Les Echos - 10.03.2020

(Rick Simeone) #1

Les Echos Mardi 10 mars 2020 ENTREPRISES// 19


Des motos portant la griffe Triumph, garées près de la ligne
d’assemblage à l’usine d’Hinckley. Photo Oli Scarff/AFP

pour les pièces détachées, une pour
les motos elles-mêmes – qu’il a bâties
de 2002 à 2007 à Chonburi. Sur les
65.000 unités fabriquées cette
année, seulement 10 % sortiront de
l’usine d’Hinckley, contre 52.000 à
53.000 fabriquées en Thaïlande et
5.500 assemblées à partir de kits au
Brésil. La production d’Hinckley,
elle, sera réduite à 4.500 unités.

Doubler les ventes en Asie
Pour Triumph, l’intérêt d’un tel
mouvement est double. Renforcer
sa force de frappe en termes de con-
ception, d’abord. Le constructeur a
déjà accru de 40 % ses effectifs dans
le design sur les cinq dernières
années, tout en a ugmentant de 80 %
ses investissements destinés au
développement d e nouveaux
modèles. Rien que sur l’exercice
achevé en juin dernier, cette enve-
loppe a été portée de 36 millions à
43,4 millions de livres, pour un
bénéfice avant impôt de 9,5 mil-
lions. Résultat, 14 nouvelles motos
ont été lancées sur les deux derniè-
res années.
« Concurrence accrue, consomma-
teurs plus exigeants, technologie plus
présente et cycles de remplacement
des modèles plus courts : il nous faut
investir en R&D pour être plus réactifs
et plus compétitifs », résume aux
« Echos » le directeur commercial,
Paul Stroud.
Aller chercher la croissance là
où elle se trouve, ensuite. « Nous
voulons maximiser l es opportunités
de croissance de notre marque au
niveau mondial », explique le direc-
teur général, Nick Bloor. Le

Chaka, en Inde, des motos de 200 à
750 cm^3 p ortant la griffe du britanni-
que. Elles seront commercialisées
dans le monde entier et en particu-
lier en Asie à partir de 2022, pour un
prix d’environ 2.000 livres.
« En Inde, cela nous permettra
d’entrer sur un segment de marché où
se vendront bientôt chaque année
500 .000 motos, là où nous étions
pour l’instant cantonnés à un seg-
ment de seulement 4.000 à 5.000 uni-
tés », précise Paul Stroud. Le groupe
continuera d’assembler des kits de
pièces détachées sur place pour les
plus grosses cylindrées.
Fort d’un réseau mondial de
650 revendeurs, le constructeur,
qui emploie quelque 2.300 person-
nes dans le monde, dont environ
1.000 à Hinckley, écoule aujour-
d’hui environ 9.000 motos par an
au Royaume-Uni, 33.000 à
34.000 en Europe, 17.000 sur le
continent américain et seule-
ment 6.000 en Asie. En Inde, ses
ventes annuelles ne dépassent
pas, à ce stade, les 1.000 unités.n

Alexandre Counis
@alexandrecounis
— Correspondant à Londres


Les motos Triumph seront bientôt
rares à être made in Britain. Le cons-
tructeur britannique vient d’annon-
cer qu’il délocalisait en Thaïlande la
part de la production de masse qu’il
continuait de réaliser sur son site
d’Hinckley, dans le centre de l’Angle-
terre. C’est une page qui se tourne
pour le groupe créé en 1902, premier
fabricant britannique de motos et
véritable fleuron de l’industrie auto-
mobile outre-Manche. L’opération
passera par le licenciement de 40 à
50 personnes (jusqu’à 10 % des effec-
tifs de production) dans l’usine
d’Hinckley, qui se limitera désor-
mais à la fabrication des prototypes
et modèles à haute valeur ajoutée
mais en petits volumes, comme les
séries limitées. Plus de 20 ingénieurs
seront en revanche recrutés sur
place pour muscler de 5 % les équi-
pes de design et faire du site le centre
de R&D du groupe.
Triumph avait déjà délocalisé
l’essentiel de sa production vers les
trois usines thaïlandaises – deux


DEUX-ROUES


Le premier construc-
teur britannique
de motos délocalise
l’ensemble de sa
production de masse
vers ses trois usines
thaïlandaises.


Moto : Triumph abandonne


le made in Britain


sorti de Corée du Sud en cédant son
activité HomePlus, puis de Turquie
en 2016.
La plupart des grands distribu-
teurs européens ont fait ce pas de
côté, notamment Carrefour qui
vient de céder sa filiale chinoise et
qui est sorti en 2012 de Malaisie.
Casino a vendu sa filiale thaï-
landaise en 2016. Auchan vient de
vendre son activité au Vietnam.

