Les Echos - 24.02.2020

(lily) #1
1,16 million d’abonnés au qua-
trième trimestre. Mais la baisse est
générale : sur la même période,
Comcast a vu partir 149.000 clients
et Charter 101.000. L’opérateur
satellite Dish a, lui, perdu 85.000
abonnés, Verizon 51.000 et Altice
USA 44.000.
Selon les analystes, le rythme
pourrait encore s’accélérer cette
année. Les prix de la télévision
payante, déjà très élevés aux Etats-
Unis – en moyenne, un foyer
dépense plus de 100 dollars par
mois – continuent d’augmenter.
Comcast a déjà prévenu, par exem-
ple, que sa facture moyenne aug-
menterait de 3,6 % cette année,
après une hausse de 3,3 % l’an der-
nier. Altice USA, de son côté, a
reconnu une hausse de 4 à 5 %,
supérieure à la moyenne de ces der-
nières années, entre 3 % et 3,5 %.
Certains opérateurs doivent en
effet financer de grosses acquisi-
tions, tout en étant confrontés à des
coûts qui ne cessent d’augmenter,
notamment pour les programmes.
Selon le cabinet Kagan, les coûts de
programmation de Comcast, par
abonné, ont augmenté de 19 % ces

du streaming. La baisse accrue de
leurs abonnés au quatrième tri-
mestre correspond au lancement
d’un nouveau service aux Etats-
Unis, Disney+. La plupart des
consommateurs américains ont
désormais une offre suffisamment
variée pour pouvoir se passer d’un
abonnement.

Course aux contenus
Les o pérateurs se sont préparés à
ce changement de modèle. Ils sont
derrière deux des offres de strea-
ming qui vont se lancer cette année
(HBO Max, de Warner, filiale de
AT&T, et Peacock de NBCUniver-
sal, filiale de Comcast). NBCUniver-
sal serait par ailleurs engagé « dans
des discussions avancées » , selon le
« Wall Street Journal », pour acqué-
rir la plateforme de streaming
vidéo Vudu, propriété du géant de
la distribution Walmart.
Une stratégie similaire à celle du
groupe Fox, qui serait, lui, « en négo-
ciation » et prêt à débourser
500 millions de dollars, toujours
selon le quotidien américain, pour
mettre la main sur la plateforme de
streaming gratuite Tubi. n

Aux Etats-Unis, la télé payante en perte de vitesse


Ni colas Rauline
@nrauline
—Bureau de New York

La chute n’en finit pas. Au c ontraire,
en 2019, elle s’est accélérée. Les opé-
rateurs américains de câble et de
satellite ont perdu 6 millions
d’abonnés, soit une baisse de 7 %
par r apport à la fin de l’année précé-
dente. Sur le quatrième trimestre,
ce sont 1,5 million de foyers qui ont
rompu leur abonnement à un ser-
vice de télévision, ce qui fait baisser
le nombre total d’abonnés à 83 mil-
lions. Alors que le taux de pénétra-
tion de la télévision payante était à
son plus haut niveau en 2009, avec
87,8 % des foyers abonnés selon
Moffett Nathanson, il est désormais
tombé à 65,3 %. L’opérateur le plus
touché est AT&T, qui a perdu

Les opérateurs du câble
et du satellite ont perdu
6 millions d’abonnés
l’an dernier. Le rythme
s’est accéléré, sous l’effet
des hausses de prix
et de la concurrence
du streaming.

européens de l’animation derrière
« Oggy et les cafards » ou « I lost my
body » (nommé aux Oscars) s’attend
à ce que Netflix, Amazon Prime
Video, etc. représentent plus de la
moitié de ses ventes en 2021, contre
43 % aujourd’hui.
« L’animation est un vecteur pour
retenir les abonnés et a un potentiel à
l’international » , explique Marc du
Pontavice, son président-directeur
général. De nouvelles obligations de
financement introduites par la
réforme audiovisuelle vont, par
ailleurs, booster le marché en
France. Xilam s’attend ainsi à un
quasi-doublement des investisse-
ments dans l’animation, rien qu’en
audiovisuel, à une trentaine de mil-
lions d’euros en 2021. Ces messages
martelés par Xilam, après la publi-

cation d’un revenu 2019 décevant,
n’ont pas suffi à rassurer les marchés
qui ont sévèrement sanctionné le
groupe jeudi. L’action Xilam a ainsi
perdu 7,6 %, après avoir chuté de
près de 14 % en séance.
Les investisseurs ont été refroidis
par un chiffre d’affaires qui n’a

