Les Echos - 03.03.2020

(Dana P.) #1

Les Echos Mardi 3 mars 2020 ENTREPRISES// 19


Philippe Bertrand
@Bertra1Philippe


Je an-Charles Naouri a tenu son
calendrier. Le dirigeant et proprié-
taire de Rallye et de ses holdings de
tête avait annoncé vouloir sortir de
la procédure de sauvegarde en
mars au plus tard. Le tribunal de
commerce de Paris a accepté son
plan de refinancement vendredi.
La procédure avait été enclenchée
le 23 mai 2019 en raison de l’endet-
tement des quatre sociétés contrô-
lées par le patron du groupe C asino,
Rallye, Foncière Euris, Finatis et
Euris. Elle avait été prorogée à la fin
de l’année pour six mois.
Rallye retrouve sa liberté
d’action et se met à l’abri pour trois
ans, les premières grosses échéan-
ces de remboursement intervenant
le 28 février 2023, soit 1,2 milliard
d’euros pour Rallye. Le plan a été
publié le 10 décembre. Il prévoit


l’étalement du remboursement des
3,29 milliards d’euros de dettes
cumulées (2,9 milliards d’euros
pour Rallye, 137 millions pour Fon-
cière Euris, 135 millions pour Fina-
tis et 95 millions pour Euris). Les
créances des banques sont nanties
sur des actions de Casino, le groupe
de distribution, principal actif de
Rallye, qui possède 51 % de son
capital. Les établissements finan-
ciers, à la tête desquels figure BNP
Paribas, acceptent d’être rembour-
sés à 85 % au bout de trois ans et du
solde la quatrième année. S’ils
avaient refusé, ils n’auraient été
remboursés qu’en dix ans.

Nantissement
en deuxième rang
Le détail du dispositif est plus com-
plexe. Les banques qui choisissent
le remboursement en trois-quatre
ans acceptent que les actions
Casino soient nanties en deuxième
rang. Cela permet à Jean-Charles
Naouri de lever une dette supplé-
mentaire en donnant à nouveau
ces titres en garantie de façon pro-
portionnelle à la remontée du
cours de Casino. Celui-ci était de
29,85 euros lors de l’entrée en sau-
vegarde. Il est remonté à près de
35 euros vendredi.
L’objectif est de chercher des
investisseurs afin de racheter les
créanciers obligataires qui possè-
dent 1,6 milliard de dette. Ces der-
niers sont dans une situation plus
inconfortables que les banques. Le

plan de refinancement ne leur pro-
pose que d’être remboursés sur dix
ans, avec le paiement de 65 % de
leur créance lors de la dernière
année. Le communiqué publié
lundi précise que Rallye a renforcé
ses liens avec EP Investment, entité
contrôlée par Daniel Kretinsky. Le
Tchèque, qui est entré dans le capi-
tal de Casino à hauteur de 5,64 %, a
accordé une ligne de financement
de 233 millions d’euros pour refi-
nancer une partie des 331 millions
de dérivés. Cette ligne peut assurer
aussi les opérations courantes de
rally à hauteur de 15 millions. Ce
crédit est garanti par une fiducie
portant sur 8,73 % du capital de
Casino...
Les administrateurs judiciaires
avaient accepté le plan. La majorité
des obligataires l’ont rejeté, mais
leur avis n’était que consultatif,
comme celui des banquiers qui
l’ont, eux, approuvé à 100 %.

