Les Echos - 03.04.2020

(Chris Devlin) #1

  • GRASSE CONTINUE
    DE TOURNER
    Si le tourisme est paralysé sur la
    Côte d’Azur, le pôle industriel de
    Grasse continue à tourner. « Nous
    avons enregistré peu de demandes
    pour la mise en chômage partiel des
    personnels », confirme Philipe
    Massé, président de Prodarom, le
    syndicat professionnel qui fédère
    les entreprises du secteur. « Les équi-
    pements et mesures de protection
    sont de rigueur en temps normal
    dans nos usines, l es salariés sont donc
    préparés aux dispositifs exception-
    nels déployés aujourd’hui à cause du
    coronavirus. » Leur activité s’avère
    d’autant plus importante, que les


demandes de produits d’hygiène
explosent. Plusieurs entreprises,
des grands groupes comme Mane,
Robertet et IFF (LMR Naturals)
mais aussi des PME comme Arthès
ont adapté leurs chaînes de produc-
tion pour produire des solutions
hydroalcooliques dont les besoins
sont croissants. La demande éma-
nait au départ de l’hôpital de Grasse,
des autorités administratives et des
collectivités territoriales. « Les
industriels disposaient des matières
premières nécessaires à cette fabrica-
tion, ils ont pu faire monter en puis-
sance les quantités produites pour
fournir aussi d’autres établissements
et personnels de santé de la Région
Sud Paca », précise Philippe Massé.


  • AMADEUS INQUIÈTE
    A Sophia-Antipolis, le technopôle
    vit au ralenti avec un campus étu-
    diant fermé et une majorité de sala-
    riés en télétravail. Mais au-delà de la


crise sanitaire, ce sont les consé-
quences économiques qui risquent
de peser sur le dynamisme de ce ter-
ritoire qui vient de fêter ses 50 ans et
de franchir le cap des 40.000 sala-
riés. Spécialisé dans les technolo-
gies appliquées au tourisme princi-
palement dans le secteur aérien
(systèmes de réservation, gestion de
plateformes), Amadeus, la locomo-
tive de Sophia-Antipolis, subit de
plein fouet les conséquences du
crash mondial du trafic aérien. Le
groupe international, dont le siège
est à Madrid, a déjà annoncé un plan
de réduction des coûts de 300 mil-
lions d’euros. Son site sur la Côte
d’Azur, qui est aussi son plus grand
centre de R&D dans le monde avec
4.200 salariés avec jusqu’ici un
rythme de recrutements autour de
250 personnes par an, fait aussi tra-
vailler un millier de sous-traitants.
Ils ne devraient pas être épargnés
par le régime maigre qui menace.


  • LE CHANTIER
    DE MONACO GELÉ
    Enfin, le confinement mis en place
    par la principauté de Monaco tou-
    che en première ligne les quelque
    41.000 Français qui travaillent pour
    des entreprises monégasques dans
    différents secteurs (services aux
    entreprises, hôtellerie/restauration,
    services financiers, BTP etc.). Des
    mesures de chômage technique ont
    été adoptées et les solutions de télé-
    travail déployées. Mais l’activité,
    comme partout ailleurs, tourne au
    ralenti. Le chantier phare de la prin-
    cipauté, celui de l’extension en mer,
    est passé en quelques semaines de
    300 à 40 personnes sur site. Et les
    mesures en cours de déploiement
    pour aménager des installations
    permettant aux salariés de tra-
    vailler en toute sécurité ne permet-
    tront la reprise du travail que de
    quelques dizaines de personnes
    dans les prochains jours. —C. N.


Grasse travaille, Sophia Antipolis ralentit


et Monaco est paralysé


Le pôle industriel de
la parfumerie de Grasse
continue de fonctionner,
notamment grâce
à la fabrication en urgence
de produits d’hygiène.


