Les Echos - 01.08.2019

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Les Echos Jeudi 1er août 2019 FRANCE// 03


À7h40,retrouvez ÉtienneLefebvre


pour“L’ éditoéco”dansle


6h-9hdePierre de Vilno.


FINANCES
PUBLIQUES


Ingrid Feuerstein
@In_Feuerstein


Les professionnels de l’automobile
auront eu à peine deux semaines
pour s’ajuster. Annoncé mi-juillet,
le tour de vis sur la prime à la
conversion entre en vigueur ce
jeudi. Cette aide, a ccordée aux auto-
mobilistes qui mettent au rebut
leur vieux véhicule en échange d’un
modèle moins polluant, voit ses
conditions resserrées pour éviter
un dérapage budgétaire. Non seule-
ment les montants sont réduits,
mais le diesel est presque exclu de
cette aide, qui est recentrée sur les
véhicules électriques.
Jusqu’ici, l a prime allait de 1.000 à
5.000 euros selon que le ménage
était imposable ou non et en fonc-
tion de la catégorie de voiture ache-
tée (vignette « Crit’air 1 » ou électri-
que). Désormais, elle est recentrée
sur les ménages dont le revenu fis-
cal de référence est inférieur à
13.489 euros par part, soit environ
50 % des Français les moins aisés.
Ces derniers pourront toucher
1.500 euros s’ils acquièrent un véhi-
cule essence peu polluant
(« Crit’Air 1 »). Le principe du dou-
blement de la prime pour les gros
rouleurs, adopté en pleine crise des
« gilets jaunes », est maintenu.


Explosion des demandes
La principale nouveauté vient
du fait que la prime ne peut plus
être touchée lors de l’acquisition
d’un diesel, même récent. Seuls les
diesels immatriculés à partir de
septembre 2019 seront éligibles.
Quant aux 50 % de Français les
plus aisés, ils ne pourront toucher
cette aide que lors de l’acquisition
d’une voiture ou d’un deux-roues
électriques.
Le gouvernement revient donc à
une prime de conversion proche de
celle mise en place par Ségolène
Royal, mais qui n’avait pas rencon-
tré son public. Sur l’année 2017,
moins de 8.000 automobilistes
avaient bénéficié de cette aide pour
un coût budgétaire de 31 millions
d’euros. Le dispositif a réellement
décollé en 2018 avec la possibilité
d’acquérir un véhicule d’o ccasion
récent, ce qui le rendait beaucoup
plus attractif. On compte ainsi plus
de 208.000 bénéficiaires en 2018,
soit un coût de 377 millions
d’euros. Face à la mobilisation


contre la taxe carbone sur les
ronds-points, le gouvernement a
renforcé cette aide pour les ména-
ges modestes, ce qui a conduit à
l’explosion de son coût.
A fin juin 2019, les pouvoirs
publics avaient reçu presque autant
de dossiers sur six mois que sur la
seule année 2018, avec le risque de
voir la facture bondir à plus de
900 millions d’euros sur l’année.
D’où la réaction de l’exécutif, qui
a rapidement voulu couper le
robinet.

Pérennité de la prime
Ce tour de vis brutal pose la ques-
tion de la pérennité de la prime à la
conversion. Cette aide avait été pré-
sentée comme la contrepartie de
l’augmentation des taxes sur les

« Ces dispositifs
souffrent
d’une instabilité
chronique nuisible
à leur efficacité,
alors que leurs
objectifs sont
inchangés. »
COUR DES COMPTES
Evaluation sur le budget 2018

L’ inflation ralentit un peu en juillet


CONJONCTURE La hausse des prix à la consommation a légère-
ment r alenti en juillet à 1,1 % sur un an, après 1 ,2 % en j uin, freinée
notamment par la baisse des prix de l’é nergie, selon une estima-
tion provisoire publiée mercredi par l’Insee. Cette « légère
baisse » de l’inflation est due à « une d écélération des p rix de l ’éner-
gie, des services et du tabac », a souligné l’institut statistique. En
revanche, les prix alimentaires sont « plus dynamiques qu’en
juin ». En glissement mensuel, les prix à la consommation se
replient de 0,2 % en juillet, contre une hausse de 0,2 % en juin.
L’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), qui sert
pour les comparaisons avec les autres pays de l’Union euro-
péenne, ralentit l égèrement à 1,3 %, contre 1 ,4 % en juin sur u n an.
Sur un mois, il se replie de 0,2 %, après 0,3 % le mois précédent.

