Le Monde - 18.02.2020

(ff) #1
0123
MARDI 18 FÉVRIER 2020 france| 13

Le face­à­face tendu entre


Ramadan et ses juges


L’islamologue suisse a été de nouveau mis
en examen pour le viol de deux femmes

E


xcusez­moi, est­ce que je
peux faire une introduc­
tion? » A la première ques­
tion des juges, Tariq Ramadan
rend la pareille. « Je ne suis pas en
état de faire cet interrogatoire »,
enchaîne­t­il. Puis de conclure :
« Je veux que ce que je dis en intro­
duction soit acté, j’ai mal à la tête.
Vous allez m’écouter. Ça fait
quinze mois que je veux vous voir.
Ce n’est pas vous qui voulez me
voir, c’est moi qui veux être inter­
rogé. » Le ton est donné, en ce
matin du jeudi 13 février. Moins
de cinq heures plus tard, au terme
d’un interrogatoire marqué par
une tension constante et que Le
Monde a pu consulter, l’islamolo­
gue suisse de 57 ans, doublement
mis en examen pour « viol » et
« viol sur personne vulnérable »
depuis février 2018, est ressorti
du tribunal avec deux nouvelles
mises en examen pour viols.
Avant même la notification de
ces nouvelles poursuites et avant
même de répondre aux magistra­
tes, Camille Guillermet et Camille
Palluel, M. Ramadan en a profité
pour dire tout le mal qu’il pensait
de l’enquête le visant : « J’ai une
dernière remarque et après je
répondrai à vos questions. Je suis
scandalisé par la manière dont
cette instruction est menée. A
partir d’aujourd’hui, je demande­
rai à mon conseil de la manière la
plus claire, de façon institution­
nelle et médiatique, de dénoncer
toutes les atteintes à mes droits. Le
code de déontologie vous impose
l’impartialité. » Les juges, du tac
au tac : « Nous ne vous avons pas
convoqué pour recevoir une leçon
sur l’impartialité. »

« Souffler le chaud et le froid »
Si les magistrates souhaitaient
entendre le théologien, c’est
qu’elles avaient des questions à
lui poser concernant les témoi­
gnages de deux femmes audition­
nées par la brigade criminelle de
Paris en tant que témoins, en
février 2019, après avoir été iden­
tifiées par les enquêteurs sur les
photos retrouvées dans l’ordina­
teur de M. Ramadan. Toutes deux
ont décrit des relations sexuelles
violentes avec lui.
La première a déclaré avoir ren­
contré l’intellectuel musulman
en mars 2016, dans un hôtel pari­
sien. Quelques semaines aupa­
ravant, elle avait commencé à
échanger des messages avec lui. Il
lui demande de lui envoyer des
photos d’elle, comme dans ce
message daté du 1er mars : « Tu
tiens parole avec une présence
constante avec des messages et
une photo minimum par jour et la
possibilité de communiquer sur
Viber ou tu disparais à tout jamais.
Ou tout, ou rien. »
N’a­t­il pas joué à « souffler le
chaud et le froid » avec cette jeune
femme, en lui signifiant la fin de
leurs échanges, puis en reprenant
ceux­ci après qu’elle lui a envoyé
les photos exigées ?, demandent
les juges. « Une lecture partiale et
sélective », estime M. Ramadan :
« Vous auriez un zéro pointé en
évidence, car dans ces échanges,
l’évidence montre qu’elle joue
autant au chaud et au froid. » Il
avance une relation « consentie ».
La femme, elle, qui avait parlé
d’un « viol moral » ressenti après
des actes sexuels décrits comme
violents, avait déclaré aux enquê­
teurs : « Il a une telle emprise sur
vous qu’on fait tout ce qu’il nous
demande, on n’est plus maître de
notre personne. Mais cette rela­
tion physique a été consentie. Il
faudrait une autre infraction pour
ce genre de personne. » Elle a fini
par porter plainte il y a quelques
semaines. Mais Tariq Ramadan
l’assure : « Tout ce qui s’est passé
dans la chambre s’est passé de
façon consentie, sans aucune vio­
lence. » Agacé par certaines inter­
rogations des juges, qu’il estime

partiales, l’islamologue affiche
son incompréhension. Parfois, il
rit, note la greffière présente. Puis
il s’exclame : « C’est surréaliste!
Mon Dieu, mon Dieu... » A certai­
nes questions très précises sur le
déroulé de ces rencontres, il ne
souhaite toutefois pas répondre.
« La matérialité de gestes sexuels
dans un dossier ouvert pour viols
fait absolument partie des ques­
tions utiles à la manifestation de
la vérité, tentent les juges.


