20 |culture VENDREDI 21 FÉVRIER 2020
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Koba LaD, rappeur non grata pour les festivals
Le Francilien de 19 ans a relayé une capture d’écran approuvant le meurtre d’un adolescent homosexuel
K
oba LaD aurait voulu
saboter sa carrière qu’il
ne s’y serait pas pris
autrement. Depuis les
années 2010, les artistes de
culture urbaine, rap comme dan
cehall, savent que les propos hai
neux et homophobes qu’ils peu
vent tenir dans leurs chansons
ou en public risquent de mettre
fin, à raison, à leur carrière.
A 19 ans, Koba LaD, dont les deux
premiers disques sont certifiés
disque de platine et dont la tour
née des festivals d’été s’annon
çait triomphale, est en train d’en
faire l’expérience.
Le 16 février, en soirée, le rap
peur relaie sur sa « story » Snap
chat la capture d’écran d’un de
ses contacts, soit l’article d’un
site, Franbuzz, habitué des infos
sensationnelles et des fake news,
titré : « Ce père tue son propre fils
de 14 ans parce qu’il était gay ».
Audessus du titre, des émojis
(poignées de main) et, dessous,
un commentaire : « Bien joué! »
L’article raconte le meurtre qui
a eu lieu en novembre 2017 dans
une petite ville américaine en pé
riphérie de Las Vegas (Nevada)
d’un adolescent de 14 ans, homo
sexuel, tué par son père qui pré
férait « le voir mort plutôt que
gay ». Koba LaD l’a inclus dans sa
« story » comme s’il s’agissait
d’un banal fait divers.
« Une dinguerie »
Dès le lendemain, à 13 heures, le
relais a disparu de son Snapchat
et le rappeur, dans une vidéo,
tente de s’expliquer... en s’enfon
çant encore un peu plus. Grand
sourire, les dreadlocks dans les
yeux, il commente : « On essaie
de polémiquer, de me coller une
étiquette d’homophobe. Moi, je
ne suis pas homophobe. Chacun
pour soi, Dieu pour tous. Moi, j’ai
mis un screen [capture d’écran]
hier et c’est vrai je n’aurais pas dû
le mettre, mais je cautionne pas
du tout le meurtre, ni l’enfant gay.
Rien à voir, hors sujet, c’est une in
compréhension (...). Il faut souli
gner que le screen (...), les mains
qui se serrent, le “bien fait”, c’est
pas moi qui l’ai marqué. »
Quelques heures plus tard, à
23 h 25, dans un Tweet rempli de
fautes d’orthographe, le rappeur
réitère ses excuses : « Que ce soit
clair la famille : je ne cautionne
pas le meurtre et je suis contre
l’homophobie. On m’avait envoyé
l’image d’un homme qui avait tué
son fils parce qu’il était gay. J’étais
choqué parce que c’était une din
guerie, c’est pour ça que j’ai re
posté. J’ai fait ça en quelques se
condes sur mon tel, j’ai pas capté
le “bien joué”. C’est de ma faute,
j’aurais dû mieux voir... »
Ces excuses pour le moins ma
ladroites n’y feront rien. Le 18 fé
vrier, les organisateurs du Main
Square Festival, à Arras (Pasde
Calais), le déprogramment : « Si
nous voulons croire en la mala
dresse d’un jeune homme dont
les actes ont pu dépasser la pen
sée dans un contexte d’hypercon
nectivité, il n’en demeure pas
moins que les idées qui ont été vé
hiculées n’ont pas leur place dans
la Citadelle [d’Arras]. » Ceux du
VYV festival, à Dijon (Côted’Or),
sont plus cinglants et appellent
l’intéressé à prendre ses respon
sabilités : « Maladresse ou con
viction, il en va de la responsabi
lité d’un artiste populaire, quels
que soient son âge et ses
positions, de ne pas susciter par
son comportement la haine à
l’égard de l’autre. »
Cinq autres annulations, et
non des moindres, vont suivre :
Garorock (Marmande, LotetGa
ronne), le festival de Dour, en Bel
gique, puis We Love Green (Paris)
et Marsatac (Marseille), qui sont
pourtant habitués aux provoca
tions des artistes de rap. Le collec
tif SOSHomophobie s’est associé
à la vague d’indignation en ju
geant les « excuses » de Koba LaD
« inappropriées et insuffisantes »
pour « masquer l’homophobie dé
complexée dont il a fait preuve ».
