Fou De Cuisine N°16 – Été 2019

(Dana P.) #1
froide, sans lumière, il a pété un câble. Je vais le rencontrer
samedi. Je passe mon temps à récupérer des gamins comme
ça. Et les filles, je préfère ne même pas en parler...
Les chefs qui râlent qu’on ne trouve pas de bon personnel,
ce sont parfois les pires. Et quand on est entre nous, il y en
a qui s’en vantent : « Ha ha! Quel con celui-là, je lui ai fait
faire le tour du parking à poil à quatre pattes en plein hiver. »
Beaucoup de chefs sont seulement dans la performance, le
nombrilisme. Il y en a qui disent à leurs commis : « On ne
regarde pas Dieu dans les yeux quand on lui parle », ou ce
genre de conneries.

N’avez-vous pas l’impression que c’est
en train de changer?
Je ne sais pas. C’est difficile d’en parler, et les parents ne
comprennent pas. Ils viennent me voir et ils me demandent :
« Monsieur Guérin qu’est-ce qu’il faut qu’on fasse? Est-ce
qu’on doit porter plainte? » Mais dans ce cas-là, on signe
l’arrêt de la carrière du gamin.
Je ne veux tellement plus de ça. Ici, on est une équipe, on avance
ensemble, on aspire à un épanouissement général. C’est aussi
peut-être pour ça que je suis à part dans cette profession, car
je ne vois rien de la même manière. Quand je parle de mes
projets, de mon management ou même de la façon dont je
cuisine, beaucoup de chefs me prennent pour un barjot.

Justement, comment cuisinez-vous
aujourd’hui?
Je me sens encore dedans. J’ai compris que la création en
cuisine, c’est comme en peinture, tu as tes outils, tes cou-
leurs, ce sont tes ingrédients. Et selon ta personnalité, ton
humeur, si tu es dark ou, au contraire, si tu es en lumière,
tu ne vas pas cuisiner la même chose.
C’est ironique car je suis au soir de ma carrière de cuisinier,
et j’ai parfois l’impression qu’on me voit encore comme le
« jeune chef créatif », c’est comme ça. En fait, ma seule peur
c’est de devenir un chef ringard (rires)!

La spring salade

« Je suis très content de pouvoir
présenter une assiette de Claire,
qui tient en mon nom le Café
du Musée à Nantes. C’est une cheffe
qui a un toucher d’une délicatesse rare,
je ne sais pas comment elle fait. »

a RETROUVEZ LA RECETTE P. 128

BIOPIC

65 été 2019

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