Libération - 17.02.2020

(Martin Jones) #1
16 u Libération Lundi 17 Février 2020
MUNICIPALES

L’ex-secrétaire d’Etat chargée de l’Aide aux victimes sous Hollande Juliette Méadel, le 12 février à Montrouge (Hauts-de-Seine).

A Montrouge, l’ex-vallsiste Juliette


Méadel fait fi de l’étiquette LREM


Bien qu’elle ait perdu
la bataille de
l’investiture LREM,
l’ex-PS se lance
dans les Hauts-de-
Seine face au maire
sortant UDI,
qu’elle défie
notamment
sur le front écolo.

C’


est une ville pas
si étendue, Mont -
rouge, mais elle est
très dense : la commune, li-
mitrophe du sud de Paris,
compte plus de 50 000 habi-
tants et deux candidats ma-
cronistes aux municipales.
Ou presque. Le premier, c’est

Emmanuel Macron avant le
premier tour de la présiden-
tielle. Elle se dit désormais
«déçue» par le chef de l’Etat :
«Comment ne pas l’être ?» Le
choix de Lengereau, «c’était
la démonstration que LREM
est devenue comme tous les
vieux partis», pose la candi-
date. «Si elle avait eu le logo,
elle aurait été fière d’être mar-
cheuse, souffle un opposant.
Elle ne l’a pas eu et ne l’assume
pas.» Méadel revendique en
tout cas d’être sans étiquette,
sans vraiment être hors sys-
tème : titulaire d’un doctorat
de droit sur les marchés fi-
nanciers, énarque, avocate,
elle déclarait en 2016 un pa-
trimoine de 1,8 million d’eu-
ros et devenait la cinquième
personne la plus riche du
gouvernement Valls.
Aujourd’hui, la candidate
mène sa campagne tambour

battant, fait du porte-à-porte
tous les samedis, se montre
sur les marchés tous les di-
manches, habille un tricycle
d’un poster avec sa bobine
pour sillonner les rues de la
ville... Son programme est
clair : «Battre le maire sor-
tant, résume-t-elle en sou-
riant. On a le sentiment que
la ville se dégrade depuis
trois ans. Le maire ne s’occupe
pas des gens.» La victoire, elle
y croit dur comme fer, soute-
nue par une équipe qui
comprend, affirme-t-elle,
beaucoup de militants ma-
cronistes qui n’ont pas suivi la
consigne officielle. Méadel
assure par ailleurs n’avoir
aucun contact avec Cédric
Villani, le candidat dissident
LREM à Paris.
En parallèle, c’est la course
à l’échalote pour savoir quel
candidat sera le plus écolo.

Par
GUILLAUME
LECAPLAIN
Photo DENIS ALLARD

En octobre, l’ex-UMP passé
UDI a obtenu l’étiquette du
parti présidentiel pour se
lancer dans les municipales.
Une situation confortable
dans cette ville
des Hauts-de-
Seine qui vote au
centre droit de-
puis des décennies. Il est par
ailleurs adoubé par Metton et
soutenu par la députée LREM
locale, Laurianne Rossi.

Tricycle. Affaire pliée?
C’était sans compter une
femme qui s’est battue pour
obtenir elle aussi l’imprima-
tur du parti macroniste, ne l’a
pas eu, et y va quand même.
Juliette Méadel est une an-
cienne socialiste (tendance
vallsiste), secrétaire d’Etat
chargée de l’Aide aux victi-
mes sous Hollande, exclue
du PS pour avoir soutenu

l’officiel : Etienne Lengereau,
53 ans, édile actuel. En 2016,
quand le baron local Jean-
Loup Metton (UDI) quitte la
vie politique après vingt-
deux ans à la
mairie, pour être
a u c ô t é d e
sa femme grave-
ment malade, il choisit Len-
gereau, alors conseiller mu-
nicipal, comme successeur.
Souvent décrit comme un
notable peu à l’aise au
contact de ses concitoyens,
l’homme (qui n’a pas ré-
pondu à nos sollicitations)
est donc devenu maire sans
mener campagne. Diplômé
de Sciences-Po, conseiller
de Jean-Paul Delevoye à la
Fonction publique au début
des années 2000, Etienne
Lengereau est aujourd’hui
chargé de mission Grand
Paris à la Poste.

L’HISTOIRE
DU JOUR

La chose est à la mode. D’au-
tant plus à Montrouge, où la
voiture est reine : outre la
route départementale qui
coupe la commune en deux
et s’élargit à pas moins de
huit voies aux abords de Pa-
ris, enfer bien connu des pié-
tons locaux, on y trouve des
grands axes où il faut être un
peu fou pour circuler à vélo.
Le baromètre des villes cycla-
bles vient d’ailleurs d’attri-
buer un très sévère F à Mont -
rouge, l’avant-dernière note
possible.

Platanes. Etienne Lenge-
reau se vante pourtant de
l’aménagement des allées
Jean-Jaurès, une promenade
qui traverse la ville en partant
de la mairie et longe l’un
des principaux pourvoyeurs
d’emplois de Montrouge : le
siège français du Crédit agri-
cole. Mais les opposants hur-
lent : la chose est jugée beau-
coup trop minérale, d’autant
que tous les antiques plata-
nes qui bordaient l’avenue
ont disparu lors des travaux.
Et les pistes cyclables toutes
neuves, si on en croit les usa-
gers qui s’en plaignent régu-
lièrement sur Twitter comme
dans les travées du marché,
sont glissantes et mal sépa-
rées des autres voies. Méadel
propose, elle, de rendre
Mont rouge entièrement cy-
clable et d’ouvrir une «formi-
dable cuisine» qui produira
de la nourriture bio et locale
pour les cantines.
«Formidable» peut-être, mais
ça n’a pas convaincu tous les
écolos du coin : à Montrouge,
EE-LV s’est allié avec
La France insoumise, Géné-
ration·s et l’association Nou-
vel’R (des dissidents du Parti
socialiste) pour former une
liste commune – mais sans
le PS, qui va au combat seul.
Le virage vert de Lengereau
et de Méadel? De «l’opportu-
nisme», tranche la tête de
liste de ce rassemblement de
gauche, Aurélien Saintoul,
31 ans. Et le candidat de dé-
rouler les éléments de son
programme : plan de rénova-
tion des écoles, création d’un
réseau de géothermie, régu-
lation d’Airbnb, revégétalisa-
tion de la ville. «Ma convic-
tion, c’est qu’on va passer au
second tour, dit-il. On sera
dans une triangulaire. Il y
aura un trou de souris et nous
allons y passer.» C’est ce sur
quoi parient aussi les autres
candidats.•
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