Ce n’est pas la première fois que
des rappeurs doivent assumer les
conséquences de propos homo
phobes. En novembre 2010, 17
concerts (sur une tournée de 25
dates) de Sexion d’assaut avaient
été annulés. Dans un entretien
au magazine spécialisé Interna
tional hiphop publié six mois
plus tôt, un des rappeurs du
groupe, Lefa, s’était revendiqué
« 100 % homophobe ». Face à la le
Le collectif
SOS Homophobie
s’est associé
à la vague
d’indignation
et a jugé ses
excuses
« inappropriées
et insuffisantes »
vée de boucliers, Sexion d’assaut
avait alors entrepris de rencon
trer des associations LGBT dans
les villes où il avait été dépro
grammé, et Lefa avait reconnu
que la polémique l’avait fait « mû
rir à vitesse grand V ».
Cinq ans plus tôt, en Grande
Bretagne, la campagne Stop Mur
der Music, qui travestissait sur
des affiches les huit chanteurs de
dancehall ayant appelé au meur
tre d’homosexuels dans leurs
chansons, avait amené les labels
et les promoteurs de concerts à
signer un accord : ces artistes ne
pouvaient monter sur scène qu’à
la condition de retirer de leur ré
pertoire les textes incriminés.
Aux EtatsUnis, deux personnali
tés du rap récompensées en jan
vier lors des Grammy Awards, Ty
ler The Creator et Lil Nas X, ont
fait leur coming out, bisexuel et
homosexuel, sans que cela ne
provoque de réactions hostiles
dans leur milieu.
stéphanie binet
Les noces joyeuses du
classique et de la chanson
Aurore Bouston et Marion Lépine passent
d’un registre à l’autre dans « Opérapiécé »
SPECTACLE MUSICAL
C’
est une jeune femme un
peu naïve, qui se rêve
chanteuse pour être ap
plaudie, par passion aussi. A l’issue
d’une rencontre avec une sorcière,
qui va revenir auprès d’elle sous di
vers traits, elle arrive à Paris. Dé
couvre le quotidien de la ville et la
difficile ascension vers son but.
Elle fait aussi l’expérience de
l’amour, de ses tourments, de
l’amitié et de ses trahisons, tandis
que, dans l’ombre, la sorcière la
manipule. Tout finira bien. En
chansons, puisque Opérapiécé,
présenté à L’Essaïon, à Paris, jus
qu’au 25 mars, est chanté de bout
en bout à partir de mélodies du ré
pertoire classique et d’airs de la va
riété française – avec aussi deux ci
tations de pop anglosaxonne.
Mais contrairement à d’autres
spectacles qui empruntent aux
deux genres en gardant les paro
les, ses deux interprètes, Aurore
Bouston et Marion Lépine, ont
écrit des textes originaux, ne gar
dant à l’occasion que quelques
éléments d’un refrain ou d’un
couplet. Côté classique, des
ouvertures d’opéra, des extraits
de symphonies (Brahms, Mozart,
Mahler, Beethoven...), beaucoup
de « tubes » que même celles et
ceux peu au fait de ce répertoire
vont reconnaître (Peer Gynt, Une
nuit sur le mont Chauve, Le Lac des
cygnes, Boléro...). Côté chanson, le
choix est vaste, des années 1930
aux années 1980, là aussi avec des
succès connus de tous, de Michel
Fugain, Jacques Brel, Claude
François, Alain Souchon, Dalida,
Diane Dufresne, Cora Vaucaire,
Serge Gainsbourg...