  • La femme qui témoigne vous
    dit c’est consenti, vous lisez “il y a
    viol”.

  • Elle indique avoir été “violée
    moralement”.

  • J’aimerais que vous fassiez
    intervenir dans la loi française et
    la jurisprudence la définition cri­
    minelle du viol moral. »
    A propos de la deuxième
    femme, qu’il a vue en novembre
    et décembre 2015 dans un hôtel,
    M. Ramadan évoque aussi des
    relations consenties. Il souli­
    gne qu’elle n’a pas porté plainte.
    Et balaie les descriptions de
    rapports violents, « copier­coller »
    selon lui des dépositions des
    premières plaignantes. Enfin, il
    déplore que les juges n’aient pas
    entendu ces deux femmes avant
    de l’interroger.
    « Quels sont les gestes sexuels
    avec elle ?, essaie à nouveau une
    juge.

  • Tous les gestes qui ont été faits
    ont été consentis.

  • Ce n’est pas ma question.

  • C’est ma réponse. »


« Une mascarade »
Tariq Ramadan balaie une quel­
conque « fascination » qu’il aurait
exercée à l’époque sur ces
femmes qui le mettent désormais
en cause. « [Elles] ne sont pas sous
emprise. C’est vous qui êtes sous
emprise, accuse­t­il. Une emprise
politique. Cette instruction est une
instruction sous emprise. Ces
femmes ont des dépositions chan­
geantes, similaires, concordantes
dans leurs mensonges. Et votre
lecture, c’est de chercher entre les
lignes des éléments qui pourraient
vous sauver ou sauver le naufrage
de cette instruction. J’assiste de­
puis deux ans à une mascarade. »
Il dénonce une persécution
judiciaire, selon lui liée à ses idées.
« Vous, mes juges d’instruction,
vous êtes en passe de donner une
nouvelle définition du viol qui ne
s’appliquera de fait à aucun
homme politique, aucun metteur
en scène (...), à l’exception d’un
homme qui n’est pas coupable
par son action mais qu’on veut
rendre coupable (...) de ce qu’il
pense et ce qu’il défend. C’est ça ma
seule culpabilité.


  • L’homme dont vous parlez,
    c’est vous?

  • Oui, je parle de moi à la troi­
    sième personne pour me mettre à
    distance de ce sujet. »
    De cet interrogatoire, Tariq
    Ramadan résume sa vision en
    une phrase : « Nous assistons – et
    vous le savez – au dévoiement de la
    cause des femmes. »
    Face à ces accusations répétées,
    les magistrates s’interrogent :
    « Avez­vous déposé ou envisa­
    gez­vous de déposer une requête
    en suspicion contre vos juges
    qui instruisent selon votre expres­
    sion de manière partiale?

  • J’en discuterai avec mon
    conseil. »
    yann bouchez


Thiriez, la mission des dupes


Après des mois de polémiques, le rapport sur la haute fonction


publique doit être officiellement remis mardi au premier ministre


RÉCIT


L

e 10 novembre 1630,
Louis XIII réussit un
magistral coup politique :
faisant croire à tous qu’il
s’apprête à limoger son premier
ministre Richelieu, il lui réitère au
contraire sa confiance, tout en
éliminant ses ennemis. C’est la
« journée des dupes ». La mission
Thiriez sur la haute fonction
publique a de cela : une formida­
ble opération de dupes, dans
laquelle tout le monde s’est
trompé sur tout le monde.
Le rapport de Frédéric Thiriez
doit être officiellement remis au
premier ministre, Edouard Phi­
lippe, mardi 18 février. En réalité,
l’énarque, avocat et ancien prési­
dent de la Ligue de football
professionnel, missionné il y a
neuf mois, a remis le document
par courriel dès le 24 janvier. Il en
a même fait porter, le 11 février,
une version imprimée et brochée,
accompagnée d’un courrier, à
Emmanuel Macron et à M. Phi­
lippe. Matignon affirmait cepen­
dant encore, la semaine dernière,
attendre impatiemment le
rapport Thiriez...
Le jeu de dupes dure en réalité
depuis le début. Le 25 avril 2019, le
chef de l’Etat tient une conférence
de presse pour tirer les leçons de
la crise des « gilets jaunes ».
Depuis quelques jours, on lui
prête l’idée de supprimer l’Ecole
nationale d’administration (ENA).
Ce jour­là, il la confirme, presque
à contrecœur, au détour d’une
question, évoquant également
« la fin » des grands corps. M. Ma­
cron entend­il fermer l’Inspec­
tion générale des finances (IGF), le
Conseil d’Etat et la Cour des
comptes, dans la foulée de l’école
sise à Strasbourg? Son entourage
se montre rassurant, mais la
confusion est générale.

