Les Echos - 13.03.2020

(sharon) #1

Les Echos Vendredi 13 et samedi 14 mars 2020 ENTREPRISES// 19


Service Entreprises


Seules quelques montagnes et un
peu de neige s éparent les i ndustries
françaises et italiennes, qui ont
noué au fil du temps des liens puis-
sants. L’Italie du Nord étant blo-
quée par la crise du coronavirus, de
grands groupes français se retrou-
vent face à de sérieux problèmes.
En 2017, la France était le premier
pays étranger investisseur en Italie
devant l’A llemagne et le Royaume-
Uni. Près de 2.000 sociétés italien-
nes sont contrôlées par des capi-
taux français, affirme Bercy. Revue
non exhaustive des entreprises tri-
colores les plus exposées.



  • LA GYMNASTIQUE
    ACROBATIQUE DE LACTALIS
    Ni les élevages ni les entreprises ne
    sont équipés pour stocker le lait,
    qui se gâte en quelques jours. Il est
    donc impératif de le transformer
    rapidement. Les mesures drasti-
    ques décidées en Italie ont obligé
    un groupe comme Lactalis, de très
    loin numéro un dans ce pays avec
    un chiffre d’affaires de l’ordre de
    7 milliards d’euros et 29 usines, à
    une certaine gymnastique. Avec
    une seule obsession : assurer la
    continuité de l’activité, quitte à
    déporter des volumes de lait d’une


région à l’autre, voire d’une usine à
l’autre, lorsque le personnel fait
défaut pour raison de santé. Le lea-
der mondial exporte du lait en Ita-
lie, déficitaire pour un cinquième
de sa consommation.
Jusqu’à présent, les camions de
lait continuent d’accéder normale-
ment à l’Italie. Le gouvernement
italien a décidé de fermer de nom-
breuses activités, sauf celles qui
concernent les denrées de pre-
mière nécessité. Il n’y a pas de blo-
cage à la frontière. En revanche,
pour é viter la p ropagation d u virus,
il e st i nterdit aux chauffeurs de des-
cendre de leur camion lorsqu’ils
livrent l’usine.
A l’intérieur d u pays, les camions
circulent normalement, mais cha-
cun doit être équipé d’un laissez-
passer, comme toutes les person-
nes qui se déplacent pour raisons
professionnelles. Dans les usines,
l’absentéisme est faible. « Toutes
nos usines fonctionnent », dit-on
chez Lactalis. « Les volumes de lait
disponibles sont en augmentation en
revanche, car certaines entreprises
ont fermé des lignes d e production. ».
Les g rands g roupes ont plus de faci-
lité à faire face à la situation en rai-
son de leur plus grand nombre de
sites et de l’agilité qui en découle.
Lactalis emploie 5.500 person-
nes en Italie, son deuxième plus
gros marché après la France. Le
groupe y produit du lait sous la
marque Parmalat et de très nom-
breux fromages – du Gorgonzola
au Taleggio en passant par le Par-
migiano.


  • LE CŒUR DE KERING
    SOUS SURVEILLANCE
    Avec sa marque star Gucci, mais
    aussi Bottega Venetta, Brioni ou
    Pomellato, Kering réalise la majo-
    rité de sa production en Italie. Le
    groupe de luxe français utilise le
    modèle du luxe transalpin, recou-
    rant ainsi à des sous-traitants. Pour
    Gucci, par exemple, plus de 70 %
    des accessoires en cuir sont fabri-
    qués par des ateliers indépendants.
    C’est 35 % pour les chaussures. Une
    dépendance q ui a conduit François-
    Henri Pinault, le PDG de Kering, à
    annoncer jeudi u n don de 2 millions
    d’euros pour aider à la gestion de la
    crise en Italie. A ce stade, le groupe
    ne fait pas de commentaire sur
    l’impact du coronavirus sur sa
    chaîne d’approvisionnement. Mi-
    février, après le bond de l’épidémie
    en Chine, François-Henri Pinault
    avait vanté la souplesse de son sys-
    tème transalpin. « Notre production
    en Italie était très flexible, nous pou-
    vons donc ralentir et attendre »,
    disait-il. Une pause nécessaire pour
    redistribuer les stocks destinés à la
    Chine vers d’autres pays.
    Les autres groupes de luxe sont
    aussi exposés en Italie. Le pays e st l e
    centre névralgique de la chaussure
    de luxe. Vuitton (LVMH, proprié-
    taire des « Echos ») a une manufac-
    ture géante près de Venise. Et son
    autre griffe Céline a inauguré l’an
    dernier un second site de maroqui-
    nerie en Toscane. Le chausseur,
    Christian Louboutin et ses célèbres
    semelles rouges recourt lui aussi à
    des ateliers italiens.


Ces groupes français


en première ligne en Italie


L’ Italie du Nord étant
bloquée par la crise
du coronavirus,
de grands groupes français
se retrouvent face
à de sérieux problèmes.


RCS

#BANQUEDUCLIMAT

7AVRIL

PARCFLORALDEPARIS

Jour


  • PSA PEUT S’INQUIÉTER
    POUR FIAT CHRYSLER
    Les usines Fiat ferment en Italie, la
    tension monte à Rueil-Malmaison.
    Au siège de PSA, on observe avec
    attention la situation du construc-
    teur avec qui le groupe français
    doit fusionner d’ici à quelques tri-
    mestres. Jeudi, Fiat Chrysler a
    annoncé qu’il fermait de façon
    temporaire quatre de ses usines
    pour « désinfecter » les « espaces
    communs », tels les vestiaires, les
    toilettes et les zones de repos. Sont
    concernés les sites de Pomigliano,


Cassino, Melfi et Sevel. « La pro-
duction sera notamment diminuée
avec la présence d’équipes réduites
sur les lignes », ajoute le groupe.
Des mesures soutenues unani-
mement par les syndicats maison.
Dès lundi, les entrées dans les usi-
nes du groupe en Europe avaient
été limitées. Toute personne ayant
séjourné dans l’une des 11 villes ita-
liennes touchées par l’épidémie
ainsi que ceux ayant voyagé en
Chine ou dans un autre pays asiati-
que ces quinze derniers jours ne
pouvait y pénétrer. Des mesures

identiques ont été appliquées chez
CNH Industrial et Marelli, des
entreprises contrôlées par Fiat
Chrysler.
Au-delà de cet aspect industriel,
les comptes de FCA vont être mis à
rude é preuve. Au mois de février, le
marché automobile italien a
plongé de 8,8 %, et le mois de mars
s’annonce encore plus glissant.
Une sacrée épine dans le pied
pour la marque Fiat, qui réalise
environ la moitié de ses quelque
660.000 ventes européennes dans
la Botte.n

Avec sa marque star Gucci, mais aussi Bottega Venetta, Brioni ou Pomellato, le groupe Kering
réalise la majorité de sa production en Italie. Photo Miguel Medina/AFP
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