atteint que 30 millions, en hausse
certes, mais inférieur aux attentes
des analystes. C’est surtout le recul
des revenus issus du catalogue qui a
pesé. Il est dû à un décalage de la
signature de contrats avec des chaî-
nes de télévision sur quelques séries
phares et aux ventes aux platefor-
mes de streaming. Car le revers de la
médaille c’est qu’en prenant des
droits sur plusieurs années et plu-
sieurs territoires, ces plateformes
réduisent, de fait, les droits disponi-
bles du catalogue de Xilam.
Même si les plateformes peuvent
faire de gros chèques, comme en
témoigne « Oggy Oggy » avec un
budget de 20 millions de dollars
pour deux saisons, vendu à Netflix.
« Dans le passé, on n’imaginait pas
des contrats aussi importants » ,

assure Marc du Pontavice. A l’avenir,
Xilam s’attend à une forte progres-
sion de ses revenus : 78 millions en
2020-2021, soit une hausse de 23 % ;
puis 110 millions en 2022-2023, soit
un bond de 41 %.
Là encore, ces chiffres déçoivent.
« On aurait espéré des perspectives
encore plus élevées », indique Babi-
chanth Kulasingham, analyste chez
Louis Capital Markets, qui vient
d’abaisser sa recommandation sur
Xilam. Mais il relativise : « Il y a aussi
des prises de bénéfices, Xilam ayant
beaucoup monté ces derniers mois. »

Les jeunes adultes ciblés
Le groupe considère que les acteurs
du streaming vont lui permettre de
développer l’animation pour les jeu-
nes adultes, u n futur l evier. Et il réflé-

chit à développer une activité pour le
compte d’autres studios, comme il
vient de le faire pour Disney. « C’est
un relais de croissance apportant de
fortes marges à notre modèle, qui est
fondé sur la détention des droits de
propriété de nos marques. »
Une croissance externe n’est pas
exclue rapidement. Le groupe,
qui avait tenté de mettre la main sur
Gulli, finalement racheté par M6,
recherche plutôt des petits studios,
en Europe, comme Cube, sa der-
nière emplette. « Mais, on peut lever
plus de 30 millions d’euros, si on le
souhaite. » Parallèlement, Xilam
espère aussi des revenus de mer-
chandising. « Oggy Oggy a été pensé
dans la logique de faire des produits
dérivés », souligne son patron.
— M. A.

Xilam compte bien profiter du
boom des plateformes de streaming
type Netflix à l’avenir, après une
année 2019 qui a déçu les investis-
seurs. Le groupe, l’un des leaders


ANIMATION


La société, qui a produit
« Oggy et les Cafards »,
espère tirer profit
de la demande crois-
sante des plateformes.


Jeudi, les investisseurs
ont sanctionné
des revenus en deçà
des attentes.


Xilam s’attend à une forte croissance, après avoir déçu en 2019


« L’animation
est un vecteur pour
retenir les abonnés
et a un potentiel
à l’international. »
MARC DU PONTAVICE
Président-directeur général
de Xilam

Marina Alcaraz
_@marinaalcaraz


A quelques semaines de l’examen
du projet de loi audiovisuelle par
l’Assemblée nationale, les chaînes
de télévision ne décolèrent pas. La
tension est remontée d’un cran,
alors que circule une nouvelle
mouture de projets de décrets cen-
sés alléger la réglementation en
matière de publicité. « Alors que la
concurrence des plateformes se fait
de p lus en plus intense, on a vait quel-
ques espoirs que l es décrets p rennent
en compte nos demandes. Or, il n’y a
aucune amélioration »
, juge un
patron de chaîne.
Invitées à un déjeuner avec
Franck Riester, le ministre d e la Cul-
ture, vendredi, rue de Valois à Paris,
plusieurs chaînes privées ont fait
valoir leurs arguments. Leur mes-
sage principal : à trop poser de
conditions, on étouffe les allége-
ments de réglementation qui sont
proposés. Elles pointent, par exem-
ple, les freins à la publicité segmen-
tée (personnalisée en fonction de
l’individu), et géolocalisée, qui a été
limitée à deux minutes par heure en
moyenne, et ne permet pas d’affi-
cher l’adresse physique des com-
merces lorsqu’elle est c iblée géogra-
phiquement. Elle est également
soumise au règlement européen
sur les données personnelles...


