Le Monde - 02.03.2020

(C. Jardin) #1

30 | 0123 DIMANCHE 1ER ­ LUNDI 2 MARS 2020


0123


C


ertains scandales, bien
que réels et documen­
tés, n’éclatent jamais
vraiment. Ils sont con­
nus de quelques initiés, mais ne
parviennent pas à s’imposer dans
la grande actualité, celle qui
forme le tronc commun des faits
présents à l’esprit de tous. L’indi­
gnation qu’ils suscitent, ils ne la
suscitent qu’en vain, dans de pe­
tits cercles de scientifiques, de ju­
ristes, de riverains, de journalistes
ou de militants.
L’une des raisons à cela est que
certains scandales sanitaires ou
environnementaux sont, au sens
littéral du terme, indescriptibles.
Des mots intelligibles et des si­
tuations concrètes manquent
pour en raconter l’histoire. C’est
tout l’intérêt de Dark Waters, sorti
en France le 26 février. Outre ses
qualités cinématographiques, sa­
luées par Thomas Sotinel dans les
colonnes du Monde, le film de
Todd Haynes a peut­être une
chance d’attirer l’attention sur
une question demeurée large­
ment sous le radar médiatique en
Europe, alors qu’elle concerne
l’ensemble de la population.
Tirée de faits réels, l’histoire a
déjà fait l’objet d’une enquête­
fleuve publiée en janvier 2016 par
le New York Times Magazine. Elle
met en scène un avocat aux pri­
ses avec un géant de la chimie, ac­
cusé par une petite communauté
de Virginie­Occidentale d’avoir
contaminé leur environnement
avec des substances dangereuses.

Revêtements antiadhésifs
Substances dangereuses : voilà
une qualification un peu facile.
Les produits dont il est question
appartiennent à une grande fa­
mille chimique regroupant les
alkyls perfluorés et les polyfluo­
rés sous le nom de « substances
per­ et polyfluoroalkyliques »
(PFAS). A cette famille appartien­
nent notamment l’acide perfluo­
rooctanoïque (PFOA), le sulfonate
de perfluorooctane (PFOS), l’acide
perfluorononanoïque (PFNA) ou
encore l’acide perfluorohexane
sulfonique (PFHxS), et bien
d’autres. Ce n’est pas seulement le
mur de la complexité qui se
dresse entre le problème et sa
prise de conscience : c’est aussi ce­
lui de la prononciation.
Chacune de ces substances a des
propriétés toxicologiques parti­
culières. Certaines sont associées
à des pathologies thyroïdiennes,
hépatiques, d’autres à certains
cancers, à des troubles de la ferti­
lité et de l’immunité, ainsi qu’à
des troubles métaboliques ou
neurocomportementaux. Elles
ont en commun d’agir à des do­
ses d’exposition infimes et, sur­
tout, de ne se dégrader que très
lentement. Voire de ne pas se dé­
grader du tout. Elles s’accumu­
lent dans l’environnement et
contaminent les ressources en
eau, de même que la chaîne ali­
mentaire. Le problème est aussi
qu’elles s’accumulent dans les or­
ganismes de ceux qui y sont ex­
posés — c’est­à­dire à peu près
chacun d’entre nous. Au Etats­
Unis, on leur a trouvé ce sobri­
quet : les forever chemicals. Des
substances de synthèse pour
l’éternité, en somme.

