DIMANCHE 29 - LUNDI 30 MARS 2020 coronavirus | 9
Patients confinés à domicile, une urgence absolue
Les malades peu symptomatiques devraient être pris en charge dans des centres d’hébergement ou des hôtels
ANALYSE
C
’est un patient parmi des
milliers d’autres. Il se
présente à l’hôpital. Fié-
vreux, il tousse, a mal à
la gorge et une légère difficulté
pour respirer. Le médecin qui le re-
çoit porte un masque. Il lui expli-
que qu’on ne peut pas lui faire de
test, les instructions étant qu’on
les réserve aux malades graves et
aux personnels de santé. Il ajoute :
« Vous souffrez très probablement
d’une infection à coronavirus. Vo-
tre état ne nécessitant pas d’hospi-
talisation, je vais vous prescrire du
paracétamol et des masques de
protection. Vous irez les retirer à la
pharmacie près de chez vous. De re-
tour à votre domicile, faites atten-
tion à bien respecter les mesures
barrières. Mais, rassurez-vous, à vo-
tre âge, vous ne risquez rien. »
A la pharmacie, la pharma-
cienne est désolée : « Pas de mas-
que, je n’ai pas été livrée. Et on les
réserve de toute façon aux person-
nels de santé. »
Chez lui, le patient informe le
reste de sa famille de la situation. Il
est étiqueté « cas probable ». Vu ses
symptômes, on doit se comporter
avec lui comme s’il était atteint du
Covid-19. L’épouse, les deux en-
fants et la belle-mère du patient
accusent le coup. Dans leur trois-
pièces, la belle-mère dort sur le ca-
napé-lit du salon. Vivant seule et
pas très en forme, elle s’était réfu-
giée près de sa fille et de ses en-
fants, qui l’ont accueillie sans pro-
blème, puisque ça ne « devait pas
durer plus de quinze jours ».
Anecdotique cette histoire? Nul-
lement. Des dizaines de milliers de
personnes malades mais ne né-
cessitant pas d’hospitalisation im-
médiate sont aujourd’hui confi-
nées à domicile, où elles sont pri-
ses en charge par des médecins li-
béraux. Déjà 42 000 au 22 mars,
selon l’estimation de Santé publi-
que France dans son rapport heb-
domadaire. Combien depuis?
Combien la semaine prochaine? Il
existe des situations de logement
bien pires que celle-là.
Les spécialités de santé publique
sont unanimes : le risque en ren-
voyant chez eux ces malades peu
graves, c’est qu’ils transmettent le
virus à plusieurs membres de leur
famille, créant ainsi des centai-
nes, des milliers de « clusters » in-
trafamiliaux.
Illusions d’optique
C’est bien ce qui s’est passé en
Chine, avant que les Chinois ne re-
prennent le contrôle de la situa-
tion. En ouvrant des structures in-
termédiaires permettant de met-
tre en quarantaine ce type de pa-
tients, et en coupant du reste de la
Chine et du monde la totalité de la
province du Hubei. Le rapport de
la mission d’experts de l’Organisa-
tion mondiale de la santé (OMS)
envoyée en Chine à la mi-février
décrit parfaitement les mesures
mises en œuvre. Les experts indé-
pendants, américains et euro-
péens (aucun Français), étaient tel-
lement impressionnés par les suc-
cès chinois que leur coordinateur,
le Canadien Bruce Aylward, a tenu
une conférence de presse dès son
retour, le 24 février. Pour que tous
les pays puissent comprendre à la
fois les difficultés rencontrées par
la Chine, et comment elle a su y
faire face, le rapport intégral a été
mis en ligne deux jours plus tard.
Force est de constater que ce rap-
port a fait très peu d’émules, en
particulier en Europe.
Par rapport à d’autres pays euro-
péens qui recensent plus de cas
(mais qui font plus de tests), la si-
tuation de la France pourrait paraî-
tre légèrement plus favorable.
Rien n’est moins sûr. Nous ne sa-
vons pas combien de personnes
âgées sont mortes dans les établis-
sements d’hébergement des per-
sonnes âgées dépendantes (Eh-
pad). Contrairement aux pays asia-
tiques, nous faisons face à une
grave pénurie de masques de pro-
tection. Attention donc aux illu-
sions d’optique. Pour autant, se-
rions-nous condamnés aux cen-
taines de milliers de morts que
prédisent les modélisateurs?
Il n’est que temps, aujourd’hui,
d’avoir des idées novatrices, origi-
nales. En regardant ce que font
nos voisins, l’Espagne en particu-
lier, qui ne cesse, pour désengor-
ger des hôpitaux débordés,
d’ouvrir des structures intermé-
diaires d’accueil.
