La Provence Marseille du dimanche 21 juillet 2019

P

lusimportante unitéde

la flotte françaiseaprès le

porte-avionsCharlesde

Gaulle,leporte-hélicoptères

amphibieDixmudeaaccueilli

la semainedernière,àToulon,

son nouveau commandant. Le

Capitaine de vaisseau (CV) Ni-

colasRossignolsuccède,en ef-

fet, au CV Jean Porcher qui était

le "pacha" du bateau depuis

deux ans.

Le commandement d’un bâti-

ment de premier rang constitue

le point d’orgue du parcours

d’un officierdemarine. Com-

ment avez-vousembrassé cette

carrière?

Originaire du Pas de Calais-ré-

gion qui tend malheureuse-

mentàdevenir un désert mili-

tair e-,mafamillecompte

certes dans ses rangs quelques

marins,mais je n’étaispas parti-

culièrement attiré par ce milieu

durant mon enfance. C’est lors

de mes classes préparatoires

que je me suis orientévers

l’École navale car j’ai voulu ten-

ter l’aventure. Au cours de ma

carrière, j’ai eu la chancede

prendre partàdenombreuses

opérationsenmer Méditerra-

née ou en océanIndien, de dé-

couvrir plusieurs de nosterri-

toires d’outre-mer, en particu-

lier aux Antilles et danslePaci-

fique, notamment la Polynésie.

Ces années d’embarquement

m’ont permis de réaliser des

choses peu communes comme

mettre piedàterre sur le légen-

daireîlot de Clipperton, décou-

vrir l’îledePâques, ou encore

faire escale dans le port my-

thique de Valparaiso. Au-delà

du caractère exceptionnel de

ces activités, j’ai pu mesurer

très concrètement la capacité

de rayonnement dela France

sur toutes les mers du globe.

Comment est attribuélecom-

mandement des unités les plus

prestigieuses de la "Royale"?

Un processus de sélection per-

met d’identifier les officiers les

plus compétents pour assumer

ces responsabilités. En fonc-

tiondutypedebâtiment, des

parcoursqualifiants ont été mis

en place afin de permettre aux

officiers de développer les com-

pétences requises et acquérir

suffisammentd’expérience.

En ce qui concerne lesporte-hé-

licoptères amphibies, le poste

clef est celui de commandant

en second quipermetd’avoir

uneconnaissance très fine du

bâtiment etde l’équipage. Pour

ma part,aprèsavoir intégré le

premier équipageduMistral,

j’aiétépendantdeuxanscom-

mandant en secondduTon-

nerre.Ensuite, il faut se prépa-

rer sur un plan personnel et

prendre le temps de la réflexion

pouraborder de nombreuxas-

pectsliés àl’exercicedes res-

ponsabilités qui nous in-

combent.

Quel sentiment avez-vous

éprouvéenprenantlaresponsa-

bilité du "Dixmude" et de son

équipage?

Je suis très fier de la confiance

qui m’est accordée et très heu-

reuxdes perspectivesqui

s’offrentàmoi. Le bâtiment dis-

pose d’une très grande sou-

plesse d’emploietderemar-

quables capacités qui ont été à

plusieurs reprisesdémontrées

en opérations.Toutefois, ce bâ-

timentaux dimensions impo-

santes dispose d’un équipage

optimisé, lui permettantd’ex-

ploiter de manière optimale ses

capacités et répondreaux exi-

gences des opérations ac-

tuelles. Aprèsavoir eu le privi-

lègedeserviràbordduMistral

et duTonnerre,commander le

dernier de la fratrie est une

forme d’aboutissement car j’ai

vu évoluer ce type de bâtiment

dansdes configurations trèsdif-

férentes, où l’équipage occupe

toujours une place essentielle.

Pourrelever les prochains dé-

fis, je sais pouvoir compter sur

les marins duDixmudeen qui

j’ai d’ailleurs toute confiance.

Quelles sont les capacités de

ce bateau qui semble avoir beau-

coup de cordesàson arc?

Ce bâtiment est en effet un véri-

tablecouteau suisse, ce qui lui

permet d’assurer un spectre

très large desmissions, allant

del’assistancehumanitaire,à

l’évacuation de ressortissants,

en passant par les opérations

de projection de force ou de la

lutte contre les narcotrafics.

Il peut évoluer seul ou avec un

escorteur adapté aux menaces,

dans un contexte de basse

comme de haute intensité, lors

d’opérations mettant par

exempleenœuvredes hélico-

ptères armés au large de côtes

hostiles. Il peut également s’in-

sérer dans un dispositif aérona-

val multinational complexe. Il

dispose d’une autonomie im-

portante et peut accueillirplu-

sieurs centainesdepersonnes

en plus de son équipage.

Où en est la qualification du

dronehélicoptère Camcopter

S-100 que le "Dixmude"atesté

l’an dernier?

L’intégration du Camcopter a

connu une nouvelle avancée au

printemps puisque cette capaci-

té est désormais complètement

intégréeàbord. Il reste encore

quelques testsàconduire lors

d’une prochaine campagne

d’essaisafindepouvoir accé-

der àune première capacité

opérationnelle d’ici la fin de

cette année.Cet appareil va

considérablement améliorer

nos capacités d’observation en

haute mer comme sur la frange

littorale,mais également renfor-

cerlaprotectiondubâtiment et

des troupes lors des phases de

miseàterre.Ses moyensd’ob-

servation nous permettront éga-

lementd’êtr eplus efficaces

dan sles missions de sauve-

garde maritime et de police en

mer, en recueillantplus aisé-

ment des preuves etdesimages

lorsque des infractions sont

commises.