Cessions d’actifs
Dès le mois de décembre, les ana-
lystes ont souligné les limites du
dispositif de sortie de la sauve-
garde. Même si elles sont étalées,
les dettes doivent être rembour-
sées. Rallye se trouvera en 2023
face à un « mur de dette » de 1,2 mil-
liard d’euros. Les holdings du
groupe Casino disposent de trois
types de ressources : les dividendes
de Casino, la cession de leurs actifs
non stratégiques et différentes
options de refinancement. Rallye et

Foncière Euris p ossèdent d e
l’immoblier. Rallye peut vendre
Go Sport.
« Cela veut dire qu’en 2023 Casino
va devoir distribuer 2 milliards
d’euros de dividendes pour en
remonter la moitié vers Rallye » ,
résumait Fabienne Caron de chez
Kepler Cheuvreux, qui en concluait
que « Casino va donc devoir céder
encore beaucoup d’actifs! » Seule la
cession d’un gros actif permettrait
de verser d es dividendes exception-
nelles. Casino a lancé en août 2019
un nouveau plan de cessions de
2 milliards d’euros à l’horizon 2021
qui suit un programme de 2,5 mil-
liards en cours d’achèvement. La
cession de Leader Price à Aldi est
sur le point d’aboutir pour un gain
compris entre 400 et 600 millions
d’euros. Le groupe est encore pro-
priétaire de Monoprix, Franprix,
Cdiscount et de la grande distribu-
tion en Amérique du Sud.
Rallye rappelle que l’échéance de
2023 pourra être réduite par le refi-
nancement autorisé par l e nouveau
nantissement des actions Casino.
La situation est cependant com-
pliquée par la révision à la baisse
des prévisions de Casino. Le béné-
fice opérationnel des activités fran-
çaises ne progresserait pas pour
2019 de 10 % mais de 5 %. Le distri-
buteur publie ses résultats annuels
le 26 mars.

(


Lire également « Crible »
Page 37

DISTRIBUTION


Le tribunal de com-
merce a accepté le
plan de refinancement
élaboré par Jean-Char-
les Naouri.


Daniel Kretinsky
accorde une nouvelle
ligne de crédit.


Rallye sort de la sauvegarde


et se met à l’abri pour trois ans


et les bureaux. La plupart des fonciè-
res, même celles qui sont spéciali-
sées dans le commerce, agissent
désormais comme des aménageurs
urbains. Altarea Cogedim a été pion-
nier en la matière.
Le chiffre d’affaires s’établit à
3,1 milliards d’euros pour 2019 et le
résultat, à 299 millions, en hausse de
9,7 %. Sur le front des centres com-
merciaux, le groupe a livré l’exten-
sion sud de Cap 3000, le mégacom-
plexe de Saint-Laurent-du-Var et la
deuxième tranche de la transforma-
tion de la gare Montparnasse. Alta-
rea Cogedim quitte le terrain des
galeries marchandes d’hypermar-
chés et se concentre, comme son
grand concurrent Unibail-Ro-
damco-Westfield, sur les gros cen-
tres commerciaux, avec en plus le
« travel retail ».
Les loyers versés par les commer-
çants ont progressé de 4 % à périmè-
tre constant, à 191 millions. Le chiffre

d’affaires des enseignes a crû de
4,9 %. « Nous étions arrivés à un point
bas. La fréquentation des centres
commerciaux a redémarré, après les
“gilets jaunes” et malgré les grèves » ,
explique Alain Taravella.

Opération majeure
dans les bureaux
En matière de logement, la société a
vendu plus de 12.000 lots pour
3,27 milliards d’euros. Elle bénéficie
de la hausse du prix de l’immobilier
dans les zones tendues dans lesquel-
les elle est implantée. Le fruit de la
commercialisation est 12 % plus
élevé qu’en 2018 pour 3 % de loge-
ments vendus de plus. « A moyen
terme, si la conjoncture le permet,
nous espérons monter jusqu’à
18.000 lots vendus par an » , affirme le
président d’Altarea.
Pour les bureaux, le groupe a réa-
lisé une opération majeure avec
CNP Assurances. Il a vendu