En une dizaine de séquences,
tout cela se mêle, se répond. La
Marche funèbre d’une marion
nette, de Gounod, nous mène
dans les couloirs du métro où l’on
retrouve Le Poinçonneur des Lilas,
les trois temps de la Valse des
fleurs, de Tchaïkovski, annoncent
ceux de Pigalle et de La Romance
de Paris. Aurore Bouston et Ma
rion Lépine passent d’un registre
à l’autre avec aisance. Formées à la
précision et à l’exigence du lyri
que, elles se faufilent sans raideur
dans la variété – d’autres exem
ples de cantatrices, parfois célè
bres, s’y essayant ont souvent été
moins convaincants. Avec elles,
en alternance Marion Buisset ou
Vincent Carenzi à l’accordéon.
Dans un traitement fin, qui con
dense l’ampleur orchestrale, évite
les clichés javamusette.
Virtuosité vocale
Opérapiécé se révèle souvent
drôle dans son propos, par exem
ple dans une séquence sur la
quête du statut d’intermit
tente du spectacle, n’en rajoute
pas dans le lacrymal dans les
parties qui convoquent l’émotion
(l’amour, la solitude). On y entend
une virtuosité vocale – ainsi des
textes mis sur le mouvement ra
pide de l’ouverture de Guillaume
Tell, de Rossini, ou sur le Boléro, de
Ravel –, un entrain constant dans
le jeu avec les mots, un respect
dans les transformations des tex
tes des chansons. Avec des chan
gements de costumes à vue, des
pas de danse et des mouvements,
tout en chantant, qui apportent à
cet ensemble inventif un rythme
supplémentaire.
sylvain siclier
Opérapiécé, L’Essaïon, 6, rue
PierreauLard, Paris 4e. Mardi et
mercredi, à 21 heures, jusqu’au
25 mars (relâche mardi 3 mars). De
18 à 25 €. Reprise au Lucernaire,
53, rue NotreDamedesChamps,
Paris 6e, du 13 mai au 21 juin.
PAT R I M O I N E
La crypte archéologique
de Notre-Dame devrait
rouvrir fin mars
Située sous le parvis de la
cathédrale NotreDame, la
crypte archéologique devrait
rouvrir au public fin mars, a
indiqué mercredi 19 février
l’adjointe au patrimoine de la
Mairie de Paris, Karen Taïeb,
lors d’une audition de la
mission d’information de
l’Assemblée nationale. Cette
réouverture est suspendue
à la dépollution du site. « Si
tout se passe bien, on attend
une ouverture du parvis, sans
doute partielle, au cours du
premier semestre », a précisé
le premier adjoint, Emma
nuel Grégoire. – ( AFP.)
enpartenariatavec et
entrée gratuite sur inscripti on : http://www.nouvelobs.com/2049 en partenaria t avec
Quelle santé
en 2049?
Jeudi 27 février à 18h
Liberté Living-Lab
9, rue d’Alexandrie, 75002 Paris
18h
IntroductIon
Pascal Picq,
paléoanthropologue,
maître deconférences
auCollègedeFrance
18h
La révoLu tIon de s
thérapIes génIques
André Choulika,
président directeur
général et cofondateur
dugroupe Cellectis
19h
conversatIon
Dr Suzette Delaloge,
oncologue médical,
spécialiste ducancerdu
sein, directrice ducomité
depathologie mammaire
à Gustave Roussy
Animée par Bérénice Rocfort-
Giovanni , journaliste à “l’Obs”
19h
vIdéo
Les promesses
del’exosquelette
19h
tabLe ronde : queLLe
santé en 2049?
Dr Loïc Etienne,
urgentiste, spécialiste
enautomédication
et médecine3.0.
Emmanuel Hirsch,
professeurd’éthique
médicale, faculté de
médecinedel’université
Paris-Sud-Paris-Sarclay,
président duConseil
pourl’Ethique de la
Recherche et l’Intégrité
scientifiqueà l’université
Paris-Saclay
Icham Sefion,
directeur del’innovation
et de laprospective
OrangeHealthcare
Animée par Lionel Cavicchioli, chef de
la rubrique santé de The Conversation