Les Echos - 24.02.2020

(lily) #1

22 // ENTREPRISES Lundi 24 février 2020 Les Echos


l’an dernier, du jamais-vu » , se félici-
te-t-il.

Survie non garantie
Reste que le constructeur des fréga-
tes, des sous-marins e t du porte-avi-
ons de la marine française ne pour-
rait survivre sans l’exportation. Or
la concurrence est de plus en plus
rude avec l’arrivée de nombreux
nouveaux entrants. D’o ù les avertis-
sements répétés d’Hervé Guillou
sur l’impossibilité de garantir le
futur du groupe à moyen terme,
sans une c onsolidation e uropéenne

la construction navale, rebaptisés
« Naval Group », ont changé
d’image et de rang avec l’obtention
inespérée en 2016 du contrat de
construction de 12 sous-marins
pour l’Australie.
Aujourd’hui, l’entreprise ne
compte ainsi plus que 1.700 con-
trats d’o uvriers d’Etat sous statut
public sur un total de 15.168 salariés.
Elle est devenue « un champion
industriel » , plaide Hervé Guillou,
qui se félicite du changement de
culture : « A Cherbourg, nous avons
reçu 11.700 candidatures spontanées

de la marine française (5 bateaux
commandés) a démarré, t andis qu’à
Saint-Tropez, le groupe a mis au
point des nouvelles torpilles qui
seront livrées au Brésil et à la
France. A l’exportation, le groupe
espère conclure rapidement la
vente de deux n ouvelles f régates à l a
Grèce.
A un mois de son départ, Hervé
Guillou souligne que le principal
défi au sein de Naval Group aura été
de maintenir un très haut niveau de
compétence. Sous sa houlette, les
anciens arsenaux, ex-Direction de

50 millions d’euros a porté sur la
construction de trois nouveaux
bâtiments de 33.000 mètres carrés,
dont la livraison est intervenue en
février 2019.

No uveaux bâtiments
Depuis le mois d’avril, un millier de
personnes du site sur les
1.500 emplois totaux ont été transfé-
rées vers les nouveaux bâtiments. Le
premier est dédié à l’entretien et à la
réparation des moteurs, le second à
la réparation des pièces et des com-
posants. « L’objectif est de réduire de
30 % le délai moyen de maintenance,
réparation, révision d’un moteur qui
passe de 50 jours à 35 jours pour
notre gamme Arrius, grâce à de nou-
veaux moyens industriels et de nou-
veaux process. Sur notre ancien site,
un moteur parcourait environ 5 kilo-
mètres. C’est désormais 500 mètres »,
précise Franck Saudo.
Le deuxième bâtiment est consa-
cré à la réparation des pièces pour le
compte de tous les autres sites, tan-
dis que le troisième est dédié au pilo-
tage de toutes les activités de mainte-

nance dans le monde. « C’est depuis
ce centre que nous surveillons
nos 21.000 moteurs en service dans le
monde », p récise Franck S audo. Avec
1.600 moteurs motorisant 550 héli-
coptères, l’Etat français est le pre-
mier client de l’industriel. Une cen-
taine de ces moteurs passent chaque
année dans les locaux de Tarnos au
terme d’un contrat de maintien en
condition opérationnellle (MCO),
qui arrive à son terme en 2022.
Safran Helicopter Engines se tar-
gue ainsi « d’assurer depuis douze
ans un taux de service de 100 % » de

tous les moteurs d’hélicoptères des
Forces. « Je suis bluffé. Jusqu’à pré-
sent, personne n’avait réussi à faire
cela », a avoué Florence Parly, dont
l’objectif reste l’amélioration de la
faible disponibilité des avions et des
hélicoptères. « Nous enregistrons de
premiers résultats, mais cela pren-
dra encore du temps », a confié la
ministre.
Outre la simplification des procé-
dures avec les industriels, l’armée
veut s’appuyer sur le numérique
avec le projet B rasidas v isant à déve-
lopper un système informatique
logistique unique. « Une première
notification sera passée d’ici à la fin
2020 avec le lancement d’un dévelop-
pement en mode agile pour un pre-
mier résultat dix-huit mois après », a
déclaré aux « Echos » Monique
Legrand-Larroche, qui dirige la
Direction de la maintenance aéro-
nautique. D’ici là, une deuxième
tranche de travaux de 9,5 millions
d’euros devrait être lancée à Tarnos
pour la construction d’un nouvel
atelier dédié à la fabrication de piè-
ces neuves.n