A Madrid, l’hôtel Gran Colon a
été le premier à ouvrir une telle
structure médicalisée. Initiative
d’autant plus intéressante que cet
établissement est situé à dix mi-
nutes à pied de l’hôpital Gregorio-
Marañon, le plus grand de la capi-
tale. D’autres établissements – une
quarantaine pour l’heure – ont
ouvert ou vont ouvrir dans la capi-
tale espagnole. Au total, 9 000 lits
devraient être mis à disposition.
Parmi ces hôtels reconvertis en
centres médicalisés figurent
même des établissements 5 étoi-
les. Ainsi du Cotton House Hotel,
au centre de Barcelone, qui a mis à
disposition 83 chambres. Pour
s’occuper des malades, il aura, se-
lon la direction, « un personnel qui
a reçu une formation spécifique
pour la protection de la santé ». « Le
personnel de nettoyage, de restau-
ration et de blanchisserie qui tra-
vaillera dans cet hôtel a l’expérience
du secteur sanitaire public et privé
de Barcelone. Parce que ce virus,
nous l’arrêterons unis. »
L’effort de « guerre » demandé
aux Français et aux entreprises
pourrait trouver dans cet exemple
espagnol une source d’inspiration
stimulante. Déjà, le groupe hôte-
lier Accor a mis à disposition des
chambres pour les personnels soi-
gnants et un hôtel pour des per-
sonnes sans-abri. Il faut aller beau-
coup plus loin. Les chambres et
studios de pratiquement tous les
hôtels des grandes villes sont as-
sez grands pour accueillir ce type
de patients. Ils sont équipées en ré-
seaux Wifi et télévisions de ma-
nière à pratiquer la télémédecine.
A priori, il n’y a aucune raison
pour que la plupart des personnes
symptomatiques, ou des patients
guéris à l’hôpital mais devant res-
pecter quinze jours de quaran-
taine, ne soient pas volontaires
pour se rendre dans ce type d’éta-
blissement ; ne serait-ce que pour
ne pas risquer de contaminer leurs
proches (ce qui est inévitable, sauf
pour les familles qui ont au moins
une pièce par personne et deux
salles de bains).
Justice sociale
C’est donc – aussi – une question
de justice sociale. Tous les patients
qui disposent de vastes logements
où ils peuvent s’isoler n’ont pas be-
soin d’y aller et préféreront sûre-
ment rester chez eux, ce qui ne
pose pas de problème.
Les 40 000 médecins et infir-
mières qui se sont portés volon-
taires pour la réserve sanitaire
pourraient être affectés préféren-
tiellement à la surveillance médi-
cale de ces lieux d’accueil. Reste-
rait à organiser la logistique, dis-
tribution de repas en particulier.
Là encore, les hôtels et les munici-
palités espagnoles nous mon-
trent la voie à suivre.
Il y a là une urgence absolue. Si
l’on ne fait rien, les hôpitaux des
régions les plus touchées seront
débordés au point qu’ils ne pour-
ront même plus servir de lieux de
consultation pour ces patients
Le risque, en
renvoyant chez
eux les malades
peu graves,
c’est de créer
des milliers
de «^ clusters^ »
intrafamiliaux
« suspects ». Un engrenage infer-
nal s’ensuivra, avec la multiplica-
tion de ces contaminations intra-
familiales ou entre amis.
Les pouvoirs publics, les grands
groupes hôteliers, les groupes de
services d’aide à la personne doi-
vent se mobiliser sans tarder. Cha-
que journée de perdue, ce sont des
milliers de contaminations qui
auraient pu, qui auraient dû être
évitées. Il y a aujourd’hui en
France 660 000 chambres d’hôtel
inoccupées.
Il y a deux jours, en regardant la
télévision, les Français ont certai-
nement dû être frappés par une
image : visitant le nouvel hôpital
militaire de campagne de Mul-
house, le chef de l’Etat avait revêtu
un masque de protection. Cette
image insolite rappelait à chacun
la pénurie qui frappe le pays. Rien
de plus normal évidemment que
de voir le président de la Républi-
que ainsi doté de matériel de pro-
tection. Mais, n’ergotons pas à l’in-
fini : il n’y a, aujourd’hui, pas de
masque pour tout le monde alors
qu’il en faudrait. Il n’y en a même
pas pour les personnes profes-
sionnellement les plus exposées
au virus. Ces dernières n’ont pas le
choix : médecins, infirmiers,
aides-soignants, policiers, cais-
siers de supermarché, éboueurs,
etc., leur présence est requise. En
revanche, un patient suspect de
coronavirus, non seulement sa
présence n’est pas requise à son
domicile s’il vit dans une relative
promiscuité avec son entourage,
mais elle est dangereuse.p
franck nouchi
A Dunkerque, une unité Covid-
dans un complexe sportif
La ville a réaménagé un bâtiment consacré aux sports en centre de
consultation pour les patients suspectés d’être atteints par le virus
lille - correspondance
A
défaut de joueurs, des
médecins se relaient sur
le terrain. A la place des
buts, des claustras en bois ont été
réparties dans la salle de
2 500 places pour délimiter six
box de consultation d’une ving-
taine de mètres carrés chacun. De-
puis lundi 23 mars − et pour une
durée indéterminée −, des soi-
gnants dunkerquois ont installé,
dans le complexe multisport des
Stades de Flandres de Dunkerque,
une unité de consultation dédiée
au Covid-19, en partenariat avec la
ville et la Caisse primaire d’assu-
rance maladie (CPAM).