Le bateau porte-t-il encore

les stigmates du crash de l’héli-

coptère Caïman, survenu le 17 oc-

tobre dernier?

Il ne reste quasiment plus de

trace matérielle de cet événe-

ment. Je suis en revanche da-

vantage préoccupé par les sé-

quellesphysiques et psycholo-

giques qui pourraient marquer

de manière durable certaines

personnes ayant été au contact

plus ou moins proche de l’acci-

dent.

Toutesont été remarquable-

ment prises en charge sur le

planmédicaletpsychologique.

En particulier, ledirecteur de

pont envol, quiaété le plus tou-

ché. Il est toujours hospitalisé

et vient d’entamer une longue

phase de rééducationavec

beaucoup de force et de cou-

rage. Quantàses trois équi-

piers, ils vont mieux mais conti-

nuentàêtre suivisetsoutenus

par leurs camarades qui restent

très présentsàleurs côtés.

Le crashaété provoqué par

une saisine qui n’avait pasété

désolidariséedel’hélicoptère.

Quels enseignements ont été ti-

rés de cet accident?

Les causes ont effectivement

été identifiées et les actions cor-

rectricesmises en place. Tous

les enseignements ont été parta-

gés entre la Marine et l’Aviation

légère de l’armée de Terreàla-

quelle appartient le Caïman car

nous avonsles mêmes exi-

gences en termes de sécurité et

de maîtrisedurisque.Nous al-

lons donc nous appuyer sur les

conclusions de l’enquête pour

améliorer notre façon de tra-

vailler ensemble et tout mettre

en œuvre afin qu’un tel événe-

ment ne se reproduise pas.

Le "Dixmude" est le bâti-

ment filleul de la Ville de Mar-

seille. Quand celui-ci rendra-t-il

ànouveau visiteàsamarraine?

J’ai très envie de veniràMar-

seille pouryentretenir le lien

établi entrelapopulation, la

vill eetlebâtiment.Mais notre

programme de la rentrée s’an-

nonce chargé etne nous per-

mettra malheureusement pas

d’effectuer une escale lors des

Journées du Patrimoine. En ef-

fet, l’équipagedémarre un nou-

veau cycle opérationneletsera

en entraînement en septembre

avant de participeràunexer-

cice amphibie majeur, courant

octobre. Mais j’espère pouvoir

programmer dans les pro-

chains mois une visitedeplu-

sieursjours, si possible en se-

maine,afin d’accueillirunmaxi-

mum de visiteurs et entretenir

le lien armées-nations avec les

plus jeunes.

Les contraintes opération-

nelles du PHA et les priorités de

la 2eville de France éloignent sou-

vent le filleul de sa marraine.

Comment ce parrainage peut-il

trouver une nouvelle dyna-

mique?

La recherched’uncréneau

adapté pour effectuer cette pro-

chaine visite nous permettra

d’avoir un peu de tempspour

identifier, avec l’équipe munici-

pale,denouvelles voies permet-

tant de renforcerles liensentre

le bâtiment et la ville. L’équi-

page est réparti en neuf ser-

vices représentant desmétiers

très variés et il pourrait être inté-

ressant de rechercher des parte-

nariats adaptés pourchacun

d’entre eux. Nous disposons

par exemple d’un important hô-

pital capable d’accueillir jus-

qu’à 70 patients.Nouspour-

rions le jumeler avecun grand

hôpital marseillais.

Proposrecueillis

parPhilippe GALLINI

Nom:Dixmude

Ville marraine:Marseille

Mise en service :27 juillet 2012

Longueur: 199 m(une rame de TGV)

Largeur:32 m

Tirant d’eau:6,20 m

Déplacement:21 600 tonnes (deux tours Eiffel)

Equipage:202 marins

Autonomie:11 000 nautiques (soit 20 300 km)

Vivres:30 jours pourl’équipage et un demi-régi-

ment de 450 soldats

Locaux d’état-major:850 m² (200 personnes)

Pont d’envol :5200 m² (quatre piscines olym-

piques) pouvant accueillir16hélicoptères dont

six, simultanément.

Hangars:1800 m² pour 16 hélicoptères (8 Tigre

et 8Caïman) et2650 m²pour 110 véhiculesblin-

dés ou un escadron de 13 chars Leclerc.

Radier(bassin de manœuvre):885m² avec quai

de 57mpour deux EDA-R (engins de débarque-

ment amphibie rapides).

Hôpital:750 m² (69 lits), doté de deux salles

d’opération, une salle de radiologie, un cabinet

dentaire et un scanner.

LE PORTE-HÉLICOPTÈRES AMPHIBIE EN QUELQUES CHIFFRES

Le commandantRossignoladéjà commandé un patrouilleur

et une frégate de surveillance. /PHOTO MARINE NATIONALE

Àl’issue d’une nouvelle phase de test, le petit drone hélicoptère Camcopter S-100 devrait être déclaré

opérationnelsur le "Dixmude" d’ici la fin de l’année. /PHOTOMARINE NATIONALE/DGA/AUDREY AGOSTINELLI

Nouveau pacha pour le Dixmude

Le capitainedevaisseau Nicolas Rossignolapris le commandement du bâtiment filleul de la Ville de Marseille

Marseille

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"Pourquoi ne pas

jumeler un hôpital

marseillais avec

celui du bord."

"Particulièrement

polyvalent, ce bâtiment

est un véritable

couteau suisse."

Dimanche 21 Juillet 2019 5

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