« Sur notre ancien
site, un moteur
parcourait environ
5 kilomètres.
C’est désormais
500 mètres. »
FRANCK SAUDO
Président de SHE

du secteur naval. Au cours des dix
années passées, l’Europe a cons-
truit 80 bateaux militaires avec
12 acteurs, quand la Chine en réali-
sait 136 avec un seul groupe, la Rus-
sie 68 avec une entreprise et les
Etats-Unis 78 avec deux construc-
teurs, explique-t-il.
Malgré une main tendue, Hervé
Guillou n’est pas parvenu à enclen-
cher cette rationalisation. Tout
juste a-t-il porté sur les fonts baptis-
maux, un joint-venture « Naviris »
avec le constructeur naval italien
Fincantieri, qui doit désormais faire
la preuve de sa volonté ou non de
gagner des marchés à l’exportation
au nom des deux entreprises nava-
les. Thales, actionnaire à 35 % de
Naval Group, n’a jamais réellement
adhéré au projet.
Ce sera au nouveau président,
Pierre-Eric Pommellet, qui entrera
en fonction le 24 mars prochain, de
faire vivre ou non l’initiative qui doit
être reconfirmée la semaine pro-
chaine lors du sommet franco-ita-
lien du 27 février. Une autre piste de
rationalisation pourrait être de pro-
fiter de la création de la politique de
défense commune : Naval Group a
inscrit dans les projets prioritaires
la réalisation d’une corvette com-
mune, à laquelle la Grèce et l’Espa-
gne seraient intéressés.n

Anne Bauer
@annebauerbrux

Mission accomplie, estime le PDG
de Naval Group, Hervé Guillou, qui
à bientôt 65 ans s’apprête à céder
après un mandat de cinq ans la pré-
sidence du groupe de construction
navale militaire à Pierre-Eric Pom-
mellet, directeur général, en charge
des opérations chez Thales. Il y a
cinq ans, le président devait redres-
ser en urgence une entreprise qui
avait accusé une perte de 336 mil-
lions d’euros en 2014 et disposait de
tout juste deux mois de salaire en
trésorerie.
Fin 2019, le numéro un européen
de la construction navale militaire
affiche un chiffre d’affaires de
3,7 milliards d’euros, une marge
opérationnelle de 7,6 % et un résul-
tat net consolidé, part du groupe de
188,2 millions.
Ses prises de commandes ont
atteint un niveau record de 5,3 mil-
liards d’euros, en partie grâce à la
notification par l’Etat du contrat
pour un sixième s ous-marin
nucléaire d’attaque et grâce à la
vente de douze chasseurs de mines
à destination des marines belge et
néerlandaise. Avec un carnet de
commandes de 15 milliards d’euros,
Naval Group dispose ainsi d’une
visibilité d’environ quatre années
de chiffre d’affaires.

11.700 candidatures
Dans quelques jours, Naval Group
s’apprête à mettre à la mer le « Suf-
fren », le premier des nouveaux
sous-marins Barracuda de la
marine française. Une étape cru-
ciale pour vérifier les performances
du nouveau sous-marin nucléaire
d’attaque français. A Lorient, la
construction des nouvelles frégates

DÉFENSE


Fin 2019, le construc-
teur naval militaire
affiche une rentabilité
opérationnelle de 7,6 %
et un carnet
de commandes équiva-
lent à quatre ans
de chiffre d’affaires.

Son PDG, Hervé
Guillou, laisse à son
successeur une entre-
prise en bonne santé.

Naval Group engrange


un record de commandes


Hervé Guillou, PDG de Naval Group, devant le « Suffren », le premier des nouveaux sous-marins
Barracuda de la marine française, avant sa cérémonie de dévoilement le 12 juillet 2019, à Cherbourg.

Frank Niedercorn
@FNiedercorn
— Correspondant à Bordeaux

Adieu, les vieux bâtiments datant
des années 1960, bonjour le Cam-
pus Industrie Cap 2020. Safran
Helicopter Engines (SHE) a inau-
guré à Tarnos vendredi, en pré-
sence de Florence Parly, ministre
des Armées, son nouveau site dédié
à la maintenance des moteurs
d’hélicoptère. L’usine construite en
1964 par Turboméca, devenu
Safran Helicoptere Engines en

AÉRONAUTIQUE


L’ industriel modernise
son site de Tarnos,
dédié à la réparation
des moteurs
d’hélicoptère.

Il veut réduire de 30 %
la durée du cycle
de réparation.