A Cannes, le Festival international du film pourrait se tenir fin juin ou début juillet, mais bien des professionnels en doutent. Photo Lionel Urman/Sipa USA/Sipa

La PME de Sophia Antipolis
(Alpes-Maritimes) fait un pas de
plus dans le marché spatial. Elle
vient d’acquérir un ancien site
désaffecté du CNRS de
1.350 mètres carrés sur les
hauteurs d e Grasse pour y
installer un centre de référence
dans le traitement des données
spatiales.
Spécialisé dans le traitement
des données satellitaires portant
sur l’observation de la Terre et de
l’univers, Acri enregistre depuis
cinq ans une croissance d’activité
annuelle de 20 %. « Avant, nous
travaillions essentiellement avec
les grands laboratoires publics et
des agences spatiales dans le cadre
de programmes européens et
internationaux. Aujourd’hui,
nous pouvons proposer de nou-
veaux services environnementaux
autour de l’exploitation des don-
nées satellitaires géolocalisées »,
explique Odile Fanton d’Andon,
directrice générale d’A cri.
« Nous allons ajouter à notre
expertise la réception, l’archivage
et la distribution de ces données »,
précise-t-elle. Cela passe par l’ins-
tallation de récepteurs sur le nou-
veau site qui occupe un plateau
surplombant la Méditerranée.
Elle a aussi commencé à recruter
des spécialistes et près de 70 per-

La PME de Sophia
Antipolis investit
dans le « segment sol »
des nouvelles activités
spatiales, avec la création
à Grasse d’un centre
de traitement des données
satellitaires.

Acri projette d’ouvrir


un centre de traitement


des données satellitaires


que Claude Batel dont les b oulange-
ries fournissent habituellement
hôtels, écoles, restaurants et événe-
ments sur le bassin cannois.
La CCI Nice Côte d’Azur a mis en
place un guichet unique pour
accompagner les TPE et PME du
département et un fonds de 8 mil-
lions d’euros, alimenté par les col-
lectivités territoriales a été mobilisé
alors que l e Conseil régional
annonce u n plan d’urgence pour les
entreprises de la Région Sud Paca
de 65 millions d’euros.
« Nous avons connu des moments
difficiles, comme lors de l’attentat sur
la Promenade des Anglais en
juillet 2 016, l a différence aujourd’hui,
c’est le manque de visibilité pour
bâtir un plan de relance de la fré-

quentation touristique, tous les pays
sont t ouchés par c ette p andémie dont
on ignore combien de temps encore
elle va s évir », reconnaît Rudy S alles,
adjoint au maire chargé du tou-
risme à Nice.

Chômage technique
ou télétravail
La ville doit accueillir le départ, le
27 juin, et la première é tape du Tour
de France 2020. Aura-t-il lieu?
Sera-t-il organisé sans accueil du
public, comme l’a suggéré la minis-
tre des Sports? « Nous ne voulons
pas d’un ersatz de Tour de France,
mieux vaudrait le reporter s’il n’y a
pas de fête autour, l’image donnée
serait désastreuse », insiste Denis
Cippolini. A Monaco, qui s’est ali-

gné sur les mesures de confinement
françaises, le 78e G rand Prix d e F1, l e
plus grand événement sportif de
l’année, programmé du 21 au
24 mai, a été annulé. La Société des
Bains de Mer a fermé casinos et
hôtels (l’Hôtel de Paris et le Monte-
Carlo Bay accueillent les seuls
clients à l’année) et le service de
réservations des séjours sera clos
jusqu’au 30 avril. Près de 90 % des
effectifs (4.000 personnes) du
groupe qui exploite ausski à
Monaco des restaurants, des salles
de spectacles et un parc immobilier
de boutiques et de bureaux, sont
soit au chômage technique, soit en
télétravail, lorsque c’est possible,
une situation sans précédent dans
l’histoire de la Principauté.n

lSalons professionnels, Festival de Cannes, Grand Prix de Monaco, lancement du Tour de France. Les uns après


les autres, les événements qui drainent hommes d’affaires et touristes sur la Côte d’Azur sont reportés ou annulés.


lLe manque de visibilité sur la durée de la crise complique l’adoption d’un plan de relance.


