C’EST PEUT-ÊTRE
UN DÉTAIL POUR VOUS...MAIS PAS POUR MARC BEAUGÉ.
LE 3 MARS, L’ASSEMBLÉE ÉTAIT AGITÉE, MAIS SON PRÉSIDENT, RICHARD FERRAND,
ÉTAIT STOÏQUE. C’ÉTAIT AVANT LA SUSPENSION DES SÉANCES POUR CAUSE
DE MUNICIPALES. AVANT, SURTOUT, QUE COVID-19 NE FRAPPE DANS L’HÉMICYCLE.
- MAIN DE MAÎTRE.
Non, il ne dort pas.
D’ailleurs, comment pour-
rait-il dormir? Après le coup
de tonnerre du 49.3 on
recensait, le 10 mars, cinq
députés et deux membres
du personnel du Palais-
Bourbon atteints
par le Covid-19. Et les
travaux parlementaires
ont été suspendus jusqu’au
22 mars pour cause de
municipales. En de telles
circonstances, il serait
évidemment irresponsable
que le président de
l’ Assemblée nationale,
Richard Ferrand, s’assou-
pisse dans l’Hémicycle. De
la même façon qu’il serait
totalement irresponsable
qu’il se touche le visage
avec la main et favorise ainsi
la propagation du virus.
2. GUERRE DES BOUTONS.
Si les règles d’hygiène
sont importantes, les
règles stylistiques ne sont
pas caduques pour autant.
Las, Richard Ferrand a
oublié de déboutonner sa
veste au moment de s’as-
seoir, provoquant l’appari-
tion, au niveau de l’esto-
mac, d’un disgracieux
triangle de chemise, par-
couru par un pan de cra-
vate inerte... Rappelons
donc les gestes de base.
En veste droite, débouton-
nez votre veste au
moment de vous asseoir.
En veste croisée, prenez
le temps de la réflexion,
puisque, si rien n’interdit
de garder une veste
croisée boutonnée en
position assise, le confort
doit toujours primer.
3. HAUTEUR DE VUE.
Puisque Richard Ferrand
ne dort pas, malgré ses
yeux clos, pourrait-il
être en train de méditer
afin de prendre une
hauteur salutaire en temps
troublé? La thèse est
séduisante, et rassurante,
mais elle ne tient pas.
En effet, si Richard
Ferrand domine
largement le député
qui se trouve devant lui,
le fauteuil du président
de l’Assemblée nationale
est placé de telle façon
qu’il ne soit pas plus
haut que le député
assis au dernier rang
de l’ Hémicycle, et ce
afin de symboliser le fait
que le président reste
un député comme
les autres.
4. SONNEUR DE CLOCHE.
Si Richard Ferrand est
un député comme les
autres, il possède des
privilèges, liés à son statut
de quatrième personnage
dans la hiérarchie de
l’État. Ainsi, outre des
émoluments plus confor-
tables que ceux des dépu-
tés ordinaires, il bénéficie
d’un rutilant bureau,
dessiné, à la fin xviiie siècle,
par le peintre Jacques-
Louis David (rien à voir
avec le coiffeur). Il a aussi
à sa disposition une cloche
pour ramener le calme
et surtout un bouton lui
offrant la possibilité de
couper à tout moment le
micro d’un député trop
bavard perturbant le
déroulé des débats. Et de
la sieste. Potentiellement.
5. COUSSIN ÉLOIGNÉ.
On distingue, derrière
Richard Ferrand,
un coussin, et ce n’est ni
un hasard ni une coquet-
terie du président
de l’Assemblée nationale.
De fait, le fauteuil du per-
choir, fabriqué par l’atelier
Jacob il y a plus de deux
siècles aussi, est extrême-
ment lourd – il est même
strictement impossible
de le déplacer seul –
et réputé pour être
parfaitement inconfor-
table. À tel point que,
depuis des décennies,
un coussin en cuir marron
vient amortir son assise.
Jusqu’à les plonger dans
le sommeil? Non.
Puisqu’on vous a dit que
Richard Ferrand ne
dormait pas.
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LA SEMAINE
Amaury Cornu/Hans Lucas