Les Echos - 06.03.2020

(sharon) #1

40 // Vendredi 6 et samedi 7 mars 2020 Les Echos


ArcelorMittal a trouvé un investisseur pour
la privatisation d’Ilva : l’Etat italien!

« Qui vit d’espoir, meurt de désir. » Si toutefois l’Etat italien s’attendait
à ce que la famille Mittal se conforme à la sagesse locale, il se sera
lourdement trompé. Il y a un an et demi, Luigi Di Maio, alors ministre
du Développement économique, saluait la reprise par ArcelorMittal
du plus grand site sidérurgique du Vieux Continent, à Tarente dans
les Pouilles, comme « le meilleur accord possible dans les pires conditions
possibles ». Sans doute aurait-il dû inverser la formule : la privatisation
de l’usine, aussi déficitaire que polluante, revient en boomerang au
gouvernement Conte. Celui-ci va en redevenir actionnaire afin de retenir
le premier aciériste mondial, sur le point de jeter cette enclume après
plusieurs passes d’armes réglementaires. Lorsque le fer repasse, il ne fait
pas un pli : la participation de Rome devra s’élever au moins au solde
restant à payer sur le prix initial, soit 1,4 milliard de dollars à fin 2019,
selon l’analyste d’Oddo BHF, dont devra être déduit le loyer payé par
l’exploitant d’ici à 2022 (soit environ 90 millions par an). L’analyste
du bureau d’études calcule une économie de 500 millions de dollars pour
ArcelorMittal, toujours bonne à prendre dans une année délicate pour
la gestion du cash. Il faudra cependant à l’avenir s’accommoder de cet
encombrant « investisseur ». Comme on dit aussi dans la Botte, « quand
il y a plusieurs cuisiniers, la soupe est trop salée ».

Fe r à repasser


Malgré leur réputation de ne
prêter des parapluies que quand
il fait beau, les banques ne sont pas
immunisées contre les difficultés
des emprunteurs, surtout
si des effets de contagion se mani-
festent. La Bourse les envisage
d’ailleurs traditionnellement com-
me une option sur la santé
de l’économie, d’où leur dégringo-
lade digne d’un « bear marke » par
rapport à leur dernier pic du 13 fé-
vrier, avant la crainte épidémique
(–20,9 % pour le STOXX 600
Banks). AlphaValue le calcule
pour 39 grands acteurs, un dou-
blement du « coût du risque » des
mauvaises créances par rapport
au niveau – toujours très bas – pro-
jeté en 2020 représenterait 86 mil-
liards d’euros de charges supplé-
mentaires, de quoi diviser par
deux le bénéfice espéré à 114 mil-
liards. A ce train-là, les 56 milliards
de dividendes de 2021 ne vont plus
de soi. Autant dire que les allé-
chants rendements apparents ne
le sont déjà plus vraiment.

Le coût du risque des banques européennes refait parler de lui.
Panneaux résistants

JCDecaux va devoir montrer la flexibilité
de son modèle d’affaires.

A force de ne pas vouloir tomber dans le panneau du pessimisme
exagéré, on court le risque de se retrouver décroché de la réalité.
Ce grand classique vaut aussi pour les supporters boursiers des
panneaux JCDecaux, avertis d’une décroissance organique de 10 %
des ventes au premier trimestre de 2020 pour cause de coronavirus.
Eux qui voyaient, en moyenne, un repli de 1 % seulement – et une
progression de 2,6 % pour l’année entière – pourraient donc devoir
revoir à la baisse, par ricochet, de 10 à 15 % leurs espérances de bénéfice
par action. Il faut dire que l’as de la communication extérieure dans
les villes, aéroports et gares, qui réalise un cinquième de son activité
en Chine, ne cache pas l’impact négatif à attendre sur sa marge opéra-
tionnelle annuelle. Et le reste du monde aura plus de mal à compenser
qu’on ne l’espérait encore fin janvier. Pourtant, l’adversité permettra
aussi au groupe familial de montrer le degré de flexibilité de son modè-
le d’affaires, entre réductions de loyer et gestes commerciaux. Après
tout, il avait bien surmonté la grande récession de 2009, tout en pour-
suivant son internationalisation. La part de l’Asie-Pacifique est passée
d’un peu moins de 15 % en 2008 à 28,4 % l’an dernier, sur fond de hausse
de 80 % du chiffre d’affaires. Le niveau d’endettement (hors loyers) est
du même ordre (1,4 fois l’excédent brut d’exploitation). Le maintien
du dividende est un signe de confiance dans sa capacité à poursuivre
le grand défi actuel, la transformation digitale de son offre.