« Un drôle de choix »
Peu avant l’intervention présiden­
tielle, le secrétaire général de l’Ely­
sée appelle Frédéric Thiriez. « Si
jamais le président de la Républi­
que vous confie cette mission,
est­ce que vous l’acceptez? », inter­
roge Alexis Kohler. Bien sûr,
répond l’avocat, qui avait envoyé
une note de deux pages à M. Ma­
cron pour lui présenter ses idées.
« Mais ce n’est pas sûr », précise
M. Kohler. Deux heures plus tard,
Frédéric Thiriez apprend sa nomi­

nation en regardant la conférence
de presse à la télévision. « Cela m’a
surpris. Je n’ai pas compris ce
que l’ancien président de la Ligue
de foot venait faire là­dedans »,
confie aujourd’hui un ministre.
« C’est un drôle de choix, abonde
un haut fonctionnaire. Thiriez est
tout de même l’exemple même du
pantouflage. Je ne critique pas,
mais, du coup, il était extrême­
ment éloigné du sujet. Cela nous a
tous surpris de voir qu’il s’intéres­
sait encore à la fonction publique. »
Frédéric Thiriez est reçu dès le
lendemain par Edouard Philippe.
Veut­il une commission? « Sur­
tout pas, répond l’avocat. Je ne suis
pas un perdreau de l’année : une
commission, cela sert à enterrer
un sujet. » Ce sera donc « un com­
mando » constitué de Florence
Méaux, responsable de la mission
« cadres dirigeants » de l’Etat, et
de Soraya Amrani­Mekki, profes­
seure de droit, bientôt rejointes
par un ami de M. Thiriez, le
conseiller d’Etat Benoît Bohnert.
Ils reçoivent une lettre de mis­
sion signée le 8 mai par M. Phi­
lippe. Mais elle est aussitôt an­
nulée par une seconde missive,
qui arrive le 14... Les courriers
sont quasiment identiques, à une
différence près : le premier indi­
que que le gouvernement est l’ini­
tiateur de cette réforme, ce que le
second rectifie : non, il s’agit du
président de la République. Mati­
gnon a toujours nié l’existence de
deux lettres.
Le rapport est attendu pour fin
novembre 2019. Les auditions
s’enchaînent – 270 en tout –, les
contributions pleuvent : 150 arri­
veront sur le bureau de M. Thiriez.
Le rythme est intense. Il arrive
même que la petite troupe se
retrouve pour un week­end de
travail dans le manoir de l’avocat,
situé dans le Perche. « Ça a été très
dur, commente une source qui a
vu la petite équipe travailler. La
mission était gigantesque, et ils

avaient neuf mois quand il aurait
fallu deux ans. » Surtout que les
rapporteurs n’ont pas lâché leur
activité professionnelle.
En novembre, les rumeurs vont
bon train. Les premières proposi­
tions seraient « trop faibles »,
entend­on, et Frédéric Thiriez ne
serait pas un bon choix. « Comme
tous ces anciens énarques,
commente un observateur avisé,
ils parlent de l’école qu’ils ont
connue il y a trente ans, mais qui
n’existe plus. Le procès en incom­
pétence est venu de là. » De son
côté, un ministre lâche : « Il ne
connaissait rien au sujet. Ses
propositions n’allaient pas. »