50 % de films européens
« Nous s ommes t rès inquiets
d’un projet de recommandation d e la
CNIL relatif au ciblage : le consente-
ment du t éléspectateur pour avoir d e
la publicité adressée, chaîne par
chaîne, semblerait nécessaire...
Qu’est-ce que cela va d onner pour un
abonné avec 200 chaînes!
», s’étran-
gle Antoine Ganne, délégué en
charge des affaires publiques du
SNPTV (Syndicat national de la
publicité télévisée) r eprésentant les
principales régies.
« Si la recommandation de la
CNIL n’est pas modifiée, c’est une
grande partie des revenus potentiels
de l a publicité s egmentée q ui s’envole
en fumée,
ajoute un spécialiste
d’une c haîne de télévision. D’autant
que les G afa, eux, n ’ont p as autant de
contraintes. »

L’ouverture de la publicité sur le
cinéma à la télévision, aujourd’hui
interdite, pose également pro-
blème, telle qu’elle est proposée.
Concrètement, demain, si une
chaîne veut diffuser de la publicité


pour des blockbusters, elle se voit
obligée de réserver aussi une place
pour les petits films. Le dispositif
leur impose ainsi 50 % de films
européens à petit budget (jusqu’à
5 millions d’euros).
« Le problème c’est que les petits
films ne seront pas les plus deman-
deurs de publicité sur les grandes
chaînes. Il faudra être habile pour les
trouver, et, sans doute, consentir à
d’importantes remises... », observe
un bon connaisseur. Il semble en
outre difficile pour les régies d’avoir
des « quotas de vente ». « Les plate-
formes digitales (Google, Facebook
notamment, NDLR), elles, n’ont pas
de quota », relève le SNPTV.
Les professionnels disent n’atten-
dre de ces mesures que quelques
millions de revenus supplémentai-
res. Pour le SNPTV, les régies seront
incitées à ne prendre que de gros
films, ou de très petits pour remplir
leurs quotas, quitte à délaisser les
films à budgets moyens.

Autre grief : le très sensible sujet
de la répartition entre production
dépendante (en interne chez les
chaînes) et indépendante (le
recours à des producteurs exté-
rieurs) ; et surtout les droits de pro-
priété sur les œuvres. Ces questions
doivent faire l’objet d’un accord
entre les télévisions et les produc-
teurs, mais en cas d’échec, c’est un
décret qui s ’appliquerait. Or, celui-ci
définirait alors la production indé-
pendante de manière plus stricte et
abaisserait la durée des droits par
rapport à ce qui existe dans plu-
sieurs contrats aujourd’hui...
Les chaînes de télévision vont
pouvoir faire valoir leurs argu-
ments auprès du CSA. Le ministre
de la Culture ne semble pas vouloir
modifier les textes. Vendredi,
Franck Riester a rappelé que le pro-
jet de loi et les décrets associés
répondaient déjà à de nombreuses
attentes des chaînes et qu’il devait
veiller à un équilibre pour l’ensem-
ble du secteur des médias.n

lLes chaînes de télévision pointent du doigt des projets de décrets censés alléger la réglementation en matière


de publicité et permettre notamment la publicité ciblée ou pour le cinéma.


lElles estiment qu’elles n’en retireront pas grand-chose.


Publicité : les chaînes de télévision déçues


des allégements réglementaires à venir


AUDIOVISUEL


La chaînes pointent,
par exemple, les
freins à la publicité
segmentée, c’est-à-
dire personnalisée,
et géolocalisée,
qui a été limitée
à deux minutes par
heure en moyenne.

Lors d’un déjeuner avec des dirigeants de chaînes privées, vendredi, le ministre de la Culture, Franck Riester, a rappelé que le projet de
loi et les décrets associés répondaient déjà à de nombreuses attentes et qu’il devait veiller à un équilibre pour l’ensemble du secteur.

XavierLeoty/AFP

trois dernières a nnées. Ceux
d’Altice USA de 22 %. Les opéra-
teurs espèrent que ces hausses
compenseront les départs inévita-
bles d’un certain nombre de clients.
Ils pensent aussi que certains télés-
pectateurs ne se passeront pas de
leur abonnement. Les fans de sport,
par exemple, ne pourraient pas
retrouver ailleurs les offres propo-
sées sur le câble ou le satellite, qui
incluent souvent ESPN, Fox Sports,
NBC Sports et des chaînes locales.
Aucune offre de streaming ou
aucun autre bouquet sur Internet
ne dispose de droits aussi étoffés.
Mais le sport pourrait bien
demeurer l’une des dernières
niches d es o pérateurs. Sur d’autres
segments, en effet, ils font face à la
concurrence d e plus en plus féroce

100

DOLLARS
La dépense mensuelle moyenne
d’un foyer américain pour
accéder à la télévision payante.

HIGH-TECH & MEDIAS


Lundi 24 février 2020 Les Echos

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