Le Monde - 08.03.2020 - 09.03.2020

(Marcin) #1
0123
DIMANCHE 8 ­ LUNDI 9 MARS 2020 argent| 17

IMMOBILIER


Bayonne, étoile montante du Pays basque


P


eu de biens à vendre. Une
demande en hausse. Et
donc des prix qui augmen­
tent. « Chaque année, le marché
immobilier se tend un peu plus à
Bayonne », constate Anne Dar­
rieux­Juson, directrice de l’agence
Era Immobilier locale.
Il faut dire que, peu à peu, la
ville, la deuxième des Pyrénées­
Atlantiques en nombre d’habi­
tants, se meut en « marché de re­
port » pour les communes voisi­
nes du Pays basque. « Beaucoup
d’anciens habitants de Biarritz ou
d’Anglet viennent acheter ici une
plus grande surface ; ils ont repré­
senté près d’un tiers de nos tran­
sactions en 2019 », observe Lau­
rent Petit, directeur de l’agence
Nestenn, de Bayonne.
« Ce sont souvent des retraités
avec des moyens importants. Ils
misent sur les quartiers cotés où le
mètre carré coûte en moyenne
4 000 euros, comme le secteur des
Arènes, la rue Thiers, l’avenue
Foch », abonde Mme Darrieux­Ju­
son. Les ventes éclair se multi­
plient, il n’est plus rare de voir un
bien partir en quinze jours. Sur­
tout les maisons de ville.
« Ces logements sont prisés et
chers, vous ne trouverez rien sous
les 400 000 euros, et encore, avec
tr avaux », ajoute M. Petit. Le prix
moyen au mètre carré des appar­
tements anciens a augmenté de
6,8 %, selon Notaires de France.
Résultat : avec un mètre carré
moyen tous biens et quartiers
confondus à 3 163 euros, les pri­
mo­accédants peinent à acheter.

Ils doivent parfois migrer dans
des communes proches, Orthez
par exemple. Pour limiter les dé­
parts, la municipalité propose
d’ailleurs des T2 et T3 neufs en
accession sociale à la propriété
sous les 3 300 euros le mètre
carré, parking compris.

Du choix pour les investisseurs
Malgré des tarifs élevés pour la ré­
gion, l’investisseur peut trouver à
Bayonne de bons rendements. La
ville est éligible au « Denorman­
die », dispositif locatif créé il y a un
peu plus d’un an et qui ouvre la
voie à une réduction d’impôt si
l’acheteur opte pour un bien à ré­
nover. Mais les professionnels in­
terrogés n’ont vu aucune transac­
tion conclue à ce titre. « C’est éton­
nant car le “Pinel ancien” [autre

dispositif d’investissement loca­
tif] a bien fonctionné ici. J’ai vu des
dossiers d’acquéreurs ayant ob­
tenu près de 7 % de rendement
grâce à l’avantage fiscal », indique
M. Petit. Les locations en meublé
non professionnel gagnent du ter­
rain, notamment dans le centre,
prisé par une population « bobo et
étudiante », disent les agents.
Le taux de rendement moyen à
Bayonne s’élève à 4,4 % brut, selon
Meilleursagents. « Pour les maxi­
miser, mieux vaut privilégier le
quartier de Saint­Esprit, où les prix
avoisinent 2 000 à 2 500 euros le
mètre carré. Alors qu’il est compli­
qué de se garer dans le centre, on
trouve ici des places de stationne­
ment. C’est très important chez
nous, beaucoup de personnes tra­
vaillant à Dax, à Saint­Jean­de­Luz,

etc. », rappelle M. Petit. Le neuf,
particulièrement par le dispositif
locatif Pinel, séduit aussi les inves­
tisseurs. Encore faut­il trouver des
programmes éligibles. « L’offre fait
défaut, mais si les investisseurs
trouvent un bien, le prix sera com­
pris entre 3 500 et 4 000 euros le
mètre carré, avec des pics à
5 000 euros dans le quartier des
Arènes », souligne Jacques Rubio,
directeur général régions de Kauf­
man & Broad.
La ville attire plus les acheteurs
que les investisseurs, précise­t­il.
C’est que Bayonne jouit d’un ca­
dre de vie séduisant. Elle pointe
même à la deuxième place au pal­
marès de l’association Villes et vil­
lages où il fait bon vivre (pour les
communes de plus de 2 000 habi­
tants). Que le Tram’bus Biarritz­
Bayonne permette, depuis sep­
tembre 2019, d’aller à la plage en
moins d’une demi­heure de trans­
port en commun n’y est sans
doute pas étranger.
Sans compter que les travaux
d’embellissement se poursuivent,
avec la restructuration du quar­
tier de la Citadelle, où 241 loge­
ments sociaux vont être en partie
démolis et rénovés. L’opération,
qui doit être livrée fin 2021, con­
siste en 153 appartements refaits à
neuf, 88 logements rénovés et
79 habitations supplémentaires
en accession sociale à la propriété.
De quoi renforcer l’attractivité
d’une ville à la démographie dy­
namique – sa population a crû de
14,1 %, de 2011 à 2016.
ludovic clerima

Galeries ou enchères : où acheter l’art?