2.000 magasins
en Thaïlande
L’opération devrait être bouclée au
second semestre de cette année,
après avoir obtenu l’accord des
actionnaires et des régulateurs.
Au t otal, Tesco lâche près de
2.000 magasins en Thaïlande, sous
l’enseigne Tesco Lotus, et presque
80 en Malaisie. Il y employait
60.000 personnes.
Le groupe britannique sort ainsi
définitivement de l’Asie, puisque
le mois dernier il a également
annoncé qu’il vendrait sa participa-
tion d e 10 % dans Gain L and à China
Resources, son partenaire de coen-
treprise. Pourtant, Tesco a long-
temps cru que l’A sie pourrait être
son eldorado.
Le continent représentait 10 % de
ses ventes, pour une marge
d’exploitation autour de 6 %, soit
deux fois celle des activités britan-
niques et irlandaises. Mais le distri-
buteur a subi d e plein fouet la baisse
de la consommation, e t une concur-
rence féroce.
Tesco se recentre sur son marché
domestique, le Royaume-Uni, où il
doit se restructurer. La concurrence
des enseignes allemandes de hard-
discount, telles que Aldi et Lidl, est
très intense et tire les prix vers le
bas. Il reste toutefois toujours le
numéro un incontesté du secteur au
Royaume-Uni, avec une part de
marché de 27,2 % selon les derniers
chiffres du cabinet Kantar.n

Hélène Gully
@Gullylen


Dix milliards de dollars plus tard,
Tesco e st enfin prêt à laisser ses acti-
vités thaïlandaises et malaisiennes
au conglomérat d’origine thaïe Cha-
roen Pokphand.
Il s’agit de la transaction la plus
importante en Asie depuis le début
de l’année et de l’une des plus gran-
des dans l’histoire de la Thaïlande.
Une fois l’enveloppe récupérée,
Tesco destine 6,6 milliards de dol-
lars à ses actionnaires via un divi-
dende exceptionnel et compte con-
sacrer 3,3 milliards à la réduction
de sa dette. « Cette vente nous permet
de simplifier un peu plus les activités
et de les concentrer, et de créer beau-
coup de valeur pour les actionnai-
res »,
a justifié l e patron de l a société,
Dave Lewis, qui doit quitter son
poste cet été.
Le premier distributeur b ritanni-
que poursuit ainsi son mouvement,
à rebours de ce qu’il avait entrepris
depuis plusieurs années. A savoir :
une expansion effrénée à l’interna-
tional. Désormais, Tesco rembo-
bine, en réduisant la voilure un peu
partout. En 2015, le groupe était


DISTRIBUTION


Le premier distribu-
teur britannique
cède ses activités en
Thaïlande et Malaisie.


Le groupe, qui se
recentre sur ses
activités britanniques,
destine 6,6 milliards
de dollars à ses action-
naires et consacrera
le solde à la réduction
de sa dette.


Tesco quitte l’Asie pour


10 milliards de dollars et


en reversera 6,6 milliards


à ses actionnaires


Crédits photos


Shutterstock, @istockphoto

DÉCOUVREZ NOS


DERNIÈRES ÉTUDES


DU SECTEURSANITAIRE ET MÉDICO-SOCIAL


L’ OBSERVATOIRE DU SECTEUR DES SOINS


DE SUITE ET DE RÉADAPTATION


Nouvelle tarification, réforme des autorisations, nouvelle appellation,
développement des prises en charge hors hospitalisation...
Mars 2020

SILVERECONOMIE ET DIGITAL


Le numérique et l’intelligenceartifi cielle au servicedel’accompagnement
de la perte d’autonomie des personnes âgées (à domicile et en établissements)
Décembre 2019

LE SECTEURFRANÇAIS DELADIALYSE


Innovations médicales, digitalisation, baisse des tarifs...Quellesévolutions
du modèleéconomique de prise en charge du patient dialysé?
Décembre 2019

LE MARCHÉ FRANÇAIS DU TRANSPORT


SANITAIRE


Course àlat aille, nouveaux entrants, digitalisation, pression tarifaire,évolution
des prises en charge médicales, réorganisations hospitalières...
Novembre 2019

WWW.LESECHOS-ETUDES.FR


groupe, dont le chiffre d’affaires
atteint 530 millions de livres, veut
notamment pousser les feux en
Asie, où il compte doubler ses ven-
tes d’ici à trois ans. La montée en
puissance des usines thaïlandaises
participe de cette stratégie. « Puis-
qu’elles sont situées dans l’Asean,
elles permettent de servir le Viet-
nam, la C hine e t Taïwan sans a voir à
supporter des droits de douane qui
peuvent atteindre 30 % pour nos
modèles made in UK », explique
Paul Stroud.
Triumph a par ailleurs signé en
janvier un partenariat avec l’indien
Bajaj, quatrième constructeur mon-
dial de motos et scooters, pour que
celui-ci fabrique dans son usine de

Le site d’Hinckley
se limitera
aux prototypes
et aux modèles
à petits volumes.
Free download pdf