22 –LES ECHOS WEEK-END
BUSINESS STORY
preuve»,rétorque, visiblement agacée, Ine
EriksenSoreide. Et d’ajouter :«Silasituation est
aussi tendue que décrite, quelles seraient de toutes
façons leschances de parveniràuntraitéfaisant
mieux qu’aujourd’hui?»Même le ministre
finlandais trouveque l’expert australienva trop
loin :«Nous devons davantagedialoguer avec le
reste du monde mais nous n’avons pas besoin
d’un nouveau traité »,affirme-t-il.
Àquelques nuances près, les pays arctiques
s’estiment clairement les plus légitimespour
gérer leur territoire.«S’il yasipeu de litiges
aujourd’hui dans l’océan Arctique, c’est pour une
raison simple,souligne l’ambassadeur islandais
Einar Gunnarsson, président du comité des
haut fonctionnaires du Conseil de l’Arctique,
présentàTromsø.Dansla zone économique
exclusivedechaque pays(ZEE),ils’agit de
questionsinternes;etau-delàdesZEE,c’est
un espacelargement inaccessible,sousla
responsabilitéde laConvention desNations unies
surle droit dela mer.»Pour l’heure,c’est la
réalité. Plus de 90% des ressources de l’océan
Arctique sont situéesdans les ZEE des cinq pays
côtiers depuis qu’ilsont étenduleur zone
économiqueexclusive à350 miles. Ce qui fait
direàMikaa Mered, chercheuràl’Ileri et auteur
d’un livre récentLes Mondespolaires,que
«l’Arctiquen’est ni un eldorado ni unfarwest»
ainsi qu’onleprésentevolontiers, dumoins pour
les pays nonarctiques.Mêmesipersistent
quelquestensions autourd’îlescomme celles
de l’archipel duSvalbard(voir encadré ci-contre)
et de Jans,«caillou»de1,3 km^2 entre l’île
canadienne d’Ellesmereet le Groenland...
«Plus inquiétanteàterme est la question de la
souveraineté du pôleNord lui-même,estime
Marc Lanteigne,professeur de sciences
politiquesàl’Université arctique deNorvège.
Depuisdesannées, le Canada,le Danemark(via le
Groenland) et la Russierevendiquent la dorsale de
Lomonosovau motif qu’elleferait partie de leur
plaque continentalerespective. »Un jour prochain
lesNations unies devront bientrancher...
LIEU DE CONFRONTATION EST-OUEST
La passe d’armes d’ArcticFrontiersn’est pas
le premier accrocàcequ’AlexandreTaithe,
chercheuràlaFondationpour la recherche
stratégique–unthink tank créé par PierreJoxe
et lié au ministère des Armées –, appelle le
«code arctique »quiveut que certains sujets
comme la sécurité militaire ne soient jamais
abordés... Depuis mai dernier,l’Arctique est
redevenu un lieu de confrontation Est-Ouest
comme auxbeaux jours de la guerre froide,
semblant mettre un termeàl’adage des
dernières décennies«Grand Nord,basses
La polémiquesur la
présencedeSégolène
Royal, ex-ambassadrice
desPôles, dans les
cénaclesarctiquesest
l’arbrequi cache la
forêt. Quand Florence
Parly,ministredes
Armées,adéclaré
en août dernier que
«l’Arctiquen’appartient
àpersonne »,elle a
pour le moins
déconcertéles pays
arctiques... Unfaux pas
peut-êtrepour
l’Hexagone quin’a
de toutefaçon pas
lesmoyens de ses
ambitions scientifiques,
selon Jérôme
Chappellaz,directeur
de l’Institutpolaire
français. Lafeuille de
routedeMichelRocard
de 2016 (identifierles
intérêtsfrançais,
renforcerlalégitimité
de laFrancedans les
enceintes arctiques,
travailleràl’équilibrage
entreintérêts
nationaux et intérêt
général dans la
gouvernancedel’océan
Arctique et promouvoir
un haut niveau de
protection decet
environnement marin)
n’apas vraiment été
mise en œuvre.«Notre
seule marge de
manœuvre,c’estsur les
questionsscientifiques
et environnementales.
Ce n’estpas suffisant
pourcompter dans la
zone notammentface
auxChinois »,ajoute
CamilleEscudé. La
Franceaen tout cas
créé un Observatoire
de l’Arctiquepour
«développer sa
connaissance des
activités desacteurs
de larégion,étatiques
et privés,etaffinersa
vision desévolutions
pouvantavoir un
impactsurles intérêts
français ».
ET LA FRANCE?
Extrait de la série
«Researchat the
end of the world »,
sur le quotidien
du centre
international
de recherche sur
l’Ar ctique et de
la surveillancede
l’environnement
de Ny-Alesund.
L’Institutpolaire
françaisydispose
d’installations et
opèreune station
de recherche
commune
franco-allemande.