Science Du Monde N°4 – Août-Octobre 2019

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actuaLité Brèves


Science magazine n°

BrèveS ActuAlités 27


les derniers Néandertaliens


plus récents qu'on ne le croit


De nombreuses innovations du Paléo-
lithique supérieur pourraient bien être
attribuées à Néandertal...

Les vestiges humains étant rares en Préhis-
toire, les chercheurs utilisent traditionnelle-
ment les productions culturelles comme les
outillages en pierre taillée pour reconstituer
l’histoire des peuplements préhistoriques. En
France et au Nord de l’Espagne, les dernières
populations néandertaliennes sont tradition-
nellement identifiées comme celles produi-
sant le « Châtelperronien », une culture qui
marque le début du Paléolithique supérieur
dans cette région, il y a environ 43 000 ans. De
manière concomitante, de nombreuses inno-
vations techniques, symboliques et artistiques
voient le jour à cette période, et d’intenses
débats animent la communauté scientifique
pour savoir qui de Néandertal ou de l’Homme
anatomiquement moderne est responsable de
ces nouvelles manifestations.

Dans ce contexte, la culture du Châtelperro-
nien est depuis près de 40 ans utilisée comme
un marqueur des derniers Néandertaliens dans
les modèles visant à comprendre sa dispari-
tion. Des recherches récentes, effectuées sur
le site de référence de la Roche-à-Pierrot à
Saint Césaire, montrent que la situation est
plus compliquée et que l’association entre

fossiles humains néandertaliens et vestiges
archéologiques du Châtelperronien n’y est
pas avérée. Le Châtelperronien n’est peut-
être donc pas la dernière manifestation des

populations néandertaliennes en Europe
occidentale. (Source : Institut Ecologie et
Environnement /INEE)

plus de 2 millions d’individus. Pour évaluer
les surfaces occupées par les manchots entre
1960 et aujourd’hui, ils ont mesuré sur les
images satellitaires les contours de la colo-
nie années après années, et se sont rendus
compte que celle-ci diminuait au profit d’une
re-végétalisation. Des clichés pris depuis un
hélicoptère lors de l’Antarctic Circumpolar
Expedition ont permis de confirmer la réduc-
tion spectaculaire de la colonie.

Les résultats indiquent que le déclin a débuté
à la fin des années 1990, coïncidant avec un
épisode climatique majeur dans l’océan Aus-
tral lié au phénomène El Niño. Cet évène-
ment climatique a affecté temporairement les

capacités de recherche de nourriture d’une
autre colonie située à 100 km de l’île aux
Cochons et a provoqué son déclin. Ainsi le
même processus pourrait être à l’oeuvre sur
l’île aux Cochons. De plus, la taille de cette
colonie la soumettrait également aux effets
dits de « densité-dépendance ». En effet, plus
une population est grande plus la compéti-
tion entre les individus est rude et ralentit
la croissance de tout le groupe. Les effets
du manque de nourriture sont ainsi démulti-
pliés et peuvent provoquer un déclin rapide et
massif sans précédent, notamment suite à un
évènement climatique comme celui de 1990.
La présence de maladies est aussi une hypo-
thèse envisagée, le choléra aviaire décimant

actuellement les populations d’oiseaux de mer
sur d’autres îles de l’océan Indien comme les
albatros sur l’île d’Amsterdam ou les man-
chots sur l’île de Marion.

Néanmoins, toutes ces hypothèses semblent
insuffisantes pour expliquer une réduction
d’une telle ampleur. Des études de terrain
portées par les chercheurs CNRS, avec l'ap-
pui de l'Institut polaire français Paul-Emile
Victor et en partenariat étroit avec l'équipe
de la réserve naturelle des Terres australes
françaises, devraient être menées prochaine-
ment pour confirmer les premiers éléments
qu’apportent les images satellites.

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26 ActuAlités BreveS


Eteindre l’addiction à la nicotine


grâce à la lumière?


la mystérieuse fin des manchots royaux


Et si l'on pouvait stopper l'envie de nicotine
en appuyant sur un bouton « off »?