41.000 mètres carrés d’un nouvel
immeuble à Issy-les-Moulineaux et
a racheté les 56.000 mètres carrés
du siège actuel de l’assureur gare
Montparnasse. « Nous misons aussi
beaucoup sur l’immobilier d’entre-
prise en province , détaille le prési-
dent. Pour leur “back-office”, les
entreprises préfèrent s’installer à
30 kilomètres de Bordeaux où la qua-
lité de vie est bonne pour les salariés
qu’en lointaine banlieue parisienne
où les déplacements sont difficiles et le
logement cher. »
Altarea Cogedim a gagné en 2019,
sur le modèle d’Issy-Cœur de ville et
des réalisations en cours à Bobigny,
en région parisienne, et dans le quar-
tier Guillaumet à Toulouse des pro-
jets mixtes d’aménagement à Cham-
pigny-sur-Marne et à Cannes. Le
groupe a remporté aussi la conces-
sion des zones commerciales de
cinq gares en Italie, à Rome, Milan,
Turin, Padoue et Naples. — P. B.

Le président-fondateur, Alain Tara-
vella, évoque « la belle année 2019 ».
Les résultats que sa foncière Altarea
a publiés lundi après Bourse font
état d’une hausse de 29 % du chiffre
d’affaires. Une rareté par les temps
qui courent. Le dirigeant croit mor-
dicus au potentiel de la transforma-
tion urbaine qu’il qualifie dans le
communiqué publié de « marché
immense »
. Son groupe est l’un des
rares qui combinent les t rois métiers
de la promotion immobilière : les
centres commerciaux, le logement


IMMOBILIER


Le spécialiste de
l’immobilier intervient
de plus en plus comme
un aménageur urbain
avec des projets
« mixtes ».


La foncière Altarea tire profit


de la diversité de ses métiers


Le holding de Casino et ses sociétés faîtières, dirigés par Jean-Charles Naouri, ne paieront l’essentiel de leurs dettes qu’en 2023 et après.


Gilles Rolles/RÉA

Le déploiement de nouvelles
enseignes permet au groupe
d’accélérer sa croissance. Là où
il n’en proposait encore que 2 en
France en 2017, Hilton et Wal-
dorf Astoria, sa marque de luxe
apposée au Trianon Palace de
Versailles, il en compte
aujourd’hui 6, avec Hilton Gar-
den Inn, hôtellerie plutôt stan-
dardisée de niveau 3 étoiles,
Curio Collection, un réseau
d’établissements haut de
gamme et de « caractère »,
Hampton, autre marque stan-
dardisée sur le segment 4 étoi-
les, enfin DoubleTree, autre
enseigne haut de gamme.
Le mouvement se poursuit
cette année avec l’introduction
de deux nouvelles enseignes de
boutiques-hôtels, Tapestry Col-
lection et Canopy, avec pour
l’une et l’autre une ouverture
dans l’ouest de Paris.

Acteur national
Av ec un portefeuille de 18 mar-
ques au total, Hilton ne compte
pas en rester là. Il se dit « très
désireux » de déployer sa mar-
que Motto – lancée en 2018 – , une
hôtellerie « life style » avec des
chambres de petite taille qui la
rende « plus abordable ».
Ceci étant, l’essentiel du déve-
loppement du groupe hôtelier
s’effectuera à travers Garden I nn
et Hampton, de manière à cou-
vrir le gros de la demande.
L’américain se positionne en
acteur national, avec des ouver-
tures en vue à Marseille, Nice,
Le Havre, Tours, Lille, Metz,
Dijon. Sans compter le Grand
Paris, comme en témoigne l’Hil-
ton Garden Inn de Massy dans
l’Essonne.n

