Les Echos - 06.03.2020

(sharon) #1

Les Echos Vendredi 6 et samedi 7 mars 2020 FINANCE & MARCHES// 31


mai 2021. Ces questions sont encore
loin de concerner le directeur géné-
ral Jean-Laurent Bonnafé (âgé de
58 ans) et le président du groupe,
Jean Lemierre, âgé de 69 ans (les
statuts prévoyant une limite de
72 voire 73 ans).

Un choix qui ne sera pas
simple
Le poste est d’autant plus stratégi-
que que la direction générale est
plutôt resserrée : elle ne compte
que six membres. Il n’y a qu’un seul
DGD (délégué au sens qu’il dispose
d’une délégation de signature pour
engager le groupe) et quatre direc-
teurs généraux adjoints, à savoir
Michel Konczaty, Jacques d’Estais,
Thierry Laborde et Yann Gérardin.
En termes de personnalité, le
choix de la ou d u successeur ne sera
pas simple tant Philippe Bordenave
fait l’unanimité. « Il est là depuis

longtemps, il connaît la banque de
fond en comble et il a aussi un profil
politique » , souligne un bon obser-
vateur. Diplômé de l’X et de l’ENA,
l’ancien directeur financier a inté-
gré la BNP en 1985 e t occupe le poste
de DGD depuis 2011.
Pour les observateurs, la ques-
tion de savoir si Marguerite Bérard,
arrivée en 2019 à la tête des réseaux
France de BNP Paribas, pourrait
occuper cette fonction e st p osée. Un
tel choix pourrait provoquer quel-
ques froncements de sourcil en rai-
son de son arrivée récente dans le
groupe et parce qu’e lle doit encore
mener à bien le chantier de la trans-
formation de la banque de détail en
France. En revanche, cette major de
l’ENA, passée par les cabinets
ministériels avant d’occuper le
poste de directrice générale du
groupe BPCE, cocherait parfaite-
ment la case politique. Par ailleurs,

la banque pourrait à cette occasion
féminiser son état-major au plus
haut niveau.

Contenu du poste
« Dans ce genre de cas, on peut tou-
jours imaginer un remplacement
poste pour poste ou en profiter pour
faire évoluer le contenu du poste de
DGD ou enfin engager un remanie-
ment plus large » , en anticipant
l’arrivée progressive à la retraite
d’autres membres du comité
exécutif (direction générale
+ 14 membres), souligne un bon
connaisseur de l’établissement.
Il est vrai que le poste est a ctuelle-
ment très large, portant notam-
ment sur les fonctions finances,
affaires fiscales, gestion actif-passif,
affaires publiques, informatique ou
encore immobilier... On peut ima-
giner que le contenu du poste soit
redéfini.n

Selon les statuts de la banque de la rue d’Antin, « les fonctions des directeurs généraux délégués »
prennent fin à 65 ans, mais il y a eu des dérogations. Ph oto Remy de La Mauvinière/ap/Sipa

Ro main Gueugneau
@romaingueugneau


Les autorités ont beau multi-
plier les alertes, rien n’y fait :
la machine du crédit immobi-
lier continue de tourner à
plein régime en ce début
d’année. La croissance s’est
même accélérée, selon les
chiffres publiés par la Banque
de France jeudi : le crédit à
l’habitat aux particuliers a
ainsi grimpé de 7 % en janvier
(contre +6,8 % en novembre
et décembre), avec une pro-
duction de 23,5 milliards
d’euros sur le mois.
La croissance est notam-
ment tirée par les renégocia-
tions, qui sont reparties à la
hausse et pèsent 28 % des nou-
veaux crédits accordés en jan-
vier. Un niveau proche de celui
atteint en novembre (29 %) et
qui représentait le plus haut
de 2019. Pour un emprunteur,
renégocier son crédit permet
de raccourcir la durée de rem-
boursement (tout en mainte-
nant les mêmes mensualités)
ou alors de maintenir la durée
de son prêt initial, mais de
réduire les mensualités. Les
emprunteurs continuent de
profiter des taux très attrac-
tifs, avec un taux moyen de
1,17 % en janvier, stable par
rapport à décembre, après
neuf mois consécutifs de
baisse.