// Budget de l’Etat 2020 : 39 9,2 milliards d’euros // PIB 2019 : 2. 47 9,4 milliards d’euros courants
// Plafond Sécurité sociale : 3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10 ,15 euros à partir du 01-01-202 0
// Capitalisation boursière de Paris : 1.827,78 milliards d’euros (au 06-01-2020)
// Indice des prix (base 100 en 2015) : 103,55 en décembre 2020 // Taux de chômage (BIT) : 8,6 % au 3etrimestre 2019
// Dette publique : 2.415,1 milliards d’euros au 3etrimestre 2019

=
Les chiffres de l’économie

Dividendes sans parapluie


crible


EN VUE


Daniel Craig


L


e ciel peut attendre et nous
aussi. Peut-on considérer que le
titre du James Bond à venir,
« Mourir peut attendre », était prémo-
nitoire de la psychose qui emporte la
planète? On pourrait le croire à voir
l’hystérie collective qui la saisit au
regard du nombre infinitésimal de vic-
times touchées par le coronavirus. En
revanche, du c ôté d es acteurs économi-
ques, ça tire à balles réelles. Même
l’invincible James Bond est touché.
N’avait-il pas suffisamment écarté les
doigts en se lavant les mains? Aurait-il
bu cul sec son gel hydroalcoolique, tel
son traditionnel dry Martini? Quel tri-
ple zéro! Lui qui n’est jamais en retard
d’une conquête repousse de six mois
l’assaut des écrans, prévu jusque-là
pour le 6 avril. Ses producteurs ont pris
cette décision après « un examen
approfondi du marché mondial du
cinéma ». Espérons pour l’acteur

vedette, Daniel Craig, qu’il a été payé
d’avance. Il avait été très clair en 2015,
après la sortie de « Spectre » : « Si je fai-
sais un nouveau film de James Bond, ce
ne serait que pour l’argent. »
Comme le chat d’« Alice au pays des
merveilles », Craig vient du comté du
Cheshire, mais il ne partage pas pour
autant son sourire éternel. Après
« Spectre », il faisait même carrément la
gueule. Il faut dire qu’il s’était cassé la
jambe sur le tournage. Il s’est apparem-
ment fait une raison en décidant, à
52 a ns, de réendosser pour la cinquième
fois le smoking de l’espion britannique,
qu’il a incarné pour la première fois
dans « Casino Royale », en 2006.
« Tomb Raider », aux côtés d’Angelina
Jolie en 2001, sa première prestation
grand public, fut pour lui une expé-
rience « horrible et ennuyeuse ». Mau-
vais coucheur, Daniel Craig? Il devrait
animer les César.

Le CAC 40 rechute



  • L’indic^ e phare de la Bourse de
    Paris a terminé la séance en repli de
    1,90 %, à 5.361,10 points, dans un
    volume d’échanges élevé de 5,8 mil-
    liards d’euros. La veille, il avait fini
    sur une nette avance de 1,33 %.
    Depuis trois séances, l’indice
    CAC 40 enregistre des fluctuations
    de plus de 150 points en séance. Les
    investisseurs oscillent entre le sen-
    timent qu’il est temps de se posi-
    tionner après les fortes b aisses et l es
    craintes sur les conséquences de
    l’épidémie.
    L’épidémie de Covid-19 continue
    de se propager en dehors de Chine
    et affecte dorénavant 84 pays sur
    tous les continents (sauf l’Antarcti-
    que). Elle prive d’école près de


300 millions d’élèves dans 13 pays.
Les mesures drastiques de confine-
ment paralysent l’économie du
géant asiatique et menacent par
ricochet la croissance mondiale.
Seules quatre valeurs du CAC 40
étaient dans le vert à la fin de la jour-
née. A l’inverse, le transport aérien et
l’activité automobile présentent des
signes de faiblesse évidents. Renault
a enregistré la plus forte baisse du
CAC 40 (–7,56 %). ArcelorMittal a
abandonné 6,48 %. Les bancaires
ont également beaucoup souffert,
alors que les marchés s’interrogent
sur une prochaine baisse de taux de
la BCE. Société Générale a lâché
5,77 %, Crédit Agricole 4,59 % et
BNP Paribas 4 ,11 %.
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