Frapper fort
Thiriez a cédé aux grands corps,
affirment certains. « Ils ont plaidé
leur cause avec beaucoup de
classe, pas du tout avec la hargne
que l’on dit », assure au contraire
une source de premier plan.
Contrairement aux magistrats ju­
diciaires, ils étaient même très de­
mandeurs de réformes. C’est
qu’ils ont senti le vent du boulet...
Car, en réalité, c’est l’Elysée qui a
exercé la plus forte pression, pré­
cise un haut fonctionnaire très au
fait des péripéties de la mission :
« L’Elysée a toujours été sur une li­
gne plus dure de rupture par rap­
port à Matignon. » Emmanuel
Macron juge la protection à vie
dont jouissent les hauts fonction­
naires des grands corps comme
une rente hors d’âge. Et, au grand
dam de Matignon, la présidence
est prête à frapper fort.
La fonction publique est divisée
en « corps » : chacun d’eux
regroupe des fonctionnaires qui
relèvent d’un statut particulier
(mode de recrutement, missions,
avancement, etc.). L’idée est de
supprimer ceux du Conseil d’Etat,
de la Cour des comptes et de l’Ins­
pection générale des finances.
Voilà ce qu’Emmanuel Macron
avait en tête le 25 avril.
C’est une bombe. Cela revien­
drait à retirer beaucoup de protec­
tions aux magistrats des grands
corps. En novembre, on demande
à Frédéric Thiriez d’étudier cette
option qu’il avait eu le tort
d’oublier. Finalement, il ne la pro­
posera que pour l’IGF, car le Con­
seil d’Etat et la Cour des comptes
sont protégés par la Constitution.
A cette époque, un autre point
agite l’exécutif. Emmanuel Ma­
cron est persuadé que l’on ne réus­

sira pas à rendre la haute fonction
publique plus représentative de la
population sans instaurer un
concours spécifique pour les can­
didats issus des milieux modes­
tes. Frédéric Thiriez réfléchit donc
à cette option, ainsi qu’à un dou­
ble classement. Entre­temps, de
nombreux membres du gouver­
nement ont alerté le chef de l’Etat
sur les dangers de la discrimina­
tion positive. « Si vous instaurez
un concours spécifique à l’entrée de
cette école, explique l’un d’eux,
vous commencez à mettre le doigt
dans quelque chose qui ne serait
plus républicain. Mais cela ne veut
pas dire qu’il ne faut rien faire. Il est
possible de lancer de nombreuses
actions afin d’améliorer la diversité
territoriale et sociale. »
La mission est donc prolongée.
Lors d’une réunion, il est demandé
à Frédéric Thiriez de retirer ces
propositions. C’est non. « Je vais les
proposer quand même, aurait­il
répondu. Chacun son job. Je pro­
pose, le gouvernement dispose. »
De même pour le classement de
sortie de l’ENA, que M. Thiriez veut
supprimer. « Le premier ministre et
le président de la République sont
en fait d’accord pour maintenir
le classement de sortie de l’ENA et
rejeter l’idée d’un concours spé­
cial », considère une source proche
de la mission. Les divergences en­
tre Matignon et l’Elysée ne s’avè­
rent en réalité pas si profondes.
Un autre soubresaut se produit :
Soraya Amrani­Mekki quitte le
commando mi­décembre. La pro­
fesseure de droit, ancienne mem­
bre du Conseil supérieur de la ma­
gistrature, n’a pas voulu commen­
ter sa décision. Mais il ne fait guère
de doute que la vive opposition du
monde judiciaire à l’idée d’un
tronc commun avec les autres
hauts fonctionnaires n’y est pas
étrangère. Elle sera remplacée par
Catherine Lagneau, directrice ad­
jointe de l’école Mines ParisTech.
Fin janvier, le gouvernement
semble réticent à publier le
rapport Thiriez. Qu’en retiendra­
t­il, finalement? « Je ne suis pas sûr
que le rapport est à la hauteur des
enjeux et qu’il changera grand­
chose aux décisions que prendra le
gouvernement, suppute un minis­
tre. Cela aura été un travail de do­
cumentation. » Que le chef d’Etat
se décide à le mettre en œuvre, et
ce ministre rejoindra les victimes
de cette « mission des dupes ».
benoît floc’h

« Je n’ai pas
compris ce que
l’ancien président
de la Ligue
de foot venait
faire là-dedans »,
confie un ministre

« Ces femmes
ne sont pas
sous emprise,
c’est vous
qui êtes
sous emprise »
TARIQ RAMADAN

lorsque emmanuel macron confie, le
25 avril 2019, une mission visant à réfor­
mer la haute fonction publique à l’avocat
Frédéric Thiriez, il expose ses objectifs : les
plus hauts serviteurs de l’Etat doivent être
plus représentatifs de la société, et il faut
en finir avec « la protection à vie » dont
jouissent les énarques nommés dans les
grands corps. Au terme de neuf mois, la
mission a défini quarante propositions.