L’achat d’une œuvre nécessite recherche et attention pour éviter les mauvaises surprises


A


cheter des œuvres
d’art est à la portée de
tous. Pour peu qu’on
précise ses désirs –
tout en gardant l’œil ouvert.
Qu’on se fixe un budget – en ac­
ceptant parfois de le dépasser. Et
qu’on sache où acheter. Là, les
choses se compliquent. Est­il plus
opportun de se pourvoir chez les
marchands, dans les foires ou
dans les ventes aux enchères?
Stéphane Corréard connaît
bien toutes ces sphères : il est col­
lectionneur, marchand, organi­
sateur d’une foire, galeriste. Dans
une autre vie, il fut en outre spé­
cialiste dans plusieurs maisons
de ventes. Les enchères, notam­
ment les ventes d’atelier, restent
à ses yeux « le bon endroit pour
dénicher des œuvres d’artistes un
peu ou largement oubliés, qui
n’intéressent pas les marchands
pour l’instant ».
Ainsi est­ce à l’encan qu’il a dé­
couvert l’artiste japonais Key Hi­
raga (1936­2000), qui a vécu à
Paris dans les années 1960 et
1970, et qu’aucune galerie ne
montrait plus. C’est là aussi qu’il
a pu se constituer pour quelque
2 000 euros une jolie collection
de dessins d’illustrateurs ou
d’artistes célèbres, comme
Henri Michaux (1899­1984).
« Dans cette gamme de prix, on
ne trouve pas grand­chose dans
les galeries », note­t­il. Patronne
de Christie’s France, Cécile Ver­

dier abonde : les ventes aux en­
chères favorisent les achats
d’opportunité. Elles présentent
en outre l’avantage d’une cer­
taine transparence. « C’est la ga­
rantie du juste prix, établi par
une compétition ouverte, ce qui
est rassurant pour un primo­
acheteur », assure­t­elle.
Juste prix? Pas si sûr. Car la
compétition entre enchérisseurs
ne va pas sans excès. Dans cer­
tains cas, les œuvres se révèlent
bien plus onéreuses qu’en gale­
ries. Certains jeunes artistes amé­
ricains étiquetés à 20 000 dollars
(18 000 euros) dans celles­ci se
vendent soudain dix fois plus
cher aux enchères, sous l’impul­
sion de quelques spéculateurs.

Garantie d’authenticité
Par ailleurs, les frais appliqués
aux acheteurs, s’ils sont transpa­
rents, sont exorbitants et en aug­
mentation régulière : 25 % sur les
premiers 200 000 euros, 13,5 %
au­dessus de 2,5 millions d’euros.
La marge de la maison de ventes
est colossale...
Pas plus qu’en galerie, se défend
toutefois François Curiel, prési­
dent de Christie’s Europe. « Un
acheteur peut difficilement con­
naître le niveau du profit réalisé
par les marchands », lance­t­il. Les­
quels marchands se fournissent
aussi parfois aux enchères pour
proposer ensuite les œuvres à
deux ou trois fois le prix d’adjudi­

cation. Quelle serait dès lors leur
valeur ajoutée? « Le conseil per­
sonnalisé à l’acheteur », répond
Marion Papillon, présidente du
Comité professionnel des galeries
d’art. « La notion de choix, de re­
gard, de ligne éditoriale, d’exper­
tise, est bien plus évidente dans les
galeries. » Celles­ci permettent
aussi de prendre le temps de la ré­
flexion. Et, cerise sur le gâteau, les
œuvres sont présentées dans un
état impeccable.
« Dans une galerie, elles ne néces­
sitent ni restauration ni réencadre­
ment, c’est rarement le cas aux en­
chères, ajoute M. Corréard. Le col­
lectionneur a aussi le choix entre
plusieurs œuvres d’un même ar­
tiste et, très important, il peut
payer en plusieurs mensualités,
alors qu’avec une maison de ven­
tes, il faut régler en moins de trente
jours. » Les galeries offrent enfin
une garantie d’authenticité plus
longue – vingt ans à partir de la
découverte du vice ou de l’erreur
d’authentification, contre cinq
ans dans les maisons de ventes.
Si l’achat en galerie présente de
réels avantages, comment les
choisir? Derrière les enseignes les
plus médiatisées, il est conseillé
de regarder les petites ou moyen­
nes galeries, pépinières et pou­
ponnières où l’on peut trouver
son bonheur à des « prix de la
vie », comme le dit joliment la ga­
leriste Catherine Thieck.
Les foires constituent aussi une
bonne option, faisant économi­
ser de précieuses heures à qui n’a

