GEO Histoire - 04.2019 - 05.2019

(Tina Meador) #1
LES ROMAINS CROIENT-ILS EN UN AU-DELÀ?
Les défunts sont considérés comme faisant par-
tie de la divinité collective des dieux Mânes, ces
dieux bons dont on ne dit jamais de mal, car ils
peuvent être dangereux. Les rituels ont pour but
d’établir une stricte séparation entre la commu-
nauté des vivants et celle des morts. Au neuvième
jour, lorsque les cérémonies de l’enterrement
s’achèvent avec la fermeture définitive de la tombe,
une victime de sacrifice – en règle générale, un
porc – entièrement brûlée y est déposée. Aucun
mortel n’a le droit d’en manger : il deviendrait un
mort vivant et s’exclurait totalement de la société.
Chaque année, en février, les familles font un
sacrifice aux dieux Mânes pour leurs défunts et
réitèrent ce rituel de séparation. En mai, une fête
est même consacrée aux morts qui n’ont pas été
ensevelis selon les rites adéquats, afin d’éviter
qu’ils ne reviennent hanter les vivants. Les cités
des vivants et des morts sont strictement sépa-
rées et ces derniers ne doivent pas dominer la
Terre. Toutefois, ils continuent de représenter aussi
le passé et la puissance des familles. L’Etat les

considère comme des citoyens défunts et sur-
veille les nécropoles pour les protéger des nom-
breux pilleurs de tombes qui sévissent.

CÉLÉBRAIT-ON LE MÊME CULTE À ROME ET DANS LES PROVINCES?
Rome a laissé leur autonomie aux cités intégrées
dans la République et n’a pas souhaité convertir les
peuples à la religion d’Etat. A l’exception de la fête
du 13 septembre qui devait être célébrée partout,
les grandes cérémonies, comme les vœux publics
de la nouvelle année, n’avaient lieu qu’à Rome. Il est
toutefois probable que les cités organisaient leurs
propres vœux : leurs habitants étaient simplement
tenus de participer aux cultes locaux, y compris
ceux célébrant des dieux étrangers. Il s’agissait d’une
activité civique, au même titre que le vote. Cela fai-
sait partie de la citoyenneté. C’est ainsi que lorsqu’en
80 av. J.-C., lorsque les Italiques se sont vus attribuer
un droit de citoyenneté romain plein et entier, ils
ont cumulé deux appartenances religieuses, celle
de leur cité et celle de Rome, où ils pouvaient, s’ils
s’y rendaient, participer au culte public. C
PROPOS RECUEILLIS PAR ANNE DAUBRÉE

John Scheid,
professeur au
collège de France,
est spécialiste
de la religion
romaine et
auteur de nom-
breux ouvrages,
dont Pouvoir et
religion à Rome
(éd. Pluriel, 2011).

Représentée traditionnellement avec un arc et des flèches, la déesse de la chasse fait face à celle des fleurs.
A Rome, au printemps, des fêtes nommées «floralies» sont organisées en l’honneur de cette dernière.

DIANE FLORE


John Scheid

P. Imbert

GEO HISTOIRE 91

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