en bref


par ses erreurs de communica-
tion et de fond, il est devenu la
cible privilégiée des oppositions.
Le Premier ministre a assuré
que Christophe Castaner n’était
« pas affaibli » et avait sa « con-
fiance ». Il n’empêche. Cette
montée en première ligne
d’Edouard Philippe marque à la
fois la trop grande faiblesse du
ministre de l’Intérieur pour por-
ter seul ce dossier et la sensibilité
de l’affaire pour l’exécutif. L’Ely-
sée a fait savoir qu’Emmanuel
Macron la suivait de près.

Surenchère
Les oppositions, particulière-
ment à gauche, se sont empa-
rées de cette affaire pour atta-
quer le gouvernement et sa
gestion du maintien de l’ordre.
Facteur aggravant, ce dossier
intervient dans un contexte
particulier, sur fond d’accusa-
tions régulières de violences
policières. Un terme que récuse
systématiquement l’exécutif,
sans toujours convaincre.

« Je suis pour que force reste à
la loi, mais la sécurité n’est ni la
surenchère ni la répression aveu-
gle. Il faut se poser la question de
la doctrine de maintien de l’ordre
dans le pays », a pointé le Pre-
mier secrétaire du PS, Olivier
Faure, sur BFMTV-RMC. Il
demande, comme La France
insoumise, une commission
parlementaire.
Interrogé pour savoir si les
forces de l’ordre devaient chan-
ger de méthode, Christophe Cas-
taner s’est borné à rappeler qu’il
avait ouvert ce débat et qu’un
nouveau schéma national du
maintien de l’ordre doit être pré-
senté à l’automne. Bref, profil
bas en espérant que les promes-
ses de transparence finiront par
calmer les polémiques et que les
suites de l’affaire – une informa-
tion judiciaire a été ouverte – ne
rallument pas un terrain qui
semble encore très éruptif.n

Isabelle Ficek
@IsabelleFicek

En première ligne. Coup sur
coup. Mardi, après l’authentifi-
cation du corps de Steve Maia
Caniço, disparu la nuit de la
Fête de la musique à Nantes,
c’est Edouard Philippe qui est
monté au front pour évoquer ce
« drame qui nous touche tous »
et promettre « la plus grande
transparence ». C’est lui qui a
rendu publiques les conclu-
sions du rapport de l’IGPN,
selon lesquelles il n’y a « pas de
lien » entre l’intervention des
forces de l ’ordre et la disparition
du jeune h omme. Lui, a ussi, q ui
face aux zones d’ombre, a saisi
l’Inspection générale de l’admi-
nistration. Le tout, aux côtés de
Christophe Castaner, silen-
cieux, comme en retrait.
Mercredi, c’est encore
Edouard Philippe qui, en dépla-
cement dans l’Essonne avec son
ministre de l’Intérieur pour par-
ler de la « sécurité du quotidien »
et notamment des cambriola-
ges, a fait face aux q uestions non
sur les vols mais sur les polémi-
ques que sa prise de parole de la
veille n’a pas éteintes. Ce dépla-
cement, initialement prévu la
veille, avait d’ailleurs été
repoussé en raison de l’affaire.
« Nous sommes mobilisés, à la
tâche, pour n’accuser personne et
ne dédouaner personne. Ce que
nous souhaitons, c’est que la
transparence soit faite, que les
faits soient établis et que les res-
ponsabilités soient tirées », a
insisté le chef du gouvernement,
qui a aussi défendu son minis-
tre. Certes, l e locataire de la Place
Beauvau a dû faire face à un con-
texte très compliqué pour
l’ordre public avec la crise des
« gilets jaunes ». Mais fragilisé

POLITIQUE


Le chef du gouver-
nement s’est tour
à tour exposé sur la
sécurité et l’affaire
Steve Maia Caniço.

Il a assuré de sa
« confiance »
le ministre de
l’Intérieur, plus
que jamais cible
des oppositions.

