38 // Lundi 23 mars 2020 Les Echos
Goldman Sachs aura plus de mal à justifier
la rémunération de ses hauts dirigeants.
« It is a fluid and historic situation », précise la lettre du PDG, David Solo-
mon, à l’occasion de la prochaine assemblée annuelle. On ne saurait dire
moins à l’heure où Goldman Sachs s’active en « bon soldat » de la Fed, com-
me ses concurrentes « systémiques ». « Government Sachs » vient ainsi de
soulager deux sicav monétaires maison en leur rachetant cash des actifs,
après avoir utilisé la fenêtre de refinancement des prêts pour les ménages
et les PME, et après la suspension des rachats de ses propres d’actions. Et
c’est la moindre des choses. Sans un changement de statut destiné à accé-
der à cette précieuse liquidité fédérale, il lui aurait été difficile de tenir le
choc lors de la panique générale de 2008. Reste à savoir si sa politique de ré-
munération sera jugée, elle aussi, à la hauteur de la situation exceptionnel-
le pour pouvoir être validée à 91 % des suffrages comme l’an dernier. Bien
sûr, la partie non cash du paquet total de 27,5 millions de dollars du PDG est
calculée sur la base du cours du 16 janvier dernier, supérieur de 81 % au prix
actuel. Et ce volet en actions pèse 70 % du total contre 55 % chez les pairs, de
quoi aligner les intérêts entre dirigeant et actionnaires. Mais le cours est
resté à la traîne de JP Morgan ou Morgan Stanley l’année dernière, sans
vraiment mieux résister depuis lors. Le PDG se situe pour sa part dans la
même ligue que ses collègues Jamie Dimon ou James Gorman, les plus
vieux loups de mers de Wall Street.
Intérêts moins alignés
Vous avez adoré le (trop) long
feuilleton des banques zombies
de la crise financière, vous fris-
sonnez déjà avec la nouvelle sai-
son des entreprises mortes-vivan-
tes de la grande pandémie. Tous
les regards se concentrent sur les
« junk bonds » aux Etats-Unis,
mais les cigales de la dette sont
aussi européennes. La sous-per-
formance boursière des 77 va-
leurs qui, avant même l’épidémie
de coronavirus, étaient classées
en qualité de crédit inférieure
(« non-investment grade ») selon
la notation indépendante d’Al-
phaValue, s’est accentuée depuis.
La dégradation des perspectives
catalysant la faiblesse de certains
bilans, leur liste s’est allongée en
quelques jours de vingt-huit
noms, venant de l’aérien, du pé-
trole, de la chimie, de la sidérur-
gie, de l’immobilier, et de l’auto-
mobile. Soit au total le quart de
l’univers couvert par AlphaValue
et un pic de six ans.
La cohorte des entreprises européennes au bilan affaibli s’allonge.
Les hasards du jeu
La Française des Jeux demeure l’une des
introductions en Bourse les plus résistantes.
Aux âmes bien nées... Si la valeur n’attend point le nombre d’années,
la Française des Jeux, quatre-vingt-sept ans au compteur, mais à peine
plus de quatre mois de vie boursière, ne s’attendait pas à ce qu’elle soit
aussi vite et brutalement testée. Les 700 milliards d’euros de richesse
perdue en un mois à la roulette du « coronakrach » apparentent la pla-
ce parisienne à un casino où même la « maison » ne gagne pas. La table
de Stéphane Pallez, la patronne de la FDJ, n’a toutefois pas à rougir de sa
main. Au plus fort de ce coup de tabac, la moins-value potentielle
des 500.000 petits porteurs qui ont souscrit en novembre dernier n’a ja-
mais dépassé l’euro symbolique (ramenée à 50 centimes vendredi, soit
2,6 % et moins que le 0,64 euro de dividende à verser en juin). Elle de-
meure donc parmi les plus résistantes des introductions en Bourse de
ces six dernières années, même si les millésimes plus anciens des mar-
chés (+198 % pour Euronext depuis 2014), de la finance (+190 % pour
Worldline), de la gestion d’actifs (+20 % pour Amundi depuis 2015) et de
l’énergie (+15 % pour Neoen depuis 2018) ont eu le temps de faire mieux.
Aux yeux des analystes d’Oddo BHF, le cours intègre le choc du confine-
ment et des annulations de compétitions sportives, qui amputent leur
prévision de chiffre d’affaires et de résultat pour 2020 de respective-
ment 8 % et 16 %. La hausse toujours espérée du coupon l’an prochain
n’abandonnera rien de plus au hasard.
