Dossier Apoptose

(Vadim Doro1J7ucA) #1

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Ces « érections » avaient donné lieu à d’énormes polémiques dans
les médias. Les partis politiques s’en étaient mêlé, bien sûr, chacun
y allant de ses efforts de récupération et faisant assaut d’arguments
plus hypocrites les uns que les autres.

Il se souvenait que la grande question avait été l’autorisation ou
non des haut-parleurs sur les minarets. Ceux, farouchement contre,
dénonçaient une atteinte à la laïcité, d’autres, se disant libéraux,
déclaraient que si on interdisait les appels à la prière, il fallait aussi
interdire les cloches des églises.

Quelle histoire !! Finalement les autorités musulmanes modérées
avaient décidé de ne pas placer les haut-parleurs. Les musulmans
intégristes avaient alors hurlé à la reculade!

Sous la pression discrète des pouvoirs publics redoutant des
débordements, les médias avaient vite trouvé d’autres sujets à
traiter.

Les radios et télés parlant moins, les journaux écrivant moins
sur ces sujets « sociétaux », les esprits s’étaient peu à peu calmés et
maintenant les croyants pouvaient utiliser leurs lieux de culte dans un
semblant de tranquillité retrouvée.

À la sortie de la passerelle de débarquement, Alain se sentit
comme happé par cet aéroport de Roissy qu’il détestait. Des milliers
de voyageurs allaient çà et là, comme de fourmis affolées dans ce
triomphe de béton ridé et sali par la pollution.

Pour une fois, il n’eut pas à attendre longtemps sa valise. Il sortit
rapidement et monta dans un taxi :

— Rue de Trévise, s’il vous plaît!

Encore imprégné de ce vécu incontrôlé, il se sentait « heureux ».
Il n’y avait pas d’autre mot pour savourer pendant quelques minutes
encore cette « immersion étrange » avant le retour au concret que
l’impact des roues sur la piste ne manquerait pas de lui signifier.

Son pragmatisme de scientifique reprenait peu à peu le dessus :
« Bien sûr, il y a tellement d’ouvrages et d’études sur les expériences
de mort imminente que mon subconscient se les approprie, pensait-il,
exactement comme le cerveau récupère les sons extérieurs pour les
intégrer dans les rêves de fi n de nuit et retarder le réveil »

Cette conclusion satisfaisant sa rationalité, il se consacra à son
petit-déjeuner. Il regarda autour de lui cette longue succession de
sièges et tous les voyageurs penchés sur leur plateau :
« Le troupeau et la mangeoire! Cinq cents personnes déjeunant en
même temps, mais pas ensemble. Chacun est commensal mais pas
Communiant! Cinq cents destins qui vont se disperser dans quelques
minutes »

Le vieil Airbus 380 descendait en silence. Depuis vingt-cinq ans,
il n’y avait guère eu de progrès en aéronautique. Le rationnement
des carburants avait mis un coup d’arrêt au développement des
supersoniques de grande capacité. Seuls quelques privilégiés
richissimes pouvaient affréter des petits supersoniques d’une dizaine
de places. Les vitesses subsoniques et les temps de vol étaient les
mêmes qu’en 2020.
Alain aimait les arrivées sur Paris au petit matin, particulièrement
à cette saison. Il était contre un hublot et pouvait contempler la
capitale pendant l’approche. L’aspect avait changé en quelques
décades. Nouvelles autoroutes périphériques, nouveaux trams.
Tenant compagnie à la tour Eiffel et aux clochers de Notre-Dame,
quatre minarets pointaient vers les nuages.
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