Une nouvelle ENA pour tous L’Ecole na­
tionale d’administration devrait bien dis­
paraître. L’établissement qui la remplacera
sera dénommé « Ecole d’administration
publique » (EAP). Pendant un temps, la mis­
sion avait même envisagé « Ecole Charles­
de­Gaulle ». Contrairement à aujourd’hui, il
sera doté d’un statut d’établissement d’en­
seignement supérieur, placé sous l’om­
brelle de l’université Paris Sciences et
Lettres. Une marque « ENA international »
sera préservée pour les activités en lien avec
l’étranger. L’EAP aura vocation à former
tous les hauts fonctionnaires. Un socle
commun de six mois, géré par sept écoles
(administrateurs civils, magistrats, com­
missaires, santé publique...), débutera par
une préparation militaire de trois semaines
et l’encadrement de jeunes du service na­
tional universel. Suivront quatre mois sur
le terrain. Par groupes de sept élèves (puis­
qu’il y a sept écoles), ils se rendront qui dans
un hôpital, qui dans un tribunal, qui dans
une mairie. Objectif : travailler ensemble à

la résolution d’un problème réel. Ensuite,
les élèves seront réunis sur trois sites (Stras­
bourg, Bordeaux et Rennes), pour suivre
quinze jours d’enseignements communs.
L’EAP accueillera les futurs administrateurs
civils et les ingénieurs des corps techniques
de l’Etat (Mines, Ponts et Chaussées, etc.).

Concours et discrimination positive Le
concours sera profondément remanié. La
moitié des places sera réservée aux étu­
diants, l’autre moitié aux professionnels.
Le nombre d’épreuves passerait de dix à
six. La dissertation de culture générale se­
rait remplacée par la rédaction d’une note
sur une problématique contemporaine.
Le candidat, qui aura accès à Internet, de­
vra exposer une opinion personnelle. Une
épreuve collective de mise en situation
évaluera les compétences des futurs élèves
dans une situation donnée. Pour ce qui est
de la discrimination positive, la mission
propose d’organiser, à titre expérimental,
un « concours spécial » pour les jeunes is­
sus de familles modestes. Cette voie, diffé­
rente du concours général, sera accessible
sous conditions de ressources des familles.
Dix places (sur 130) leur seront réservées.
Le rapport devrait également suggérer la
création sur l’ensemble du territoire de
vingt classes préparatoires publiques.

Classement de sortie Le classement de
sortie serait supprimé. Cette procédure, qui
dénature la formation actuelle de l’ENA,

permet de constituer « la botte », le groupe
des quinze meilleurs élèves qui intègrent
directement les grands corps à la sortie de
l’école. Dorénavant, une phase de recrute­
ment aurait lieu entre employeurs et candi­
dats. L’entrée dans le grand corps ne se
ferait pas immédiatement. Le jeune devrait
partir deux ans dans l’administration de
terrain, puis deux années dans l’institution
qu’il a choisie pour apprendre son métier.
La titularisation dans le grand corps n’in­
terviendrait qu’après quatre ou cinq ans.

Grands corps Les fonctionnaires tra­
vaillant au Conseil d’Etat et à la Cour des
comptes conserveraient le bénéfice d’un
corps spécifique. En revanche, cela ne
serait plus le cas pour l’Inspection générale
des finances. Pour lutter contre « la rente »,
le passage au « troisième grade » (les fonc­
tions les plus élevées dans les grands corps)
ne sera plus automatique, mais assujetti à
une mobilité de trois ans dans des postes
opérationnels. A partir de dix ans de car­
rière, un haut fonctionnaire pourra candi­
dater à l’« Institut des hautes études de ser­
vice public ». Chaque année, une promo­
tion de 130 à 150 personnes pourra suivre
un an de formation « à temps très partiel ».
L’exécutif sera invité à puiser dans ce vivier
pour les postes les plus prestigieux, dont il
conserve le monopole de nomination (pré­
fets, ambassadeurs, présidents de tribunal,
directeurs d’administration centrale...).
b. f.

Ce que contient le rapport Thiriez sur la haute fonction publique

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