Chaque année, dans le monde, plus de 7 mil-
lions de personnes meurent du tabagisme. La
nicotine, principal agent addictif du tabac,
agit sur le cerveau en se liant sur les récep-
teurs nicotiniques. A ce jour, les techniques
de pharmacologie classique ne permettent pas
d’agir de manière précise et réversible sur
ces récepteurs. C’est pourquoi des chercheurs
de l’Inserm, du CNRS et de Sorbonne Uni-
versité au sein du laboratoire Neuroscience
Paris-Seine, en collaboration avec l’Institut
Pasteur, l’Université de New York (NYU)
et l’Université de Californie Berkeley (UC
Berkeley), ont eu l’idée de fabriquer des outils
moléculaires capables d’interrompre le fonc-
tionnement de ces récepteurs dans le cerveau
avec la lumière.

Dans cette étude, les chercheurs ont modifié
le récepteur nicotinique, afin de pouvoir y
accrocher un nano-interrupteur chimique
réagissant à la lumière. Sous l’effet de la
lumière violette, l’interrupteur se replie en
empêchant la nicotine de se fixer : le récepteur
est « off ». Sous l’effet de la lumière verte, ou
dans l’obscurité, l’interrupteur est déplié et
va ainsi laisser la nicotine agir : le récepteur
est « on ». Puis les chercheurs se sont focali-
sés sur un récepteur nicotinique particulier,
le type b2, et sur une zone clé du circuit de
la récompense, délivrant la dopamine. Lors
d’une injection intraveineuse de nicotine,
les neurones à dopamine répondent par une
augmentation de leur activité électrique, la
libération de dopamine qui en découle est la
clé de la mise en place de l’addiction.
Dans ce travail, cet effet de la nicotine
s’est trouvé fortement réduit lorsque le

nano-interrupteur est enclenché par la lumière
violette, mais a pu être restauré rapidement
sous lumière verte.

Les chercheurs ont ensuite démontré qu’il
était possible d’inhiber l’attrait pour la nico-
tine en enclenchant cet interrupteur. Pour ce
faire, ils ont comparé le temps que passaient
des souris dans deux compartiments avec ou
sans nicotine. Sous lumière verte, lorsque la
nicotine peut exercer son effet, ils ont observé
que les animaux préféraient le compartiment
avec nicotine. Sous lumière violette par
contre, les souris passaient autant de temps
dans chaque compartiment, prouvant qu’elles
n’étaient alors plus attirées par la nicotine.

Cette étude démontre qu’il est possible de
manipuler l’attrait pour la nicotine, et ce de
manière rapide et réversible.

Tandis que l'on parle actuellement de la
grande crise d'extinction des espèces sau-
vages, des chercheurs français ont constaté
un déclin massif de près de 90% de la plus
grande colonie de manchots royaux au
monde située dans la réserve naturelle des
Terres australes françaises (TAAF). Si les
causes de leur disparition pourraient être
environnementales, le mystère reste entier.

Connue depuis les années 1960, la colonie de
manchots royaux Aptenodytes patagonicus de
l'île aux Cochons, dans le sud de l'océan In-
dien, était réputée pour être la deuxième plus
grande colonie de manchots toutes espèces
confondues (royaux et autres). Cependant, en
raison de son isolement et de son inaccessibi-
lité, il n'y avait pas eu d'estimations récentes
de cette colonie depuis des décennies.

Les chercheurs du Centre d’études biolo-
giques de Chizé (CNRS/Université de la

Rochelle)* ont utilisé des images satellites
haute résolution pour mesurer les change-
ments de taille de la colonie depuis la dernière

visite de l’île par une équipe scientifique, en


  1. À l’époque, la colonie comptait 500 000
    couples reproducteurs, soit une population de


* En collaboration avec le Fitz Patrick Institute of African Ornithology de l’université du Cap (Afrique du Sud).

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