Il y a un deuxième voile d’her­
métisme tiré sur ce scandale. Car,
si Dark Waters raconte une his­
toire à la trame familière, circons­
crite dans l’espace et le temps,
scandée par les aventures de ses
personnages — victimes ou bour­
reaux, héros ou complices —, la
réalité est bien plus diffuse, insai­
sissable. Des PFAS, on en trouve à
peu près partout. Les victimes po­
tentielles se comptent probable­
ment par millions, ignorent gé­
néralement leur statut de victi­
mes et ne sont tenues par aucune
unité de lieu ou de dramaturgie.
Quant aux responsabilités indi­
rectes, elles sont aussi nombreu­
ses — même si les firmes DuPont
et 3M sont les principales coupa­
bles. Les PFAS sont surtout con­
nus pour être produits par la fa­
brication de certains revête­
ments antiadhésifs (notamment
les surfaces d’ustensiles de cui­
sine). Mais ils sont aussi – ou ont
été – mis à profit pour une va­
riété d’applications. Ils sont utili­
sés dans les mousses anti­incen­
dies, des procédés de traitement
des métaux, des imperméabili­
sants utilisés dans la tannerie ou
l’industrie textile, on les trouve
encore dans des matériaux de
construction, des enduits, des
pesticides, des détergents, des
emballages alimentaires, des
semi­conducteurs, etc.
Rejets industriels, ruisselle­
ments des décharges, bases mili­
taires fortement utilisatrices de
mousse anti­incendie sont les
principales routes par lesquelles
ces substances se sont taillé un
destin mondial et se sont pro­
gressivement incrustées un peu
partout dans l’environnement.
Et donc dans toute la population,
ou presque.
En 2015, l’Autorité européenne
de sécurité des aliments (EFSA) a
été saisie de la question par la
Commission européenne. Ses ex­
perts rédigent un volumineux
rapport sur le sujet et proposent
un niveau d’exposition accepta­
ble, pour la somme des quatre
principaux PFAS, de 8 milliardiè­
mes de gramme par kilo de poids
corporel et par semaine. Or,
les estimations de l’exposition
réelle de la population indiquent,
selon l’EFSA, qu’une part impor­
tante des Européens sont expo­
sés au­delà, et souvent bien au­
delà, de ce seuil de sécurité. Une
situation jugée « préoccupante »
par l’agence, bien peu suspecte
d’alarmisme.
L’histoire racontée par Dark Wa­
ters va donc, en réalité, bien au­
delà d’une bataille locale entre
une firme sans scrupule et une
communauté de riverains empoi­
sonnée. Elle résume et incarne
l’histoire d’une contamination
mondiale qui demeure mécon­
nue. Le film de Todd Haynes sera
peut­être une première étape
dans la prise de conscience du
problème. Une deuxième étape
pourra être la lecture du dernier li­
vre du grand épidémiologiste
américain David Michaels
(George Washington University),
The Triumph of Doubt : Dark Mo­
ney and the Science of Deception
(Oxford University Press), dont un
chapitre est consacré aux PFAS. En
attendant la traduction de cet
ouvrage indispensable, il faut ce­
pendant savoir lire l’anglais (et
avoir le cœur bien accroché).

A


u fil des décennies, la cérémonie
des Césars était devenue au ci­
néma français ce qu’un repas do­
minical est à une famille ordinaire : une
obligation dont on espère qu’elle pourra
être drôle, imprévue ou émouvante. Sa
45 e édition, célébrée le 28 février à la Salle
Pleyel à Paris, a offert une version inédite
de cette réunion rituelle : la dispute de fa­
mille en public. Le César de la meilleure réa­
lisation décerné à Roman Polanski, absent,
a fait quitter la salle à Adèle Haenel et à Cé­
line Sciamma. Adèle Haenel dont le témoi­
gnage sur les violences sexuelles a boule­
versé le cinéma français ces derniers mois.
En ce début 2020, le cinéma français a
pourtant de quoi pavoiser : l’affluence dans
les salles – 213 millions d’entrées, 34,6 % de

part de marché pour les films nationaux,
une effervescence créative qui se reflète
aussi bien dans le succès remporté dans les
festivals, de Cannes à Venise, que dans la di­
versité des longs­métrages nommés aux
Césars. De la rigueur formelle de Portrait de
la jeune fille en feu, de Céline Sciamma, au
classicisme rigoureux de J’accuse, de Ro­
man Polanski, en passant par le thriller
nourri des peurs et des espoirs du moment,
Les Misérables, de Ladj Ly, la production
française a, en 2019, fait mentir les repro­
ches dont on l’accable depuis des décen­
nies. A la diversité, de genre et d’origine, des
auteurs a répondu la multiplicité des for­
mes et des discours.
L’institution des Césars, incarnée par un
seul homme, le producteur Alain Terzian,
n’a pas su prendre en compte cette muta­
tion. A l’émergence d’une génération de
réalisatrices proposant un autre regard sur
le monde que celui des hommes – Céline
Sciamma, Rebecca Zlotowski, Alice Wino­
cour –, elle a opposé une stratégie de gué­
rilla consistant à tenter d’empêcher la pré­
sence de créatrices comme la cinéaste
Claire Denis ou la romancière Virginie Des­
pentes dans les rituels préparatoires de la
cérémonie. Une fois révélée, cette mesqui­
nerie a suscité une fronde qui a conduit à la
démission d’Alain Terzian et du conseil
d’administration des Césars.
Ce n’était pas assez pour ramener la paix,
puisque genres et générations restaient di­