// Budget de l’Etat 2020 : 39 9,2 milliards d’euros // PIB 2019 :2. 47 9,4 milliards d’euros courants
// Plafond Sécurité sociale :3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10 ,15 euros à partir du 01-01-202 0
// Capitalisation boursière de Paris :1.827,78 milliards d’euros (au 06-01-2020)
// Indice des prix (base 100 en 2015) :103,55 en décembre 2020 // Taux de chômage (BIT) :8,6 % au 3etrimestre 2019
// Dette publique :2.415,1 milliards d’euros au 3etrimestre 2019
=
Les chiffres de l’économie
La cigale et la pandémie
crible
EN VUE
Martin Hirsch
L
e confinement ce n’est fait pour
personne et certainement pas
pour lui. Dans le « JDD » cet été le
directeur général de l’Assistance
publique de Paris se défendait de toute
tentation d’île déserte : « Je d éteste les îles et
ne pourrai pas tenir plus de 48 heures dans
le désert. J’aime la solitude des cimes mais
encordé à quelqu’un. Je n’ai jamais eu la
tentation de m’éloigner des autres car je
peux tenir tous les fils de ma vie grâce aux
liens que j’ai tissés avec ceux avec qui j’ai tra-
vaillé. » Certes, Edouard Louis, écrivain
boursouflé, l’a comparé dans « Qui a tué
mon père? » à « Thiers ou à Jack l’Even-
treur », au motif, résume « Le Monde »
que le créateur du RSA « broya le dos de
son pauvre papa en l’obligeant à reprendre
un travail pour justifier la prestation sociale
dont il bénéficiait ». A part cela, qu’on se le
dise, Martin le souriant est un animal
social. Il aurait voulu être médecin ou
chercheur, a d’ailleurs poursuivi cinq ans
d’études de médecine mais sera normalien
et énarque. Le « social » est devenu le fonds
de commerce du conseiller d’Etat. Il en a
collectionné les galons. Pharmacie cen-
trale des hôpitaux, Agence de sécurité des
aliments, présidence d’Emmaüs France. Il
fut aussi haut-commissaire pour le gouver-
nement Fillon mais il tient toujours à préci-
ser que s’il a du cœur celui-ci est à gauche.
Bien sûr! Aujourd’hui, à 56 ans, il retrouve
en Jérôme Salomon, le directeur général de
la Santé, un des membres de l’é quipe des
« bébés Kouchner », formée lorsqu’en 1999
le « French doctor » devint secrétaire d’Etat
à la Santé. Hirsch était son directeur de
cabinet, Salomon, son conseiller technique
en santé publique. Le temps est à nouveau
venu de se serrer les coudes.
(
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Le CAC 40 à plus de 4.000 points
- La Bourse de Paris a renoué avec
les 4.000 points, vendredi, à la suite
d’un rebond lié en partie à des phéno-
mènes techniques mais aussi à une
détente sur le marché obligataire.
L’indice CAC 40 a pris 5,01 % (sa
meilleure performance quotidienne
depuis novembre 2011) et clôturé à
4.048,80 points. La veille, il avait fini
sur une progression de 2,68 %. Au
cours de la semaine écoulée, le CAC 40
a perdu 1,86 %. Depuis le 1 er janvier, il a
chuté de plus de 32 %. Pour rappel, il y
a tout juste un mois, l’indice était à un
sommet depuis 2007 (à 6.111,24 p oints.
Ailleurs, en Europe, la tendance
était identique. Le DAX a gagné
3,7 % ; le FTSE, 0,76 %. Mais Wall
Street a clôturé en fort repli : le Dow
Jones a perdu 4,55 %, le S&P 500
4,34 % et le Nasdaq 3,79 %
Du côté des valeurs à la Bourse de
Paris, le secteur aérien a rebondi.
Airbus a gagné 18,70 %, ADP a pris
22,78 % et Air France-KLM, 1,47 %.
En revanche, les valeurs défensives
étaient en queue de peloton. Carre-
four a reculé de 5,05 %. Danone a
perdu 3,83 % et Sanofi 2,86 %.
La Française des Jeux a pro-
gressé de 2,70 %. Le groupe a pré-
venu que l’épidémie de Covid-19
affectera « significativement » son
exercice 2020, notamment en
réduisant de façon importante les
mises sur les paris sportifs et du fait
de la suspension, par précaution,
d’un jeu de loterie.