Science Du Monde N°4 – Août-Octobre 2019

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actuaLité Brèves


Science magazine n°

BrèveS expoS ActuAlités 33


Pour transmettre le génome du père, les
spermatozoïdes doivent quitter l’orga-
nisme producteur et effectuer un voyage
périlleux. Une équipe de chercheurs vient
de décrire pour la première fois une étape
fondamentale permettant la préparation
de l’ADN paternel, mais aussi comment
un cancer très agressif peut naître de cette
façon.

Les spermatozoïdes sont les seules cellules
capables non seulement de survivre dans un
environnement hostile mais aussi de délivrer à
l’œuf les gènes du père dans un état d’intégrité
parfaite. Avant d’être transporté, cet ADN est
préparé par une réorganisation globale et une
compaction extrême, lors d’une succession
d’évènements sans précédent dans d’autres
types cellulaires. Paradoxalement, malgré son
importance primordiale pour la procréation
et la perpétuation des espèces, ce processus
reste l’un des phénomènes les plus obscurs en
biologie, bien que des travaux antérieurs aient
déjà permis de comprendre, dans ses grandes
lignes, les mécanismes moléculaires qui
dirigent cette compaction du génome mâle.

Un nouveau pas dans la compréhension de ce
phénomène a été franchi par les chercheurs

en identifiant le mécanisme déclencheur de la
compaction de l’ADN mâle et de la métamor-
phose organisationnelle qui lui est associée.
Il faut savoir qu'avant cette compaction, dans
les cellules germinales comme dans toutes
les cellules de l’organisme, le génome est
structuré par des protéines particulières, les
histones. Lors de la production des sperma-
tozoïdes, la compaction de l’ADN nécessite
l’enlèvement et le remplacement des histones
par d’autres protéines, spécifiques des cellules
germinales, nommées protamines. On savait
précédemment que cet échange histone-pro-
tamine était précédé par une modification
chimique (acétylation) massive et globale des
histones. Or, ni la cause ni la conséquence
de cette acétylation massive des histones
n’étaient connues.

En suivant la piste initiée par la découverte
d’une protéine spécifique de la lignée ger-
minale mâle, de fonction inconnue, les

chercheurs ont réussi à identifier le méca-
nisme de déclenchement de cette acétyla-
tion massive des histones et à comprendre
l’importance de cette acétylation dans l’en-
lèvement des histones. Ils montrent que ce
même mécanisme, naturellement mis en jeu
dans le contexte spécifique de la maturation
des cellules germinales mâles, peut aussi être
activé de manière aberrante suite à un rema-
niement génétique et expliquer l’apparition et
l’agressivité particulière de certains cancers.

La découverte de ce mécanisme permet non
seulement de mieux comprendre une étape
essentielle de la vie et de la procréation,
mais aussi met en lumière la capacité de
certains cancers d’activer des mécanismes
moléculaires normaux et naturels de manière
hors-contexte pour acquérir des propriétés
particulières. (Source : Institut pour l'Avan-
cée des Biosciences - Institut des sciences
biologiques)

un même mécanisme


pour la vie et la mort


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32 ActuAlités BrèveS


Les moules sont généralement incrustées
sur les rochers au bord des plages ou sur
les pieux plantés par les conchyliculteurs.
Mais elles peuvent également se fixer aux
métaux et cette faculté inspire les cher-
cheurs. Une demande de brevet vient d'être
déposée pour une "colle" bio-inspirée.

Tout part d’une observation : certains mol-
lusques sont de véritables passagers clandes-
tins et naviguent sur des milliers de kilomètres
en s’accrochant à la coque métallique des
navires. Pour se fixer ainsi, les moules pro-
duisent de la dopamine, une protéine com-
posée d’une amine et d’un catéchol, une
molécule cyclique coiffée de deux fonctions
alcool. C’est cette partie, le catéchol, qui
intéresse les chercheurs de l’Institut Charles
Sadron, à Strasbourg.

« Le catéchol peut interagir avec des ions
métalliques ainsi que se fixer aux métaux »,
explique la chercheuse Fouzia Boulmedais,
auteure de l’étude. « Dans le même temps,
quand la molécule de catéchol est oxydée,
elle devient de la quinone, qui réticule avec
des protéines. » Le catéchol peut donc servir
à coller les protéines aux métaux. En outre,
il possède l’avantage de ne pas dénaturer les
protéines et donc de garder intactes leurs
activités.

L’intérêt est que cette liaison n’est pas auto-
matique. Il faut une oxydation pour qu’un
catéchol se lie à une protéine. Une oxydation
apportée par une impulsion électrique et qui
ainsi permet de localiser la réticulation de la
protéine au niveau d’une seule électrode. La
fonctionnalisation d’un réseau d’électrodes
par différentes enzymes permettra de réaliser
plusieurs tests biologiques avec un seul pré-
lèvement. Un véritable biocapteur multiple!

Mais ce n’est pas la seule application envi-
sagée par Fouzia Boulmedais. La molécule
pourrait s’utiliser pour développer des biobat-
teries, des détecteurs sous-cutanés, ou encore
pour la détection d’ions aluminium, en liant le
catéchol à une enzyme qui perd son activité
au contact de ce métal. (Source : Institut de
Chimie)

une colle bio-inspirée des moules


lézard, le tégu argentin (Salvator merianae).
Les résultats confirment que les deux lézards
manifestent deux états de sommeil distincts,
partageant des similitudes avec le sommeil
lent et le sommeil paradoxal.

Cependant l’analyse de différents para-
mètres comportementaux, physiologiques
et cérébraux va encore plus loin en mettant
en exergue des différences non seulement
entre le sommeil des lézards et celui des

mammifères et oiseaux, mais également
entre les deux espèces de lézards. Alors que le
sommeil paradoxal des humains présente des
activités cérébrales et oculaires semblables à
celles de l’éveil dans un corps ensommeillé,
celui des lézards se distingue par une acti-
vité des yeux plus lente et, pour le tégu, une
activité cérébrale bien différente de l’éveil.

Ces différences révélées par l’étude offrent
une vision plus complexe de ce qu’est le
sommeil paradoxal au sein du règne animal,
ouvrant ainsi de nouvelles portes vers la com-
préhension de l’origine de notre propre som-
meil, de nos rêves... et de ceux des lézards.

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