Risque de surchauffe
Ces chiffres seront scrutés
avec soin par la Banque de
France et Bercy. Les autorités
s’inquiètent en effet depuis
plusieurs mois d’une possible
surchauffe dans le crédit
immobilier. Le Haut Conseil
de stabilité financière, pré-
sidé par le ministre de l’Eco-
nomie et des Finances, avait
émis des recommandations


BANQUE


La production de
crédit immobilier
a accéléré en
ce début d’année,
en dépit des
recommandations
formulées
par les autorités
financières.


La part des renégo-
ciations est repartie
à la hausse au mois
de janvier.


La croissance du


crédit immobilier


reste soutenue


«Transformation du modèle de l’assurance
et de la protection des personnes face aux
nouveaux défissociétaux et économiques »

Evénement co-organiséavec :

Mercredi18mars2020à19h00

Thomas Saunier
Directeur Général de
Malakoff Humanis
Antoine Lissowski
Directeur général de
CNP Assurances

Informationsetinscriptions:
http://www.lesechos-prospective.fr

Edouard Lederer
@EdouardLederer

Ces derniers mois, le conflit entre
Crédit Mutuel Arkéa – la branche
bretonne du Crédit Mutuel, qui
rêve de prendre son indépen-
dance – et la Confédération natio-
nale du Crédit Mutuel (CNCM) –
l’organe central du groupe,
garant de sa cohésion – avait l’air
gelé. Mais, depuis le départ sur-
prise du directeur général
d’Arkéa, Ronan Le Moal, le
12 février dernier, de nouveaux
fronts se sont ouverts.
Premier sujet d’hostilité : Arkéa


  • qui regroupe les Crédit Mutuel de
    Bretagne et du Sud-Ouest – a accé-
    léré les manœuvres visant à chan-
    ger de gouvernance. Il souhaite
    abandonner l’organisation en con-
    seil d’administration et direction
    générale pour un régime en direc-
    toire et conseil de surveillance.
    Actuellement président du Crédit
    Mutuel Arkéa, Jean-Pierre Denis
    serait dans ce cas pressenti comme
    président du directoire.


« Exigences des superviseurs
et régulateurs »
Selon Arkéa, l’objectif de cette évo-
lution est de « répondre pleinement
aux exigences des superviseurs et
régulateurs ». Le groupe basé au
Relecq-Kerhuon ( près de Brest) e n a
informé la Confédération le
18 février dernier. Il espérait adop-
ter ces nouveaux statuts d’ici au
mois de mai. Mais la Confédération
n’est visiblement pas aussi pressée.
Le seul projet de modification des

statuts « apparaît insuffisant pour
permettre au Conseil confédéral de
délibérer en pleine connaissance de
cause » , écrit l’organe central dans
un courrier que « Les Echos » ont
pu consulter. Il n’a donc pas été
présenté, mercredi matin, au
conseil d’administration de la
Confédération. Reste à voir si Arkéa
maintiendra son projet. « La gou-
vernance du groupe Arkéa reste
donc, pour le moment, organisée sur
le mode de conseil d’administration
et comité e xécutif dans l’attente d’une
modification des statuts, ulté-
rieure » , déclare le camp breton
dans un communiqué. A ses yeux,
l’attitude de l’organe central est
« contraire à l’autonomie des grou-
pes régionaux que la CNCM prétend
pourtant défendre ».

Cette dernière nie toute oppo-
sition de principe. « Compte tenu
des attentes renforcées de la Ban-
que centrale européenne sur la
bonne gouvernance des banques
françaises et européennes, des élé-
ments complémentaires ont été
demandés , dédramatise la CNCM.
Dès lors que le Crédit Mutuel
Arkéa aura répondu aux ques-
tions, le dossier sera examiné et
mis au vote par l’organe central. »

« Raison d’être » retoquée
La question du statut est d’autant
plus minée que, pour certains, le
changement de gouvernance
serait une forme de réponse à la
Confédération, qui conteste
depuis quelques semaines la léga-
lité de la rémunération variable
des dirigeants d’Arkéa, au regard
de la loi de 1947 sur les coopérati-
ves. Pour sa part, Arkéa réfute
tout lien entre ces deux sujets et,
surtout, défend la légalité de ces
versements. Afin d’avancer, une
expertise juridique externe a été
sollicitée par la CNCM.
Affront supplémentaire aux
yeux d’Arkéa, la Confédération –
qui a validé mercredi la nomina-
tion d’Hélène Bernicot comme
nouvelle directrice générale
d’Arkéa – a retoqué un autre
changement de statut en appa-
rence consensuel : l’inscription
d’une « raison d’être » pour
l’entreprise, une possibilité don-
née par la loi Pacte. Pour la
Confédération, ce projet devrait
« a minima » faire référence au
Crédit Mutuel.n