visés par les 12 nominations reçues par J’ac­
cuse, de Roman Polanski, convaincu de viol
aux Etats­Unis, accusé du même crime par
cinq autres femmes. Même sans disposer
de la très mystérieuse liste électorale de
l’académie des Césars, on peut supposer
que la victoire du réalisateur de J’accuse
dans la catégorie meilleur réalisateur est en
grande partie le fait d’une génération –
celle qui a fait le cinéma français à la fin du
XXe siècle.
La réforme de l’académie des Césars passe
par plus de transparence, aussi bien dans la
composition du corps électoral que dans
les conditions de recrutement des nou­
veaux membres. Mais, contrairement à ce
qui s’est passé aux Etats­Unis, où la réforme
de l’académie des Oscars a été l’œuvre des
professionnels et de leurs organisations,
celle des Césars est passée sous l’autorité de
l’Etat, en l’occurrence du Centre national du
cinéma et de son directeur, Dominique
Boutonnat. Celui­ci a par ailleurs engagé un
vaste chantier qui veut passer en revue
tous les mécanismes, financiers et institu­
tionnels, sur lesquels repose le cinéma
français. Dans ce cadre, la refonte des Cé­
sars ne serait qu’un élément d’une straté­
gie plus vaste, visant à rationaliser, à renta­
biliser, un cinéma français souvent jugé
trop dispendieux. Aller dans cette direction
aboutirait à transformer le traditionnel re­
pas de famille en assemblée générale des
actionnaires.

« DARK WATERS » 


RACONTE L’HISTOIRE 


D’UNE CONTAMINATION 


MONDIALE QUI EST 


MÉCONNUE


RÉPARER


LES FRACTURES 


DES CÉSARS


PLANÈTE | CHRONIQUE
pa r s t é p h a n e f o u c a r t

Perfluorés


en eaux troubles


CES SUBSTANCES 


SONT ASSOCIÉES 


À DES PATHOLOGIES 


THYROÏDIENNES, 


DES CANCERS, 


DES TROUBLES 


DE LA FERTILITÉ 


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Brexit plus dur qurespectée.dalités de ce départ, conclujeudi 17 octobreprévoit une rupture nette, unquiavait étéL’accorvendu aux élec­dsur les mo­àBruxelles,ecelui, flou,
teurs. Mais, faced’un«nodeal»,àlamil représenteenace
sea­un
tanni­isé
Brireunrepoqueceà5spécpréseuristanniqntleconhecctée.euL’ol1,9uetinensdlectif.accoel%,negrrdleeqteréttsurttdoesMauionitêtreris,radulesil’eac­UEitsmo­
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teurs.Mais,faceàlamenace
DIMANCHE 27FOND2,80 €DIRECTEURATEUR–F-LUNDI 28 OCTOBRE 2019:HRANCE MÉTROPOLITAINEUBER (^75) :JÉRÔME FENOGLIOWWW.LEMONDE.FR –ANNÉE– NETBEUVE-MÉRY 23264 O
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Chômag▶le nombrAu troisième trimestre,ededemandeurse:l’espoir d’une amélioration durable
d’emploi sans aucune acti­selon les chiffres publiésvité adiminuvendredi 25octobreéde0,4%,de chômeurs se confirmedoucement. Il s’agitdu quatrièmdécrue est nette,▶de baisse. Sur un an, laLe reflux du nombreetrimestreà–2,4%▶soutenuedu trad’unedes Urssafla bonne sanCesrésult«augmentationvail.Jeudi, leafait état»des CDIats font écho àté du marchéréseaugile dans une conjoncture▶plan gouàcettebaisse, encointernationale incertaineformation contribuLa monvernemental detéeenrégime dure fra­eaussiàlaf in du▶l’objectif d’un taux dechômagPAjugent atteignableGE 10L’exécutif et sa majoritéeramenéquinquennatà7%
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▶dans le Nord­Estmarque un coup d’arrêtau projet politique dupeuple apatrideL’offensive turquesyrien
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SYRIEIRAK (^1) PAÉTERNELPOGE 30 UR­CÉDITSLOMPORIALTEAISSÉS­

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