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MARDI 17 MARS 2020 coronavirus| 15
Air France : 80 %
des salariés au
chômage partiel
La compagnie aérienne enregistre
une violente baisse d’activité
A
ir France a été l’une des
premières entreprises
touchée de plein fouet
par la crise du corona
virus. Elle est aussi l’une des pre
mières à réagir. La direction de la
compagnie aérienne devait an
noncer à l’occasion d’un comité
social et économique central,
lundi 16 mars, « des mesures d’ac
tivité partielle ».
En pratique, elle va mettre en
place un plan massif de chômage
partiel. Seuls seront épargnés les
salariés qui exercent « des fonc
tions vitales ». Selon les informa
tions du Monde, ce train de mesu
res devrait concerner 80 % des
près de 40 000 salariés du groupe.
Il faut dire qu’Air France prévoit
de réduire son offre de « 70 % à
90 % » pendant deux mois a an
noncé, lundi matin, la direction.
Le mode d’application de ces
mesures sera décidé durant la se
maine à l’occasion de la tenue des
comités social et économique par
activité. Sans attendre, le groupe
veut rassurer ses salariés et pré
vient qu’il « n’y aura pas de licen
ciements secs ». Avant de prendre
ces sévères décisions, la direction
a rencontré à de multiples repri
ses les principales organisations
syndicales. Des réunions « d’infor
mation et non pas de négocia
tion », faiton savoir toutefois.
Air France a saisi la balle au bond
après les annonces, jeudi 12 mars,
du président de la République,
Emmanuel Macron, selon lequel
le gouvernement accordera aux
entreprises des reports d’impôts
et prendra en charge l’intégralité
de l’indemnisation des salariés en
chômage partiel. « Nous allons
profiter des mesures de l’Etat pour
mettre entre parenthèses l’activité
et être en mesure de rebondir le
plus vite possible dès que cela va re
prendre », faiton savoir du côté de
la direction.
Il faut dire que, pour Air France,
comme pour nombre de compa
gnies aériennes européennes, il y
a urgence. Les uns après les autres
les pays ferment leurs frontières
aux voyageurs du Vieux Conti
nent. L’activité d’Air France a
plongé. Elle aurait baissé de 30 %
et le rythme s’accélère. Cette dé
gringolade affecte aussi KLM. La
filiale néerlandaise d’Air France a
annoncé, vendredi 13 mars,
2 000 suppressions de postes sur
33 000 salariés. L’entreprise va
aussi prendre des mesures de
chômage partiel.
Assentiment des syndicats
Chez Air France, tous les salariés
ne seront pas mis en chômage
partiel en même temps. Mais en
fonction des besoins du groupe.
En pratique, « la direction essaie de
déterminer le montant de l’activité
que la compagnie est capable de
maintenir », indiqueton de
bonne source. Ce dispositif aura
un coût qui sera surtout supporté
par les personnels. Les salariés
placés en chômage partiel ne de
vraient plus percevoir que 84 % de
leur salaire net. En revanche, le cas
des pilotes et des personnels navi
gants commerciaux (PNC) n’est
pas encore réglé. En effet, ces der
niers perçoivent un minimum ga
ranti mais sont payés au nombre
d’heures travaillées pour l’essen
tiel de leur revenu. La direction,
qui ne veut pas se fâcher avec ses
4 000 pilotes et ses 12 000 hôtes
ses et stewards, s’emploie active
ment à trouver un moyen d’inté
grer les navigants et les PNC au
dispositif de chômage partiel sans
que ces derniers soient pénalisés.
La mise en place de ces mesures
drastiques semble recueillir l’as
sentiment des principaux syndi
cats, tant chez les pilotes que
parmi les autres catégories de
personnels. L’objectif de la direc
tion est que la compagnie fasse le
gros dos pendant la crise tout en
ayant les moyens de rebondir
lorsque l’activité reprendra.
Il y a quelques jours, Air France
avait tenu à rassurer les pilotes
assurant que sa trésorerie lui per
mettrait « de tenir pendant plu
sieurs mois ». La direction a pré
cisé, lundi, que le groupe dispo
sait de 6 milliards d’euros de li
quidité au 12 mars.