Safran Helicopter Engines investit 50 millions


d’euros dans son usine de Tarnos


2016, avait aussi pour mission de
revitaliser le territoire suite à la fer-
meture des Forges de l’Adour.
Le site s’est petit à petit spécialisé
dans la maintenance des moteurs
d’hélicoptère. Des moteurs que
l’industriel fabrique à une centaine
de kilomètres de là, dans son usine
de Bordes, à côté de Pau, où il a
investi 100 millions d’euros en 2010
et qui emploie 2.500 personnes.
« Safran Helicopter Engines est le lea-
der mondial des moteurs d’hélicop-
tère, avec 2.500 clients et un de nos
moteurs décollant toutes les 9 secon-
des quelque part dans le monde »,
explique Franck Saudo, le président
de Safran Helicopter Engines.
Outre l’usine de Tarnos – « notre
vaisseau amiral pour la réparation e t
l’entretien et la plus moderne du
monde », insiste Franck Saudo –,
l’entreprise possède trois autres
sites dédiés à la maintenance : au
Texas, au Brésil et en Australie.
Safran Helicopter Engines
répare 1.500 moteurs par an,
dont 650 pour la seule usine de Tar-
nos. Le projet de modernisation de

à suivre


Lactalis atteint


les 20 milliards


d’euros


PRODUITS LAITIERS L actalis
a atteint les 20 milliards
d’euros de chiffre d’affaires
(+8 %) lors de son exercice
2019 et va i nvestir 200 millions
d’euros « tous les ans » dans
ses 70 sites français, a indiqué
son PDG Emmanuel Besnier
dans un entretien au « Journal
du Dimanche ». L’exercice
2020 sera, lui, compliqué par
l’épidémie de coronavirus en
Chine. Les containers à desti-
nation de la Chine sont « blo-
qués »
et les ventes pour le
mois de mars « sont annu-
lées »
. En France, le groupe
sait déjà « qu’il n’obtiendra pas
tout ce qu’il souhaitait »
de la
distribution en matière de
tarifs. En 2020, Lactalis devra
intégrer les neuf acquisitions
faites en 2019.


Œufs : 60 % des


ventes issues de


poules en liberté


AVICULTURE Les œufs de
poules en liberté représentent
désormais la majorité des
ventes en grandes surfaces (6
sur 10 contre un sur deux en
2018), selon l’interprofession
(CNPO). Le plein air et le label
rouge arrivent en première
position à 33 % des parts de
marché, suivis par le bio, qui
totalise un cinquième du mar-
ché puis des œufs issus de
poules élevées au sol (par
opposition aux cages) avec
7 %. Même les ovoproduits
(40 % des œufs) destinés à la
restauration hors domicile et
aux industries agroalimen-
taires suivent cette tendance.
Pour mettre un terme au mas-
sacre des poussins mâles (qui
ne pondront pas) la filière
investit et expérimente le
sexage in-ovo (dans l’œuf).


Agriculture :


Macron exclut


de revaloriser les


pensions actuelles


AGRICULTURE Emmanuel
Macron, président de la
République, a exclu, en visi-
tant le Salon de l’Agriculture,
de revaloriser le niveau des
pensions agricoles actuelles à
85 % du SMIC, comme cela est
prévu dans le futur système.
« Cela coûterait 1,1 milliard
d’euros »
, selon le chef de
l’Etat. Le président a laissé la
porte ouverte à une possibi-
lité d’ « améliorer les choses »
via la loi de financement de la
Sécurité sociale. Le gouverne-
ment a confié une mission au
député LREM du Lot-et-Ga-
ronne, Olivier Damaisin, sur
le suicide agricole.


Création en duo


chez Prada


MODE Prada a annoncé
dimanche q u’à partir d u 2 avril
2020, sa styliste emblémati-
que Miuccia Prada (71 ans en
mai) coopérera avec un codi-
recteur créatif, le Belge Raf
Simons. C’est la première fois
que la maison italienne
s’adjoint un talent extérieur
pour codiriger ses créations.
Raf Simons (52 ans) a travaillé
pour Jil Sander, Dior puis Cal-
vin Klein, et a créé sa propre
marque, Raf by Raf. Il tra-
vaillera en collaboration
étroite avec Miuccia Prada sur
les collections et tous les pro-
cessus créatifs de Prada. Leur
première collection com-
mune sera dévoilée en sep-
tembre durant la Fashion
Week milanaise des défilés
printemps-été 2021.


Les chiffres clés


3 , 7

MILLIARDS D’EUROS
Le chiffre d’affaires
du numéro un européen
de la construction navale
militaire en 2019.

336

MILLIONS D’EUROS
La perte de Naval Group,
en 2014. L’entreprise dispo-
sait de tout juste deux mois
de salaire en trésorerie.

5 , 3

MILLIARDS D’EUROS
Le niveau record des prises
de commandes du groupe.

AFP
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