Fou De Cuisine N°16 – Été 2019

(Dana P.) #1
Une pêche réglementée donc durable

On l’ignore trop souvent mais, quelle que soit l’espèce recher-
chée, la pêche à pied répond à une réglementation précise et
exigeante qui contraint les pros comme les amateurs : l’objectif
principal est la préservation de la ressource pour favoriser une
pêche durable et la pérennité de l’activité. Défi nition de zones
de pêche – et contrôle sanitaire, bien sûr –, ouverture et ferme-
ture en alternance des diff érents gisements, interdiction de
pêche durant une certaine période de l’année, taille minimale
des coquillages en deçà de laquelle il n’est pas autorisé de les
pêcher, mise en place de quotas – logiquement plus élevés pour
les professionnels –, les mesures sont multiples. Les fameux
quotas ne sont pas décidés au petit bonheur la chance, mais
par une commission spécialisée, composée notamment de
pêcheurs, en fonction du potentiel de chaque gise-
ment, Géfosse, Utah Beach ou encore Brévands, à une
période donnée. Pour les pêcheurs, régulièrement
contrôlés sur le terrain par les gardes-jurés – employés
par le Comité régional des pêches – et les Aff aires
maritimes, il ne s’agit pas de jouer avec le feu et de
les dépasser, au risque de se voir infl iger des amendes
sévères, voire une mise à pied plus ou moins longue
qui les prive de leur gagne-pain. « Là, sur Géfosse,
notre quota est fi xé à 64 kilos de coques par personne et par
marée, et chaque coque doit mesurer au minimum 27 mm de
diamètre », précise Grégo en nous montrant une coque encore
trop petite pour être ramassée. Une fois son seau rempli, il
le vide dans un sac puis se remet à gratter jusqu’à atteindre
le quota. « En fonction de l’état du gisement, on peut le faire
en une demi-heure ou en beaucoup plus longtemps... Et trois
heures à gratter, ça tire. » Les sacs pleins sont juchés sur les
vélos que chaque pêcheur pousse jusqu’au tracteur. Ils sont
ensuite hissés sur la remorque, où ils sont pesés sur une petite
balance pour bien vérifi er que leur poids reste dans la limite
permise. Tout le monde remonte sur la remorque du tracteur,
lestée par quelques centaines de kilos de coquillages, pour
retourner au camp de base. Le labeur du jour est terminé, les
langues se délient à nouveau pour un débriefi ng improvisé et
évoquer le rendez-vous du lendemain, toujours fi xé par rap-
port à l’heure de la marée basse et à son coeffi cient. L’un des
comparses de Grégo fi le aux urgences : la piqûre d’une vive fait
gonfl er sa main. La baie des Veys continue de se vider de son
eau, change de physionomie au fi l de la marée descendante,
laissant émerger des bancs de sable de plus en plus étendus.
L’estran retrouve son calme aussi, provisoirement abandonné
par ses pêcheurs qui le connaissent le mieux.

Coques mais aussi palourdes
et salicorne dans la besace de Grégo

Grégo est content : ses coques se révèlent d’un calibre généreux.
Comme d’habitude, il va les livrer à Jean-Paul Guernier, « Mon-
sieur Jean-Paul », par ailleurs ostréiculteur dans le Cotentin,
très réputé pour ses fameuses huîtres Utah Beach. Ce dernier
va les plonger dans un bassin de purifi cation rempli d’eau
stérile pendant 48 heures – étape nécessaire pour « nettoyer »
ces coquillages fouisseurs – avant de fournir quelques-uns de
ses clients très exigeants comme Terroirs d’Avenir, sourceur
de première qualité qui approvisionne une foule d’excellentes

SUR LA ROUTE AVEC

FOU DE CUISINE 44

SUR LA ROUTE

LA PÊCHE À PIED RÉPOND

À UNE RÉGLEMENTATION

PRÉCISE ET EXIGEANTE

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