A l’occasion de rencontres avec
le gouvernement, elle avait passé
le message que « des facilités de
caisse, ainsi que le report du paie
ment des charges et de la taxe car
bone » lui permettrait de passer
cette période difficile. Quelques
jours plus tôt, Ben Smith, direc
teur général d’Air FranceKLM,
avait signalé que « toute taxe qui
pourrait être limitée ou temporai
rement levée » serait un geste
« apprécié par notre industrie ». Il
semble avoir été entendu.
Le patron du groupe a déjà les
yeux fixés sur le monde d’après la
crise du coronavirus. Quand la
pandémie ne sera plus qu’un
mauvais souvenir, il veut qu’Air
FranceKLM ait les moyens de
participer au mouvement de re
composition du transport aérien
qui ne manquera pas de survenir.
En effet, cette crise pourrait
porter le coup de grâce à nombre
de compagnies déjà sur la corde
raide. Norwegian, la low cost
longcourriers plombée par une
dette de 2 milliards d’euros, pour
rait faire partie de proies à venir.
D’autres, comme Corsair ou La
Compagnie, ont vu leur activité
fortement réduite ou totalement
arrêtée. C’est le cas de La Compa
gnie qui, en temps normal, n’as
sure que des liaisons entre Paris
et New York.
La volonté d’Air FranceKLM de
rebondir après la crise a fait res
surgir la possibilité d’une montée
de l’Etat au capital de l’entreprise
franconéerlandaise. Selon Les
Echos, le gouvernement, qui en
détient déjà 14 %, réfléchirait à re
capitaliser la compagnie aérienne
à court de trésorerie. Une opéra
tion pour l’instant « démentie »
par la société. A Bercy, on précise
que « dans l’immédiat, on travaille
sur le financement d’Air France
pour passer la crise ».
Il n’empêche, « l’Etat ferait une
très belle opération », indique
ton chez Air France. Ces derniers
jours, l’action a perdu 40 % de sa
valeur, à 4,80 euros. L’Etat pour
rait, à cette occasion, rendre la
monnaie de leur pièce aux autori
tés néerlandaises qui étaient en
trées par effraction au capital d’Air
FranceKLM, à hauteur de 14 %, en
février 2019.
A l’époque, elles avaient payé
13 euros pour chaque action de la
compagnie. Cependant, s’il veut
organiser une augmentation de
capital afin de remonter au ni
veau de 29 %, l’Etat devra obtenir
l’assentiment de Delta Arlines et
de China Eastern qui détiennent
chacune 8,8 % du tour de table
d’Air FranceKLM et sont des par
tenaires stratégiques. Pas ques
tion de les diluer.
isabelle chaperon
et guy dutheil
La direction
a précisé, lundi,
que le groupe
disposait de
6 milliards
d’euros de
liquidité en date
du 12 mars
Devant les comptoirs d’Air France, à l’aéroport international JohnF.Kennedy, à New York, jeudi 12 mars. KENA BETANCUR/AFP
Trains, métros, bus, avions... vers une baisse de l’offre de mobilité
Pour éviter la propagation du virus, le gouvernement a ordonné la réduction des transports longue distance en France
A
ssurer la continuité du
transport tout en dissua
dant la plupart des Fran
çais de se déplacer. Voilà l’équa
tion que doivent désormais ré
soudre les pouvoirs publics et les
principaux opérateurs de la mo
bilité, alors que l’épidémie de Co
vid19 s’accélère dans le pays.
La France a atteint le stade 3 épi
démique, dimanche 15 mars. Et
les commerces non essentiels
ainsi que les établissements sco
laires et universitaires sont désor
mais fermés.
Dans cette optique, la ministre
de la transition écologique et soli
daire, Elisabeth Borne, et le secré
taire d’Etat aux transports, Jean
Baptiste Djebbari, ont détaillé, di
manche matin, plusieurs mesu
res d’adaptation à cette nouvelle
donne. « Les transports en com
mun en agglomération seront
maintenus pour permettre aux
Français d’accomplir les déplace
ments strictement nécessaires, a
expliqué Elisabeth Borne. Les
transports de plus longue distance
entre les agglomérations – par
train, car et avion – seront progres
sivement réduits afin de limiter la
propagation du virus sur le terri
toire national. Mais tout le monde
pourra retourner vers son domi
cile, il n’y aura pas d’arrêt brutal et
pas d’arrêt complet. »
Lundi 16 mars, sept trains sur
dix devaient circuler sur les ré
seaux SNCF : TGV, TER et Transi
lien. Le lendemain, mardi 17 mars,
l’ensemble du trafic ferroviaire
sera divisé par deux par rapport à
la normale. « Des solutions de dé
placement de rechange seront
trouvées pour 100 % de nos clients
sans frais supplémentaires », a as
suré la société publique.