Christophe Palierse
@cpalierse

Dans un monde du voyage sous
pression avec la propagation du
coronavirus, Hilton, géant amé-
ricain de l’hôtellerie, confirme
l’accélération de son développe-
ment dans l’Hexagone. Pour le
responsable du développement
pour la France et le Benelux,
David Heijligers, il s’agit d’ « un
pays stratégique, première desti-
nation touristique, et important
aussi pour le voyage d’affaires.
Nous y avons mis les moyens ». L e
groupe part de loin. Dans
l’Hexagone, il n’exploite que
15 établissements (9 à Paris et sa
banlieue et 6 en province), soit
près de 2.500 chambres, sur un
total de près de 6.000 hôtels
dans une centaine de pays, avec
plus de 954.000 chambres.
Pour autant, rappelle David
Heijligers, Hilton « a ouvert deux
fois plus d’hôtels au cours des
quatre dernières années en
France qu’au c ours des trente der-
nières, pour doubler de taille, et
devrait encore doubler de taille
d’ici à 2022 ». L’opérateur améri-
cain, qui se développe par de
la franchise ou des contrats
de management, compterait
alors au moins 30 unités et
8 marques.

HÔTELLERIE


Le géant américain
de l’hôtellerie
compte doubler
de taille sur le
marché français
d’ici à 2022.

Les hôtels Hilton


rattrapent leur retard


en France


réservation. Par ailleurs, si la
situation du trafic aérien semble
en voie d’amélioration en Chine,
avec une hausse de l’offre de
2,9 millions de sièges entre le
24 février et le 2 mars, elle conti-
nue de se détériorer partout
ailleurs, notamment dans les
pays d’A sie et en Europe. Du
24 février au 2 mars, l’offre de
sièges a ainsi baissé de 21,1 % en
Corée, de 22,2 % à Hong Kong et
de 17,2 % à Taiwan et elle conti-
nue de chuter en mars.

Ryanair et Lufthansa
anticipent
En Europe, les réductions de
capacités étaient restées, jusqu’à
présent, très limitées. Toujours
selon OAG, l’offre totale de siè-
ges en France était encore en
légère hausse de 0,9 % d u
20 février au 2 mars. S eule l’Italie
avait déjà plongé dans le rouge,
avec une baisse de 2,6 %. Tout
porte à croire que la réduction
de l’offre va se généraliser en
mars. Lufthansa a annoncé,
lundi, une prolongation de la
suspension des vols vers la
Chine jusqu’au 24 avril, ainsi que
d’une réduction de son offre
court-courrier pouvant aller
« jusqu’à 25 % dans les semaines
à venir ». Ryanair, qui n’avait pas
réagi depuis le début de la crise,
lui a emboîté le pas, en annon-
çant une réduction de 25 % de
son offre sur ses lignes italiennes
du 17 mars au 8 avril. D’autres
annonces sont à attendre.

a
Plus d’informations sur
lesechos. fr

Bruno Trévidic
@BrunoTrevidic

L’impact de l’épidémie de coro-
navirus sur le transport aérien
s’annonce déjà nettement plus
fort que prévu pour ce premier
trimestre 2019. Selon les derniè-
res statistiques d’OAG, entre-
prise britannique spécialisée
dans la collecte des horaires des
vols depuis 1929, l’offre totale des
compagnies aériennes mondia-
les a diminué de 40,85 millions
de sièges de février à fin avril,
avec 1,782 milliard de sièges
dans les systèmes de réserva-
tion, contre 1,823 milliard sur la
même période de l’an dernier.
C’est déjà deux fois plus que
les premières prévisions de
l’Organisation de l’aviation civile
internationale, qui tablait sur
« 16 à 20 millions de passagers en
moins et un manque à gagner de 4
à 5 milliards de dollars » , au pre-
mier trimestre.
La situation, largement posi-
tive en janvier, a brutalement
basculé en février, avec le retrait
de 21,127 millions de sièges du
marché. Cette baisse s’est ampli-
fiée en mars, avec une réduction
de l’o ffre de 23,168 millions de
sièges. Et elle semble devoir se
poursuivre en a vril, a vec
10,348 millions de sièges en
moins dans les systèmes de

AÉRIEN


Au premier trimes-
tre, l’offre de trans-
port aérien mondial
s’est réduite de 2,3 %.

Epidémie :


déjà 40 millions de


passagers perdus

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