La Côte d’Azur désemparée par l’hiver


touristique qui n’en finit plus


Christiane Navas
— Correspondante à Nice


Le Negresco à Nice a fermé ses por-
tes, les grands hôtels de la Croisette
à Cannes, le Martinez, le Carlton et
le Majestic, aussi. « 97 % de nos
hôtels sont fermés mais 1.100 cham-
bres sont mobilisables si besoin pour
le personnel médical, les routiers, des
malades », résume Denis Cippolini,
président de la Fédération de
l’hôtellerie, de la restauration et du
tourisme Nice Côte d’A zur.
Le secteur du tourisme sur la
Côte d’A zur, avec la deuxième capa-
cité hôtelière en France derrière la
région parisienne, paie un lourd tri-
but à la crise sanitaire du Coronavi-
rus. « Le tourisme, c’est 20 % du PIB
du département, 175.000 emplois
directs et induits », rappelle le prési-
dent. A Cannes, le Palais d es
Festivals, où habituellement se suc-
cèdent les grands Salons profes-
sionnels internationaux de mars à
juin, a été aménagé pour héberger
les sans-abri pendant la période de
confinement. Le Mipim (immobi-
lier), le Midem 2020 (musique), un
temps reportés, ont été finalement
annulés. Le Festival international
du film pourrait se tenir fin juin ou
début juillet, mais bien des profes-
sionnels en doutent.


Guichet unique pour
accompagner TPE et PME
« No us travaillons d’arrache-pied
avec les organisateurs de manifesta-
tions et la direction du Palais des fes-
tivals pour trouver des solutions afin
de pouvoir, comme pour le Cannes
Lions en octobre, accueillir au s econd
semestre les manifestations repor-
tées », précise Christine Welter, pré-
sidente des hôteliers cannois. « De
septembre à décembre, le planning
s’étoffe et devrait être bien rempli »,
se veut-on optimiste à la direction
du Palais des Festivals.
Mais dans l’immédiat, ce sont
toutes les activités liées au tourisme
d’affaires et de loisirs (qui pèsent
pour 50 % dans le PIB du bassin
cannois) qui sont à l’arrêt. « Vingt-
huit de mes 40 salariés sont au chô-
mage partiel, deux des trois maga-
sins sont fermés, et le laboratoire
tourne à 10 % de son activité », indi-


TOURISME


sonnes devraient y travailler d’ici
à quatre ans.
Dans l’immédiat, Acri a déjà
investi 720.000 euros pour
l’acquisition du site fin 201 9
auprès de la ville de Grasse, qui
l’avait racheté à l’Etat avec le
concours de l’EPF (établissement
public foncier) Paca. Pour l a réno-
vation des bâtiments et l’achat des
équipements nécessaires, la PME
a prévu d’investir 3 millions
d’euros. Elle va se doter égale-
ment d’outils d’intelligence artifi-
cielle indispensables pour traiter
une masse de données satellitai-
res appelée à croître pour assurer
la surveillance des milieux et
événements naturels ou
encore le suivi des mutations
climatologiques.

Acri poursuit en parallèle le
déploiement de ses collabora-
tions à l’international. La PME
(18 millions d’euros de chiffre
d’affaires consolidé et un effectif
de 120 personnes), qui dispose de
quatre bureaux en France, étoffe
son réseau de filiales à l’é tranger,
après le Luxembourg, la Grande-
Bretagne, l’Espagne, le Canada et
le Maroc, elle vient de s’implanter
en Italie et en Inde. —C. N.

La PME qui dispose
de quatre bureaux
en France, étoffe
son réseau de filiales
à l’étranger,
notamment
en Italie et en Inde.

PME & REGIONS


Les EchosVendredi 3 et samedi 4 avril 2020

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