Edouard Lederer
@EdouardLederer

Un îlot de stabilité dans une mer
agitée. Si les grandes banques euro-
péennes vivent à l’heure du mer-
cato des patrons, la France conti-
nue à se distinguer par une grande
stabilité. Les deux grandes banques
cotées, BNP Paribas et Société
Générale, ainsi que Crédit Agri-
cole SA n’ont pas c onnu récemment
de bouleversements au plus haut
niveau.
Pourtant, des changements se
profilent. BNP Paribas entre dans
une phase sensible pour sa gouver-
nance : dans quatorze mois à peine,
le numéro deux de la banque, Phi-
lippe Bordenave, directeur général
délégué, partira à la retraite. C’est
donc un exercice de succession que
doit préparer la première banque
de la zone euro par les actifs.
La situation aurait pu se présen-
ter dès cette année, les statuts de la
banque prévoyant que « les fonc-
tions des d irecteurs généraux
délégués (DGD) prennent fin au plus
tard à l’issue de l’assemblée générale
(AG) statuant sur les comptes de
l’exercice au cours duquel ils attei-
gnent l’âge de 65 ans » , âge atteint
par Philippe Bordenave en 2019.
Mais le conseil peut décider de
prolonger les fonctions des DGD
une année de plus, jusqu’à l’issue de
l’AG suivante. Et c’est bien ce qui a
été décidé par la banque de la rue
d’Antin. Le mandat de Philippe B or-
denave c ourt donc jusqu’en

BANQUE


Le directeur général
délégué de BNP Pari-
bas, Philippe Borde-
nave, a été prolongé
dans ses fonctions
jusqu’à l’assemblée
générale de 2021.

BNP Paribas prépare


la succession de son numéro 2


Crédit Mutuel : les hostilités reprennent


entre la Confédération et Arkéa


BANQUE


L’organe central du
Crédit Mutuel a reto-
qué la « raison d’être »
d’Arkéa, car elle ne
faisait pas référence
au Crédit Mutuel.

en fin d’année dernière,
notamment sur la durée des
prêts et la capacité de rem-
boursement des emprun-
teurs, pour tenter de ralentir
la cadence.
Alors que les banques
avaient alerté sur l’exclusion
probable de 100.000 ménages
du crédit immobilier en 2020, à
cause de ces recommanda-
tions, la Banque de France et
l’ACPR, le gendarme bancaire,
avaient garanti que le respect de
ces mesures ne limiterait pas
nécessairement la production
de crédit, mais que la crois-
sance se ferait « sur des bases
plus saines et plus durables ».
Le marché c ommence néan-
moins à évoluer, a estimé
l’Observatoire Crédit Loge-
ment/CSA en début de
semaine, se b asant sur des chif-
fres plus récents, ceux du mois
de février. Si celui-ci confirme
que les taux se stabilisent à un
niveau très bas, il pense déceler
un début de ralentissement
dans la production.

Resserrement
des conditions
De plus, selon l’Observatoire,
les conditions de prêt se resser-
rent : « La part des emprunteurs
les moins dotés en apport per-
sonnel (les jeunes et/ou les moins
aisés) a commencé à reculer,
comme d’ailleurs la durée des
prêts les plus longs. »

Les prêts à plus de 25 ans se
font ainsi de plus en plus rares,
souligne Crédit Logement, qui
est contrôlé par les banques,
avec une durée moyenne des
emprunts qui se stabilise à
228 mois en février (après une
baisse de 4 mois en janvier).
De quoi faire penser que les
recommandations du HCSF
commencent malgré tout à
faire de l’effet.
Le Haut Conseil veille de
toute façon au grain. Un repor-
ting mois par mois a été mis en
place pour mieux surveiller
l’évolution de la production de
crédit établissement par
établissement.n

Les prêts à plus
de 25 ans se font
de plus en plus
rares.

La durée moyenne
des emprunts
se stabilise
à 228 mois.

« Des éléments
complémentaires
ont été demandés.
Dès lors que
le Crédit Mutuel
Arkéa aura
répondu
aux questions,
le dossier sera
examiné et mis
au vote par
l’organe central. »
CONFÉDÉRATION NATIONALE
DU CRÉDIT MUTUEL
Free download pdf