pas le temps de suivre assidû­
ment la programmation des gale­
ries. Au printemps, elles fleuris­
sent à Paris : Art Paris Art Fair, au
Grand Palais, du 28 au 31 mai,
Drawing Now Art Fair, au Carreau
du Temple, du 26 au 29 mars, le
Paris Art Design (PAD), aux Tuile­
ries, du 12 au 19 mai. S’y agrègent
des professionnels sélectionnés
sur dossier, aux goûts, styles et
horizons géographiques variés.
« C’est l’occasion de découvrir une
multitude d’artistes, d’avoir accès
à des scènes étrangères que l’on ne
connaît pas ou peu, tout en écono­
misant le prix de nombreux voya­
ges », résume Guillaume Piens,
directeur d’Art Paris Art Fair.
« Beaucoup de foires s’apparen­
tent toutefois à ces dégustations
marathons, où l’on boit des centai­
nes de vins différents en une demi­
journée, et sans manger, en
plus! », objecte M. Corréard. « Et
comme le reconnaît le critique Ro­
bert Parker lui­même, après cin­
quante verres, impossible de sa­
voir si on déguste un grand cru ou
de la bière, même si on recrache. »
Aussi faut­il préparer sa visite
pour éviter le tournis et l’indiges­
tion. « Mieux vaut étudier en
amont la liste des galeries, les sec­
teurs, les œuvres proposées et dé­
terminer un parcours », conseille
Guillaume Piens. Le site Internet
d’Art Paris Art Fair intègre ainsi
un moteur de recherche permet­
tant de faire des tris par prix, ori­
gines géographiques, secteurs et
même techniques.
Ne vous attendez cependant pas
à des ristournes : un salon coûte
cher, et la galerie doit rentrer dans
ses frais. Stéphane Corréard a sa
technique pour faire baisser les
prix sur ces événements : « Je fais
parfois des offres à prix “cassé”,
20 % ou 25 % moins cher que le prix
affiché. Le galeriste est libre de ven­
dre l’œuvre à son prix initial pen­
dant toute la durée de la foire, s’il y
arrive. Le cas contraire, je le libère
d’un invendu! »
roxana azimi

Le marché se tend


SOURCE : MEILLEURSAGENTS, NOTAIRES DE FRANCE

Prix médian
d’un appartement

Evolution des prix
sur cinq ans

Rendement
locatif
(deux-pièces)

3 110 €/m


4,4% + 21,9 %


Bayonne

Loyer moyen

10,40 €/m


Evolution des prix
sur un an


  • 8,8 %


QUESTION  À  UN  EXPERT


Quel impact fiscal si je gère


mon entreprise à la maison?


olivier rozenfeld, président de Fidroit

Trois cas de figure peuvent se présenter. Quand l’entrepreneur est
locataire de sa résidence principale et en affecte une partie à son ac-
tivité professionnelle, seule la fraction de loyer liée à celle-ci pourra
être déduite du résultat de l’entreprise. En revanche, si sa résidence
principale lui appartient, il peut déduire de ce résultat le loyer qu’il
se verse à « lui-même ». A condition que le bien immobilier ne soit
pas inscrit à l’actif du bilan (le patrimoine de l’entreprise). Il en va de
même pour les charges relatives à la location. Ne sont par contre
pas déductibles les dépenses de la propriété – taxe foncière, amor-
tissements et éventuels intérêts d’emprunt. Pour rendre ces charges
de propriété déductibles, la résidence doit être inscrite à l’actif du bi-
lan. Mais l’exploitant devra alors soumettre à l’impôt sur le revenu le
revenu fictif lié aux périodes durant lesquelles il utilise le bien pour
sa famille! Dans tous les cas, la cotisation foncière des entreprises
est due. Elle est fonction de la surface utilisée pour l’activité.
Quelle fiscalité s’appliquera à la vente du bien? En règle générale, le
régime d’imposition des plus-values immobilières des particuliers.
Vous pourrez même prétendre à l’exonération pour cession de rési-
dence principale, sauf si votre activité nécessite locaux et matériels
professionnels spécifiques.

