Le Monde De La Photo N°116 – Juin 2019

(Chris Devlin) #1

(^72) I LE MONDE DE LA PHOTO
DOSSIER
Deux conceptions peuvent être
envisagées concernant la pratique
de la photographie minimaliste. En
premier lieu, nous pouvons considérer
que notre envie est purement
graphique. L’idée dominante est
alors de chercher à mettre en
exergue des formes élémentaires,
la quintessence de ce que nous
observons afin d’accentuer le propos
et la portée d’une photographie. Il
y a une notion idéologique dans ce
principe, mais celle-ci n’intervient
qu’à la fin et ne concerne que l’image
que l’on souhaite obtenir. Il s’agit
probablement de la conception la
plus populaire chez les photographes
adeptes du style minimaliste.
Une deuxième interprétation peut
être de concevoir le minimalisme
comme un mode de pensée à
part entière ayant une influence
sur la totalité de la démarche
photographique. D’un point de vue
philosophique, être minimaliste
revient à revendiquer une certaine
simplicité et à vouloir se libérer des
IDÉOLOGIQUE, GRAPHIQUE OU LES DEUX
Le minimalisme est un style, mais il peut être bien plus
encore et influencer notre manière de concevoir la
photographie. Selon sa sensibilité, on pourra ainsi avoir
l’ambition d’adhérer pleinement à ce concept ou de se
soucier uniquement de la finalité esthétique.
LE MINIMALISME
DANS L’HISTOIRE
La quête de simplicité n’est pas
nouvelle et fait écho à certaines
périodes de l’histoire de l’art. Pour les
œuvres anciennes, la préoccupation
dominante était généralement
de tendre vers le plus d’efficacité
possible. Par exemple, les Égyptiens
recherchant la perfection architecturale
ont pensé la trouver dans une forme
pyramidale. Plus tard, certaines
civilisations précolombiennes ont
d’ailleurs adopté le même style. Les
monuments mégalithiques, comme
nous pouvons encore en observer
à Stonehenge en Angleterre, sur
l’île de Pacques ou à Gobekli Tepe en
Turquie, semblent répondre aux mêmes
principes de sobriété conceptuelle. En
peinture également, certaines œuvres
répondaient à une ambition analogue.
Pour les anciens Chinois, par exemple,
c’est le vide qui constituait l’élément le
plus important. Les traits, parfois rares,
n’étaient là que pour structurer l’espace.
excès de la société de consommation.
Selon cette idée, elle n’apporte pas le
bonheur, mais au contraire, encombre
notre esprit. Au quotidien, être fidèle
à cette idéologie implique ainsi de
s’affranchir de tout ce qui n’est pas
nécessaire à notre bien-être. Il faut
s’entourer de peu d’objets, ces derniers
devant tous être parfaitement utiles.
Calquer ce mode de vie à la pratique
de la photographie influence donc non
seulement l’esthétisme des clichés
produits, mais également tout le
processus de fabrication. Le matériel
utilisé pour réaliser les prises de vues
doit en conséquence répondre à cette
volonté d’essentialisme. Mais alors, à
quoi correspondrait un appareil photo dit
« minimaliste »? Si on met de côté l’aspect
financier, relatif aux possibilités de chacun,
le dispositif idéal devrait certainement être
à la fois peu encombrant et d’une grande
efficacité. La première solution qui vient
naturellement à l’esprit est le smartphone.
Si l’on suppose que tout le monde
(ou presque) en possède un à portée de
main, cet appareil peut facilement être
considéré comme répondant aux principes
du minimalisme. Il a cependant ses limites
concernant notamment les différents
L’iPhone X est l’un des
smartphones les plus
populaires. Outre le fait
qu’il soit accessible à tout
moment, ce qui fait son
succès est certainement
la qualité de son capteur
Photo : © Apple
Dans la catégorie
des smartphones, le
Huawei Mate 20 Pro
domine le classement
des appareils photo
selon le site Internet
dxomark.com.
Photo : © Huawei
Samsung Galaxy S7 edge – équivalent à 26 mm – 1/13 500s – f/1,7 – 50 Iso
Avoir toujours un smartphone dans la poche permet de réaliser des photos dans des situations atypiques. Sur une piste
de ski par exemple, nous n’avons pas forcément le loisir d’emporter un matériel plus encombrant. Photo : Denis Dubesset

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