Les Echos - 21.02.2020

(vip2019) #1

D


epuis le début de l’année, l’adminis-
tration fiscale dispose d’une nou-
velle arme dans sa lutte contre
l’optimisation fiscale : la procédure dite du
« mini-abus de droit ». Alors que, jusqu’à
présent, elle ne pouvait remettre en cause
une opération quelconque, sur le fonde-
ment de l’abus de droit, que si elle parvenait
à démontrer que cette opération détournait
l’esprit de la loi et poursuivait un but
« exclusivement » fiscal, elle va désormais
pouvoir recaler les opérations poursuivant
un but « principalement » fiscal.
Ce nouveau dispositif s’applique aux
actes passés ou réalisés depuis le 1er janvier
2020 pour lesquels un redressement serait
notifié à compter du 1er janvier 2021. Le Bul-
letin officiel des impôts commentant ce
nouveau dispositif a été mis en ligne le
31 janvier dernier. Il fait suite à plusieurs
réponses ministérielles publiées au cours
de l’été 2019 dans lesquelles l’administra-
tion fiscale avait annoncé qu’elle applique-
rait ce nouveau dispositif « de manière
mesurée sans chercher à̀ déstabiliser les stra-
tégies patrimoniales des contribuables ».
« La tonalité de ce commentaire est plutôt
rassurante. Il reste néanmoins une incerti-
tude sur l’usage qu’en feront les vérificateurs
et la jurisprudence », souligne Jean-Fran-
çois Desbuquois, avocat associé chez Fidal,
membre du cercle des fiscalistes.



  • CE QUE DIT L’ADMINISTRATION
    En guise de préambule, l ’administration fis-
    cale rappelle que cette procédure n’a pas
    pour objet d’empêcher les contribuables de
    choisir le cadre juridique le plus favorable
    d’un point de vue fiscal. Comme pour l’abus
    de droit classique, la démonstration de
    l’abus de droit dans le cadre de ce nouveau
    dispositif nécessite toujours la réunion de
    deux éléments : l ’utilisation d’un texte – qu’il
    s’agisse d’une l oi, d ’un décret, d’une décision
    administrative... – à l’encontre de l’intention
    de son auteur (élément objectif) et la
    volonté principale d’éluder l’impôt (élé-
    ment subjectif). Si l’un de ces éléments fait


défaut – notamment l’utilisation d’un t exte à
l’encontre de l’intention de son auteur –, la
procédure du mini-abus de droit n’est pas
applicable. « En clair, même si le but recher-
ché est de faire une économie d’impôt, l’abus
de droit ne peut être retenu s’il n’y a aucune
volonté de frauder », décrypte Arlette Dar-
mon, notaire, présidente du Groupe
Monassier.
L’administration précise également que
lorsque c’est le législateur qui a souhaité
encourager telle ou telle opération via la
mise en place d’un dispositif fiscal incitatif,
l’abus de droit ne peut être invoqué, même
si l’opération a un but principalement fiscal.
Ce faisant, l’administration fiscale se refuse
toujours à dresser une liste exhaustive des
montages patrimoniaux susceptibles d’être
remis en cause sur ce nouveau fondement.

Elle se borne à mettre en avant quelques
exemples illustrant ce principe.


  • DONATION EN NUE-PROPRIÉTÉ
    Rappelant que le recours au démembre-
    ment de propriété dans les opérations de
    transmission de patrimoine était encou-
    ragé par le législateur, via un barème fiscal
    spécifique, l’administration fiscale a indi-
    qué dans une réponse ministérielle publiée
    en juin 2019 que les transmissions antici-
    pées de patrimoine, et notamment celles
    pour lesquelles le donateur se réserve l’usu-
    fruit du bien transmis, n’étaient pas visées
    par la procédure du mini-abus de droit,
    sous réserve qu’elles ne soient pas fictives.
    Concernant la donation temporaire
    d’usufruit d’un immeuble à un enfant
    majeur, l’administration fiscale estime que


le caractère temporaire de la donation n’est
pas abusif en lui-même s’il a une substance
patrimoniale effective. Dès lors, une dona-
tion temporaire d’usufruit portant sur un
immeuble, même si elle permet de réaliser
une économie importante d’impôt sur la
fortune immobilière (IFI) n’est pas abusive
dès lors qu’elle est justifiée par la volonté
d’aider son enfant à financer ses études en
lui permettant d’o ccuper le logement ou de
percevoir les loyers.
De même, la donation temporaire d’usu-
fruit d’un immeuble ou d’un portefeuille de
titres au profit d’un organisme sans but
lucratif n’est pas considérée par l’adminis-
tration comme abusive, même si elle per-
met de faire une économie d’impôt très
importante, dès lors que le donateur aban-
donne bel et bien l es l oyers e t/ou les r evenus

du portefeuille à l’organisme caritatif pen-
dant t oute l a durée de l’usufruit t emporaire.


  • DONATION AVANT CESSION
    En revanche, l’administration fiscale ne se
    prononce pas sur les donations avant ces-
    sion qui consistent à donner des titres ou
    des immeubles à ses enfants avant qu’ils ne
    soient vendus à un tiers p our p urger la plus-
    value de cession. « Mais ces opérations ne
    devraient pas poser de problème, au moins
    lorsqu’elles sont réalisées en pleine propriété.
    Le Conseil d’Etat considérait déjà que les
    donations-cessions de titres ne peuvent être
    abusives que si elles sont fictives. Elles ne
    devraient pas pouvoir être considérées
    comme réalisées dans un but principalement
    fiscal pour le mini-abus de droit, tant elles
    présentent u ne forte dimension patrimoniale
    résultant de la transmission à titre gratuit »,
    explique Jean-François Desbuquois.

  • CHANGEMENT DE RÉGIME
    MATRIMONIAL
    « De même, un changement de régime matri-
    monial préalable à une donation-partage aux
    enfants, pour mettre en commun un bien
    appartenant jusqu’à présent à un seul des
    époux ne devrait pas être remis en cause par le
    fisc, s’il assure dans le même temps la protec-
    tion du conjoint survivant », analyse Arlette
    Darmon. Par exemple, dans le cas de la mise
    en commun de titres de l’entreprise appar-
    tenant en propre à l’un des conjoints, ce ris-
    que paraît écarté si cette communautarisa-
    tion permet au conjoint survivant de
    conserver, a u décès de son époux, une partie
    des titres de l’entreprise en pleine propriété
    ou en usufruit. En revanche, le risque de
    redressement est réel si la donation aux
    enfants porte sur l’intégralité des titres de
    l’entreprise et qu’e lle n’a été consentie que
    pour profiter deux fois de l’abattement
    parent-enfant et des tranches les plus basses
    du barème... Il faudra attendre les premiers
    contentieux pour mesurer la vraie portée de
    la nouvelle définition de l’abus de droit.
    — Nathalie Cheysson-Kaplan


FISCALITÉ Depuis le 1er janvier 2020, les montages des contribuables un peu trop avisés peuvent être remis en cause


s’ils poursuivent un but « principalement » fiscal. Faut-il avoir peur de cette nouvelle définition? Avis d’experts.


Mini-abus de droit : plus de peur


que de mal?


de Meilleurs Agents - « Les
Echos ». Le marché intra-
muros reste très tendu. Ce
qui profite aux communes
situées juste de l’autre côté
du périphérique mais plus
largement à l’Ile-de-France
(IDF). En tête des marchés
de report favoris, d’après

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