C R É D I T I M M O B I L I E R
Taux en hausse
En février, malgré une diminution des OAT (obliga­
tions assimilables du Trésor), les taux des crédits im­
mobiliers ont progressé. Normalement, lorsque les
OAT baissent, les barèmes des taux font de même.
Cela n’a pas été le cas le mois dernier, note le courtier
Cafpi dans sa météo des taux publiée le 3 mars. « Les
banques retrouvent des marges intéressantes et néces­
saires à leur bonne santé sur les crédits immobiliers »,
explique Philippe Taboret, directeur général adjoint
de Cafpi. Pour mars, les meilleurs taux affichés par les
banques vont de 0,46 % sur 10 ans, à 1,05 % sur 25 ans.

LES FRAIS APPLIQUÉS


AUX ACHETEURS 


SONT  EXORBITANTS 


ET  EN  AUGMENTATION 


RÉGULIÈRE. LA MARGE


DE LA MAISON DE VENTES 


EST COLOSSALE


5 MILLIONS
C’est, en euros, le prix estimé de la collection de l’antiquaire Dalva
Brothers, dispersée par Christie’s le 2 avril à New York et en novem-
bre 2020 à Paris. Pourquoi acheter aujourd’hui à l’encan ce qu’il
était possible de trouver jusqu’à il y a peu en boutique? Parce que
pousser la porte d’un antiquaire peut être intimidant. « Les six cents
objets n’y sont en outre pas proposés en fonction des prix “magasin”
mais par rapport aux demandes du marché, précise Simon
de Monicault, spécialiste chez Christie’s. Or, dans certains cas,
les estimations sont moins chères, voire beaucoup moins chères. »

SOS CONSO 
CHRONIQUE PAR RAFAËLE RIVAIS

Copropriété et jouissance


du rez-de-jardin


D


ans les copropriétés, les jardins et les courettes ac­
cessibles de plain­pied par le seul appartement
du rez­de­chaussée sont sources de litiges lorsque
le règlement n’en précise pas le statut. Sont­ils des
« parties communes à jouissance exclusive » du propriétaire
de cet appartement ou des « parties privatives »?
Telle est la question qui se pose dans l’affaire suivante : M. et
Mme X, propriétaires d’un trois­pièces au rez­de­chaussée, sol­
licitent de l’assemblée générale (AG) le droit d’installer un ca­
banon sur la parcelle dont ils ont un usage exclusif et dont ils
affirment, en raison d’une ambiguïté du règlement, qu’ils
sont propriétaires. Mais sans attendre son vote – qui sera né­
gatif –, ils coulent une dalle de béton et le construisent.
Le syndicat des copropriétaires en réclame la démolition.
Il assure que les X ne pouvaient édifier cet abri de jardin
sans l’autorisation de l’AG, du fait que la parcelle sur lequel il
se trouve est une « partie commune à jouissance privative ».
Or, « les parties communes, même grevées d’un droit de jouis­
sance exclusif », ne peuvent faire l’objet de travaux sans
autorisation, en vertu de la loi régissant
la copropriété (article 25).
La cour d’appel d’Aix­en­Provence juge,
de manière erronée, que la parcelle liti­
gieuse est « une partie commune, dont [les
X] peuvent jouir dans les conditions pré­
vues pour les parties privatives », ce qui
« exclut » qu’ils aient à demander un feu
vert. La Cour de cassation la censure, le
23 janvier 2020 : « L’attribution d’un droit
d’usage privatif sur une partie commune
ne modifie pas le caractère de partie com­
mune. » La Cour de cassation confirme ainsi sa jurisprudence,
laquelle a été récemment incorporée à la loi sur la copro­
priété : un nouvel article (6­3) précise désormais que les par­
ties communes à jouissance privative appartiennent « indivi­
sément » à « tous » les copropriétaires, si bien qu’aucun ne
peut revendiquer sur elles un droit de propriété exclusif.
Cet article a été créé par la loi Evolution du logement, de
l’aménagement et du numérique (ELAN) du 23 novem­
bre 2018, qui, dans le but de limiter les contentieux, impose
une révision des règlements de copropriété.
La loi ELAN prévoit que les parties communes à jouissance
privative devront être recensées d’ici au 28 novembre 2021,
faute de quoi leur existence ne sera pas reconnue. En effet,
certains droits de jouissance exclusifs ont été accordés par
des AG, sans que cela ait jamais été gravé dans le marbre des
règlements. Ceux qui en bénéficient seraient donc bien avi­
sés de demander à leur syndic qu’il mette le sujet à l’ordre
du jour d’une assemblée, afin que leur situation soit régula­
risée. Sinon, ils risquent de perdre le droit d’installer une
chaise longue dans leur rez­de­jardin.

LES PARTIES 


COMMUNES NE 


PEUVENT FAIRE 


L’OBJET DE 


TRAVAUX SANS 


AUTORISATION


CLIGNOTANT

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