Sécurité : Philippe


en première ligne,


Castaner affaibli


La montée au
créneau d’Edouard
Philippe marque
la faiblesse
du ministre
de l’Intérieur
pour porter seul
le dossier Caniço.

carburants, dans l’idée de soutenir
la conversion du parc automobile
à des énergies plus propres. La
trajectoire de taxe carbone pour
la période 2019 à 2022 a été
gelée, montrant la limite de cette
politique.
Dans son évaluation sur le bud-
get 2018, la Cour des comptes criti-
quait les ajustements fréquents
depuis la création du bonus-malus
automobile en 2008. « Ces disposi-
tifs s ouffrent d’une instabilité chroni-
que nuisible à leur efficacité, alors
que leurs objectifs sont inchangés »,
indiquait-elle. La Fondation Nico-
las Hulot considère que « cette
réponse sociale-écologique n’est pas
tenable financièrement », selon
sa responsable mobilités, Marie
Chéron.n

lLes nouvelles règles de la prime à la conversion entrent en vigueur ce jeudi.


lLes montants et le champ des bénéficiaires sont réduits.


lLe diesel d’occasion est exclu de l’aide, recentrée sur les véhicules électriques.


Prime à la conversion : barème


revu pour réduire la facture


C’est devenu un « marronnier » des
discussions budgétaires. Chaque
année, en loi de finances, le malus
automobile est ajusté pour tenir
compte d es b esoins d e financement
des bonus accordés aux voitures
propres. Cette année, les discus-
sions auront une teneur toute parti-
culière. Il s’agit d’ajuster les pénali-
tés frappant les véhicules polluants
au nouveau protocole de mesure
des consommations et émissions


polluantes, le WLTP (Worldwide
harmonized Light vehicles Test
Procedures). Issu d’une nouvelle
réglementation européenne, ce
protocole d’homologation repro-
duira de manière plus réaliste
l’usage d’un véhicule, comparé à la
norme actuelle. Ceci conduira à un
affichage jusqu’à 25 % plus élevé
pour les émissions de CO 2.

Manque d’efficacité
Si le gouvernement maintient le
barème du malus en l’état, la quasi-
totalité des ventes de voitures neu-
ves se verra pénalisée par un malus.
Si, en revanche, le barème est relevé
à proportion de la révision des
émissions d e CO 2 , il perdra en partie
son caractère dissuasif. Cette ques-
tion délicate n’a pas encore été arbi-
trée. « La question d u malus et de son
avenir fera l’objet d’une discussion
que nous aurons cet automne avec la

filière », indique-t-on au ministère
de l’Ecologie.
D’ores et déjà, l’actuel malus est
critiqué pour son manque d’effica-
cité sur les comportements des
acheteurs. Dans son dernier rap-
port sur l’application des mesures
fiscales, le rapporteur du budget,
le député (LREM) Joël Giraud, rele-
vait que la part des véhicules affec-
tés d’un malus avait frôlé l es 30 % e n


  1. Soit 12 points de plus qu’e n

  2. « L’attrait des consommateurs
    pour les véhicules les plus polluants
    n’est pas jugulé par le mécanisme du
    malus automobile », conclut-il.
    C’est une bonne nouvelle budgé-
    taire puisque les recettes du malus
    ont largement dépassé les attentes
    en 2018 (559 millions d’e uros, soit
    une hausse de 44 %). L’année 2019
    devrait être tout aussi favorable,
    avec des recettes attendues autour
    de 550 millions d’euros, selon des
    prévisions actualisées au regard
    des ventes réalisées depuis le 1er jan-
    vier. Sur le plan environnemental,
    c’est une moins bonne nouvelle,
    puisque les achats de SUV et le
    regain d’intérêt pour les motorisa-
    tions essence ont conduit à une
    remontée des émissions moyennes
    du parc de voitures neuves. De quoi
    inciter la majorité à durcir le
    barème. —In. F.


Vers une révision majeure du malus


automobile en 2020


Le malus automobile
devrait à nouveau remplir
les caisses de l’Etat cette
année, avec des recettes
attendues autour de
550 millions d’euros. Les
nouvelles normes d’homo-
logation des véhicules
à compter de 2020 vont
conduire à une révision
majeure du barème.


30 %


LA PART DES VÉHICULES
AFFECTÉS D’UN MALUS
EN 2018
C’est 12 points de plus
qu’en 2017, selon le rapporteur
du Budget, le député (LREM)
Joël Giraud.
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