
que le souscripteur en a eu
besoin. Les clients, floués,
ont réclamé réparation. Ils
ont jusqu’en août de cette
année pour faire valoir
leurs droits.
L’échéance a rrivant à son
terme, Lloyds fait ainsi face
à une recrudescence des
demandes d’indemnisa-
tion : 190.000 requêtes par
semaine, dont seulement
10 % donnent lieu à rem-
boursement, selon George
Culmer, le directeur finan-
cier de la banque anglaise.
Elles n’étaient que 70.
par semaine en début
d’année.

35,7 milliards
déjà remboursés
Dans ce scandale vieux de
20 a ns, q ui touche p lusieurs
banques britanniques,
Lloyds est c elle qui a dû pro-
visionner le plus. Ce ne sont
pas moins de 20 milliards
de livres q ui ont d éjà é té ver-
sés par l’institution sur un
total de 35,7 milliards de
livres. George Culmer
espère clôturer l’affaire en


  1. Malgré cette mau-
    vaise surprise, la banque
    maintient son activité et se
    veut confiante dans la soli-
    dité de l’économie britanni-
    que, en dépit des fortes
    incertitudes liées à un
    Brexit sans accord.
    —F. B.


BANQUE


La banque britan-
nique a vu
son bénéfice net
baisser de 4 %
au premier
semestre, du fait
de nouvelles
provisions liées
à la vente d’assu-
rances-crédit (PPI)
frauduleuses.

Le seul élargissement du plafon-
nement des frais d’incidents à tous
les clients considérés comme fragi-
les financièrement par la Banque de
France a pénalisé ses revenus
de 39 millions d’euros. En tenant
compte du gel global des tarifs aux
particuliers en 2019, ces mesures
ont réduit ses revenus de 45 mil-
lions d’euros. De quoi faire reculer
les revenus de commissions de sa
division banque de détail, de 2,1 %.
Le coup de frein est plus prononcé
que chez ses concurrents : a u Crédit
Mutuel Alliance Fédérale, l es mesu-
res « gilets jaunes » ont limité la
croissance des commissions à
0,8 % et chez BNP Paribas elles ont
entraîné un recul des commissions
perçues de 1,4 %.
« Nous sommes la banque de
1,6 million de clients fragiles, soit
45 % des clients dont les frais d’inci-
dents sont plafonnés. Si l’on ajoute
les 1,5 million de clients qui accèdent

à une prébancarisation chez nous
grâce au Livret A et leurs familles
nous servons près de 10 millions de
clients exclus du système bancaire ou
fragiles. C’est notre responsabilité »,
explique le président du directoire
de La Banque Postale, R émy Weber.
Pénalisé également par le faible
niveau des taux d’intérêt qui pèse
sur ses marges de crédit, La Banque
Postale a publié un produit net ban-
caire en recul de 2,6 %, à 2,85 mil-
liards d’euros. Grâce à la hausse de
la contribution de CNP Assurances
et à une imposition sur les bénéfices
légèrement inférieure à celle de l’an
passé, son résultat net est toutefois
stable à 422 millions d’euros.
Pour retrouver le chemin de la
croissance, Rémy Weber ne s’inter-
dit pas de procéder en 2020 aux
hausses de tarifs qui n’ont pas
pu être mises en œuvre cette année,
ce qu’a également suggéré BNP
Paribas mercredi en marge de ses

résultats : « à partir du moment où
les clients fragiles voient leurs tarifs
plafonnés, il n’y a pas de raison de ne
pas rapprocher progressivement nos
prix, pour le reste de la clientèle, de
ceux des autres banques », poursuit
Rémy Weber.
Mais dans les prochains mois,
ses efforts porteront surtout sur
l’accélération de la diversification
de La Banque Postale. « Dans l’affac-
turage, le crédit-bail, le crédit à la
consommation, les prêts aux entre-
prises et l’assurance nous avons
d’importants relais de croissance »,

poursuit le dirigeant qui se félicite
de la dynamique commerciale ce
semestre sur ces différents métiers.
En assurance, ses revenus progres-
sent même de plus de 24 %, à
180 millions d’euros.
Ce n’est qu’un début pour La
Banque Postale, qui devra intégrer
CNP dans les tout prochains mois.
« Nous aurons bientôt les mêmes
armes que les autres acteurs dans un
moment qui pourrait être bien plus
compliqué si les taux continuent de
baisser », souligne Rémy Weber.

4
À NOTER
L’ Etat, la Caisse des Dépôts,
La Poste et La Banque Postale
ont signé mercredi un proto-
cole d’accord engageant pour
marier CNP à La Banque
Postale dans un « grand pôle
financier public ».

Sharon Wajsbrot
@Sharonwaj


C’est bien le signe que La Banque
Postale reste comme elle le reven-
dique « la banque de tous ». Au
premier semestre, la filiale de La
Poste a vu ses comptes plombés
parles engagements de modéra-
tion tarifaire des banques françai-
ses pris à la suite de la crise des
« gilets jaunes ».


BANQUE


Elargi à l’ensemble
des clients fragiles
début 2019, le plafon-
nement des frais
d’incidents bancaires
a pénalisé les revenus
de La Banque Postale
de 39 millions d’euros.


Les mesures « gilets jaunes » plombent


les comptes de La Banque Postale


2,


MILLIARDS D’EUROS
Le produit net bancaire
de La Banque Postale
au premier semestre 2019
(– 2,6 % sur un an)

Il a dit


« L’Europe peut


se passer


des taux bas,


mais pas


des banques. »


JEAN-LAURENT BONNAFÉ
Administrateur directeur
général de BNP Paribas


Photo AFP


résume Philippe Bordenave, direc-
teur général délégué de BNP Pari-
bas. Le groupe prend ainsi acte des
difficultés qu’il r isque de rencontrer
outre-Atlantique en raison de la
baisse des taux que prépare la Fed.
Sur le plan arithmétique, le groupe
est p arvenu à compenser ces
500 millions par une plus-value de
612 millions d’euros, tirée de la
vente de 2,5 % de l’assureur vie
indien SBI Life, dont il se désengage
progressivement.

Sur le fond, les banques euro-
péennes ne cachent pas leur mau-
vaise humeur face à la persistance
de ce climat glacial sur les taux.
« L’Europe peut se passer des taux
bas, mais pas des banques », pointe
Jean-Laurent Bonnafé en marge de
la présentation des résultats, appe-
lant à une vision plus industrielle et
technologique pour l’économie
européenne.
Pour compenser cet environne-
ment durable de taux bas, BNP Pari-
bas poursuit sa chasse aux coûts sur
l’ensemble des r éseaux d e banque de
détail. De nouvelles fermetures
d’agences sont ainsi à prévoir en Bel-
gique, avec 229 fermetures d’agen-
ces BNP Paribas Fortis d’ici à 2021. E n
Italie, un plan de départs anticipés
portera une réduction nette d’effec-
tifs de 1.500 équivalents temps plein
à horizon 2021. Autre exemple, dans
le CIB, la banque a externalisé sa
recherche-action en Asie auprès de
Morningstar. D’autres projets du
même genre seront annoncés d’ici à
la fin de l’année.

(


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Page 26

Le groupe prend
acte des difficultés
qu’il risque
de rencontrer
outre-Atlantique
en raison de la baisse
des taux que prépare
la Fed.

FINANCE & MARCHES


Jeudi 1er août 2019Les Echos

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