Les Echos Lundi 6 avril 2020 ENTREPRISES// 21
des 30 % non couvert, le coût glo-
bal de l’emprunt peut potentielle-
ment baisser, si ces grands groupes
acceptent de donner des garanties
et des sûretés aux banques.
Après un an, la facture
grimpe
Reste à savoir si Air France-KLM,
comme les grandes entreprises
tentées d’ouvrir des discussions
avec la place bancaire, sera con-
traint de repousser ses échéances
de remboursement. Après un an,
la facture risque de grimper. « Le
coût de la ressource peut varier les
années prochaines et ne pas néces-
sairement être toujours proche de
0 », prévient-on à Bercy.
Le coût de garantie va monter e n
flèche : si l’entreprise repousse ses
échéances d’un an, son prix double
(à 100 points de base), et si trois ans
sont nécessaires, il quadruple
(200 points de base). Et ce, sans
compter la charge des deux autres
milliards que négocie KLM avec
des banques néerlandaises,
comme l’a révélé Reuters. Beau-
coup repose donc sur les scénarios
de sortie de crise.
Douze ans après la crise finan-
cière, et toutes choses égales
par ailleurs, le géant franco-
belge Dexia a toujours besoin de la
garantie des Etats français et bel-
ges sur ses 85 milliards d’euros
d’émissions de dette. Une garantie,
elle, facturée 5 points de base.n
Un premier méga prêt garanti
par l’Etat dans la crise
Anne Drif
@ANNDRIF
Test décisif pour les méga prêts
garantis par l’Etat. En tentant de
décrocher 4 milliards d’euros
d’aide financière auprès de Bercy
et des banques françaises, Air
France met à l’épreuve le pont
aérien de cash dès son lancement.
Un sauvetage très attendu par les
autres grandes entreprises forcées
de frapper à la porte des établisse-
ments de crédit pour faire face à
leurs besoins de liquidité. Notam-
ment sur le plan des conditions
financières.
« Prix coûtant »
D’après le cahier des charges
publié par Bercy, il n’est en effet pas
question pour l’Etat français de
garantir 90 % des milliards d’euros
ainsi consentis, comme pour les
entreprises de moins de 1,5 mil-
liard d’euros de chiffre d’affaires.
Avec plus de 27 milliards d’euros de
chiffre d’affaires annuel, le groupe
aérien tombe dans la catégorie des
Air France, qui tente de
décrocher 4 milliards de
prêts garantis auprès de
Bercy, va tracer la voie pour
les autres grandes entrepri-
ses pressées d’obtenir
une aide financière.
Des prêts « à prix coûtant »
ont promis les banques.
de la reprise, à des concurrents par-
fois dopés aux financements
publics. A titre de comparaison, les
différentes aides proposées aux
principales compagnies américai-
nes représentent de 10 à 1 2 mil-
(
Lire également « Crible »
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La France et les Pays-Bas discutent d’une
aide financière massive à Air France-KLM
Air France-KLM devrait
bénéficier de prêts garantis
par les Etats français
et néerlandais pour un total
de 6 milliards d’euros,
afin de faire face
aux besoins de liquidités.
Mais une injection directe
de capital reste également
envisagée à moyen terme.
bilité à moyen terme, y compris
une renationalisation temporaire
d’Air France-KLM, comme l’a
récemment confirmé le Premier
ministre Edouard Philippe.
Un « pool » bancaire
en préparation
Les gouvernements français et hol-
landais, qui détiennent chacun
14 % du capital d’Air France-KLM,
ont apparemment mis leurs diver-
gences de côté et sont tombés
d’accord sur la nécessité de soute-
nir Air France-KLM par tous les
moyens.
Mais dans tous les cas et dans
l’immédiat, Air France-KLM aurait
besoin d’un crédit pour faire face à
ses besoins de liquidités, de l’ordre
de 1 milliard à 2 milliards d’euros
par mois. Un « pool » bancaire
devrait donc apporter ces liquidi-
tés, sous forme de prêts garantis
par les deux Etats.
L’objectif serait de donner à Air
France-KLM les moyens financiers
d’affronter une longue crise, tout en
conservant de quoi jouer un rôle
dans la phase de consolidation qui
suivra probablement en 2021. Si la
survie du groupe n’est pas en jeu,
Air France-KLM va en effet se
retrouver confronté, au moment
liards de dollars par entreprise.
Même chose pour Singapore Airli-
nes. Et selon certaines sources, le
groupe Lufthansa pourrait égale-
ment bénéficier d’une enveloppe
globale de 11 milliards d’euros.
Si la survie du groupe n’est pas en jeu, Air France-KLM va se retrouver confronté, lors de la reprise, à des concurrents parfois dopés aux financements publics.
Bruno Trévidic
@BrunoTrevidic
A l’instar de Lufthansa et des prin-
cipales compagnies américaines,
Air France-KLM va bénéficier
d’une aide financière massive de la
France et des Pays-Bas pour passer
la crise. Engagées depuis plusieurs
semaines, les discussions entre
Paris et La Haye sur le type d’aides à
apporter au groupe se poursuivent.
Mais selon les informations
de l’agence Reuters, elles pour-
raient déboucher très prochaine-
ment sur l’annonce de prêts garan-
tis par les deux pays, pour un
montant total de 6 milliards
d’euros – dont 4 milliards pour la
partie française.
Plusieurs solutions ont été envi-
sagées, dont une injection directe
de capital par émission d’actions
nouvelles, ainsi que des obligations
convertibles. Cette hypothèse d’une
injection de capital reste une possi-
Plusieurs solutions
ont été envisagées,
dont une injection
directe de capital
par émission
d’actions nouvelles,
ainsi que
des obligations
convertibles.
prêts couverts à seulement 70 %.
Le solde restant pleinement à ris-
que pour les banques prêteuses,
qui pourraient donc légitimement
poser leurs conditions.
Cependant confirme-t-on à
Bercy, les promesses des banques
d’octroyer à « prix coûtant » les
prêts garantis par l’Etat (PGE)
valent autant pour les petites
entreprises que les grandes. Les
établissements mentionnant
même un coût actuel de leur res-
source – qui permet de calculer le
coût total une fois ajouté celui de la
garantie –, proche de zéro pour la
première année. « L’engagement
des banques sur le coût de la res-
source vaut pour tous les PGE et
donc toutes les entreprises emprun-
teuses, quelle que soit leur taille. Cet
engagement vaut sur la durée du
prêt et la totalité de son montant »,
explique le ministère des Finances.
L’Etat lui facture sa garantie
publique 50 points de base sur les
douze premiers mois pour les
grandes entreprises. Sur le solde
70 %
Avec plus de 27 milliards
d’euros de chiffre d’affaires
annuel, le groupe aérien tombe
dans la catégorie des prêts
couverts à seulement 70 %.
Laurent
G
randguillot/RÉA