Le Monde - 14.03.2020

(WallPaper) #1
tous. » En fait, depuis qua-
rante ans, la principale préoccupa-
tion de la mairie, c’est de trouver des
idées pour réussir à dépenser tout
son argent. Charles Ceccaldi-
Raynaud a eu le nez creux quand il a
décidé de gagner la mairie en 1969,
à l’aube de l’édification d’un des plus
grands centres d’affaires européens
sur sa commune. Il avait deviné tout
ce que la construction de la Défense
pouvait rapporter, à sa ville et à lui.
Parce que chaque tour érigée est
comme un mât de cocagne. Des
taxes professionnelles à foison pour
un joli pactole fiscal. « Chaque année,
la municipalité reçoit tellement de
recettes qu’elle est obligée de gonfler
les prévisions de dépenses », confie,
dans un gros soupir, Évelyne Hardy,
conseillère municipale de
l’opposition.
Charles, qui fut sénateur aussi, était
tout petit, parlait d’une voix aigre-
lette, était surnommé le « renard
argenté » et portait souvent des

costumes rayés. À la fin des
années 1950, il était de gauche, car
Puteaux était encore une cité
ouvrière. Avec la Défense, Puteaux a
changé de physionomie et Charles
est devenu de droite. Il y a l’opulence
des palais, bien sûr, parce que
Charles a dit  : « Les Putéoliens
méritent ce qu’il y a de mieux. Alors
je leur offre des palais. » Charles a
aussi dit : « Je veux la plus belle pis-
cine de France. » Alors il a constitué
une commission qui a fait le tour de
France des piscines. Celle de Puteaux
est en extérieur, elle est chauffée et
ouverte 365 jours par an. Ce serait
un gouffre financier pour n’importe
quelle commune, pas pour Puteaux.
Même quand on n’a rien demandé,
madame la maire peut être très
généreuse. Arnaud Masclet, comé-
dien, chanteur et putéolien, a ainsi,
en 2014, vécu une drôle d’histoire. Il
s’était garé sur un emplacement qu’il
pensait autorisé et avait récolté une
prune. « Je vais au commissariat pour

À droite,
le cinéma
Le Central,
rue de
la République,
à Puteaux.

58


LE MAGAZINE

Jonathan LLense pour M Le magazine du Monde
Free download pdf