Dans l’aérien, le tableau est si
milaire. L’offre s’amenuise consi
dérablement, en particulier chez
Air France qui assurera la conti
nuité territoriale avec l’outre
mer. Si les aéroports restent
ouverts, des fermetures progres
sives de terminaux sont à pré
voir : Orly 2 et les S4 et 2G de
Roissy en région parisienne, le
terminal 1 de l’aéroport de Nice.
« Des mesures énergiques »
Derrière cette réduction de la voi
lure, il y a plusieurs objectifs :
s’adapter à la baisse de fréquenta
tion prévisible, liée au télétravail
et à la fermeture des écoles et des
facultés ; envoyer un message co
hérent avec la demande gouver
nementale de réduction des dé
placements ; anticiper le risque
de réduction du personnel coincé
chez lui.
Si, à la SNCF, on dit ne compter
que deux agents atteints par le Ci
vid19, selon nos informations,
plusieurs centaines de chemi
nots ont été mis en quarantaine
pour avoir potentiellement été
en contact avec un porteur du co
ronavirus.
« La direction de la SNCF a pris
vite des mesures énergiques, ad
met Laurent Brun, le secrétaire
général de la CGTCheminots, le
premier syndicat de l’entreprise.
En revanche, la communication
gouvernementale, précipitée et
incohérente, a semé la panique.
Quant à l’idée de réduire de 50 %
le trafic Transilien, elle ne nous
paraît pas pertinente. Ce n’est pas
le moment d’entasser des gens
dans les RER. »
« C’est vrai qu’il y a de l’inquié
tude, en particulier chez les per
sonnels en contact avec le public »,
ajoute Florent Monteilhet, secré
taire général adjoint de l’UNSA
Ferrioviaire, deuxième syndicat
de la SNCF. Les représentants des
salariés bataillent pour obtenir
des masques et du gel hydroal
coolique. Plusieurs cas de droit de
retrait ont dû être gérés, dans le
SudOuest et à Paris, gare du Nord
en particulier.
Côté transports urbains, l’an
goisse est aussi présente. A Bor
deaux, la contamination d’un
couple de salariés du réseau de
transport métropolitain (un con
ducteur de tram et son épouse,
conductrice de bus) a provoqué
un droit de retrait massif et un ar
rêt presque total de la circulation
des tramways dimanche. Selon
Keolis, la filiale de la SNCF qui
opère dans la métropole giron
dine, un accord a été trouvé sur le
nettoyage des salles de relève per
mettant le redémarrage du ser
vice. La difficulté pour les trans
porteurs du quotidien est donc
d’assurer une continuité du ser
vice avec des personnels passa
blement inquiets.
A la RATP, où le trafic devait être
normal, lundi 16 mars, à l’excep
tion du métro (quatre trains sur
cinq), on a augmenté les fréquen
ces de nettoyage et autorisé les
chauffeurs de bus à rouler avec la
vitre de sécurité relevée.
Keolis et Transdev ont, pour
protéger davantage les chauf
feurs, arrêté la vente de tickets à
bord et font monter les usagers
des bus par la porte arrière. « Nous
demandons que les enfants des
personnels du transport public
puissent bénéficier des dispositifs
de garde qui existent pour les en
fants de soignants, ajoute Frédéric
Baverez, directeur exécutif France
de Keolis. Cela nous aiderait à
remplir notre mission. »
éric béziat
APPRENTI SSAGE, CONTRATS COURTS
Il n’y apas queles CDI danslavie! Alors que lataxede 10 euros sur les CDD
d’usage estapplicableà partir de 2020 , lerecours de plusen plus fréquentdes
entreprisesaux contrats courts estsouvent dénoncé. Ces contrats etl’alternance
constituent-ilsune alternativeauxCDI ?Lapolitique devotre entreprise enla
matière a-t-elleévoluéces dernierstemps?
Rencontre animéeparGilles Van Kote,Le Monde
Enprésence de MonsieurGilbert Cette, éc onomiste
Evénement réservéaux DRH sur invitation auprèsderp@groupel emonde.fr
Le 24mars 2020 de 08h30 à 10h00 à Paris
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