Libération - 22.02.2020

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Libération Samedi 22 et Dimanche 23 Février 2020 u 55


soit environ 60 kg à éplucher, dé-
couper et cuisiner selon une recette
secrète. Tout juste souffle-t-il qu’il
pare les oignons selon plusieurs
épaisseurs pour qu’une fois cuits, il
y ait «à la fois du mou et du cro-
quant». Le bouillon est fait maison,
avec un os à moelle «pour la note de
gras». La soupe est maintenue à
température afin d’être servie en
quelques minutes, gratinée à l’em-
mental râpé. «Pas de vieilles croûtes
chez nous !», insiste Christophe
­Lemaire. Sur sa lancée, le chef indi-
que, pour ceux qui voudraient réga-
ler 4 à 6 convives, la proportion
de 300 grammes d’oignon, à dégla-
cer au vin blanc, pour 1 litre de
bouillon de bœuf. Et, définitive-
ment, de «ne pas faire l’impasse sur
l’os à moelle».
Epaisse, presque crémeuse, la soupe
façon Pied de cochon, servie dans
un bol, nappe la cuillère. Douce en
bouche et assez réconfortante pour,
effectivement, en faire tout un plat.
En 2020, elle plaît autant aux fê-
tards qui viennent de faire la ferme-
ture des boîtes de nuit et qui s’ins-
tallent en terrasse sur les coups
de 5 heures du matin, qu’aux touris-
tes asiatiques, «habitués à manger
des soupes dès le petit déjeuner», re-
marque Christophe Lemaire.
Pour accompagner la gratinée, le
maître d’hôtel Guy Legrandidier
conseille habituellement un verre
de beaujolais blanc, «ou pourquoi
pas une bière, mais un verre de
beaujolais blanc, ça fait tout de
même plus français, non ?»•

(1) 31, avenue George-V (75008).
(2) 6, rue Coquillière (75001).

gnon (9,50 €) et ce, 24 heures sur 24.
Quand Christophe Lemaire, qui a
fait ses classes chez Joël Robuchon
ou encore au Ritz, a repris en 2016
les cuisines pour donner un nou-
veau souffle à l’institution qui pi-
quait du nez, il avait bien en tête la
limite imposée : «Pas touche à la
gratinée !» Et pour cause : le plat re-
présente 20 % des commandes. Le
premier chef de partie Ange-Honoré
Chevalier prépare ainsi tous les
deux jours, et ce depuis plus de
vingt ans, sa ­ «tournée» d’oignons,

Vu dans la newsletter
«Tu mitonnes»

Les péchés mignons de... Nelson Mandela
(1918-2013), ancien président d’Afrique du Sud,
prix Nobel de la paix en 1993.


  • Ragoût de queue de bœuf

  • Tripes

  • Dinde à l’orange

  • Poulet

  • Paella

  • Choux de Bruxelles au citron

  • Salade de riz et mangues

  • Soupe

  • Maïs et gros haricots

  • Glaces

  • Pudding, crème anglaise

  • Porridge de maïs au lait suri (fermenté)
    Source : Ukutya kwasekhaya (cuisine maison), saveurs de la cuisine de
    Nelson Mandela, par sa cuisinière Xoliswa Ndoyiya (2011).


A retrouver également dans la newsletter «Tu mitonnes»,
envoyée chaque vendredi aux abonnés de Libération :
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des adresses, la recette du week-end...

Au Pied de cochon
à Paris, le 18 février.
Le restaurant propose
depuis les origines
sa gratinée à l’oignon
et ce, 24 heures sur 24.

couleurs, du ­caramel clair
au brun ambré. En bouche, la ten-
dre bille éclate sous la dent, laissant
échapper un jus ultra-condensé
d’oignon. Un plat taquin, sensuel,
qui surprend et amuse. On laisse
échapper un petit «Oh !». On dirait
«un plat canaille» si l’on n’était pas
dans un palace, comme pour les
«Spaghetti debout en gratin» (jam-
bon de Paris, champignons, truffe)
d’un chef qui bouscule les codes en
jouant la carte du régressif mâtiné
d’élégance. La recette de cette grati-
née est secrète, on apprendra juste
que les oignons des Cévennes cui-
sent et réduisent pendant quarante-
huit heures, le temps de rendre leur
substantifique moelle. Et que l’on
doit bien parler de «gratinée», les
billes renfermant une touche de
parmesan. Cette ­entrée est servie
avec un Madère Verdelho «half dry»
(demi-sec), minimum 30 ans d’âge,
pour souligner la note sucrée de l’oi-
gnon et dont la couleur a l’exacte to-
nalité du jus qui s’échappe des
billes. «C’est Eric Beaumard, le som-
melier et directeur du Cinq, qui a
trouvé cet accord. Et c’est peut-être
l’une de nos plus belles composi-
tions», précise le chef.

«Pas touche». Si nos touristes ont
plus de «chances» de goûter une
gratinée réhydratée et colmatée aux
restes de fromages qu’à la soupe si-
gnée Le Squer, ils peuvent aller les
yeux fermés au Pied de cochon (2),
établissement ouvert en 1947, un des
derniers vestiges des anciennes
Halles, déménagées à Rungis
en 1969. Le restaurant propose de-
puis les origines sa gratinée à l’oi-

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