« L’idée était de mettre en place
une unité de débordement, au cas
où... » , explique Thierry Mraovic,
médecin urgentiste. En moyenne,
depuis l’ouverture de cette unité,
une cinquantaine de personnes
ont été examinées chaque jour,
avec une légère hausse des consul-
tations vendredi.
Le protocole est strict : en cas de
signes infectieux (température,
toux, maux de tête), les habitants
sont invités à appeler leur méde-
cin traitant. En son absence ou sur
ses conseils, ils peuvent contacter
par téléphone l’unité Covid-
pour obtenir un rendez-vous dans
la journée. « On reçoit beaucoup
d’appels » , explique une des opéra-
trices en ligne. « Ça sonne plus que
ce que j’imaginais , confirme le
docteur Mraovic, âgé de 50 ans. On
avait prévu un seul médecin le pre-
mier matin, mais on a appelé du
renfort dès 13 heures. »
Neuf praticiens de SOS Méde-
cins, épaulés par une cinquan-
taine de médecins de garde des
maisons médicales du secteur, se
relaient pour recevoir dans l’un
des six box de consultation, entre
8 heures et 18 heures. Situé près de
l’hôpital et de la caserne des pom-
piers, le complexe sportif est des-
servi par un bus gratuit.
Entre lundi et vendredi, 85 % des
patients qui se sont rendus dans
cette unité Covid-19 sont ressortis
avec une suspicion de maladie. Le
reste des diagnostics étant des
rhino-pharyngites ou des sinusi-
tes. Aucun test de dépistage n’est
pratiqué. « Si les gens viennent, c’est
qu’ils ont des symptômes , explique
le docteur Mraovic. Ce que l’on fait
surtout, c’est les rassurer. » Les mé-
decins délivrent des ordonnances
pour du paracétamol et des arrêts
de travail si nécessaire.
« Appel aux dons »
Dès leur arrivée, les malades doi-
vent se laver les mains et porter
un masque. Après un appel à la
solidarité lancé le 18 mars par
Patrice Vergriete, le maire de
Dunkerque, un afflux de matériel
venu des entreprises, collectivi-
tés et particuliers a permis
d’équiper cette unité ainsi que le
centre hospitalier de Dunkerque,
les professionnels de santé du
secteur, la police nationale et mu-
nicipale, et les aidants familiaux.
En quarante-huit heures, plus
de 85 000 masques ont été collec-
tés par la ville, dont 33 420 FFP2.
« Je n’en reviens pas! Cet appel aux
dons a changé la donne » , insiste
le maire. Avant cela, l’édile rece-
vait « des appels de détresse » des
soignants, mais, là, « c’est une
vraie leçon pour l’histoire » , dit-il.
« On pense trop en mode logique
descendante de l’Etat vers les terri-
toires, comme si l’Etat devait tout
faire, tout diriger. Les ressources
sont là, il faut juste les organiser. »
Ainsi dotée, l’unité Covid-19 du
complexe sportif peut tourner à
plein régime. Les patients se suc-
cèdent tous les quarts d’heure. Au
bout de cinq jours, six personnes
ont été hospitalisées directe-
ment, et une cinquantaine ont
bénéficié d’un suivi par des infir-
miers. Parmi ces derniers, cer-
tains, dont l’état s’est dégradé, ont
finalement été renvoyés vers l’hô-
pital. « On est presque en médecine
de guerre : on trie beaucoup , es-
time l’urgentiste Thierry Mrao-
vic, diplômé en médecine de ca-
tastrophe. On surveille et on anti-
cipe en repérant les personnes en
risque de dégradation. »
Ailleurs dans la région, d’autres
unités se mettent en place pour
soulager les hôpitaux, comme à
Saint-Omer, Tourcoing, ou à Rou-
baix où un centre ambulatoire
dédié au Covid-19 a été mis en
place à la maison médicale de
garde située juste à côté de l’hôpi-
tal Victor-Provo.
« Tout cela permet de désengor-
ger les urgences et de diminuer les
risques de contagion dans les sal-
les d’attente des généralistes ,
ajoute le maire de Dunkerque.
J’espère juste que cette unité ne va
pas devoir rester ouverte trop
longtemps. » p
laurie moniez
Entre lundi
et vendredi, 85 %
des patients sont
ressortis avec
une suspicion
de maladie
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