Les Echos - 13.03.2020

(sharon) #1

Les Echos Vendredi 13 et samedi 14 mars 2020 // 41


Eurazeo fait monter en puissance
ses commissions de gestion.

L’Eurazeo nouveau est arrivé, mais personne ne s’en grise, coronavirus obli-
ge. En théorie pourtant, la société d’investissement est mieux immunisée
contre les soubresauts financiers, vu la prépondérance des actifs non cotés
(96 %) dans son actif net réévalué. La perte de valeur liée à la chute d’Europ-
car (un cours de 1,87 euro contre une valeur de 4,50 euros dans les comptes)
représente moins de 2 % de cet « ANR » fin 2019 (6,3 milliards d’euros). Et en
plus, cet indicateur traditionnel de la NAV (pour « net asset value ») n’est
plus le seul point de repère de l’« equity story » depuis le grand tournant de
l’ex-Gaz et Eaux vers la gestion pour compte de tiers (12,5 milliards sous ges-
tion). S on compte de résultat se gonfle de « management fees » en attendant


  • si tout va bien – la montée en puissance progressive des « performance
    fees » liés aux plus-values à venir dans les fonds gérés. La hausse plantureu-
    se du dividende (+20 % et + 24 % en tenant compte de la distribution d’ac-
    tions gratuites de l’année dernière) reflète d’ores et déjà celle des commis-
    sions de gestion nettes de charges opérationnelles (+24,8 %), sans s’attarder
    sur le repli du résultat net (–36,3 %). Le hic, c’est que les actionnaires ne
    voient pas la couleur de ce nouvel art du management (–23 % pour Eurazeo
    depuis le début de l’année). La décote sur l’actif (d’environ 40 %) reflète l’in-
    certitude ambiante sur les dégâts économiques de l’épidémie et aussi sur
    les levées de fonds qui font la croissance des « fees ».


L’art du management


Si l’on en croit l’horoscope chinois,
les enfants nés cette année sous le
signe du Rat de métal auront les
qualités requises pour devenir
plus tard conseillers financiers,
courtiers ou prêteurs sur gages.
Leurs parents sont en tout cas à
l’œuvre pour faire sortir, les pre-
miers, les indices de l’ex-empire
du Milieu de la crise boursière.
L’effacement de leurs pertes doit
plus aux résidents locaux qu’aux
investisseurs étrangers qui se sont
désengagés, a constaté, jeudi, Ma-
lik Haddouk, directeur de la ges-
tion diversifiée de CPR AM. Cyrille
Collet, son collègue de la gestion
quantitative actions, souligne que
le « lundi noir » a été amplifié par
des fonds pris à revers par leurs
positions sur la volatilité et le pé-
trole. Les entreprises américaines,
elles, se sont remises à racheter
leurs propres titres, à bon compte
dans les dernières heures des
séances à Wall Street.

Les indices chinois sont les premiers à sortir de la crise boursière grâce aux investisseurs locaux.
Ciel ingrat

ADP repasse sous les 10 milliards d’euros
de capitalisation boursière.

« Les bonnes nouvelles sont toujours retardées et les mauvaises ont
des ailes. » On comprendrait qu’entre les aéroports vidés par le double
virus chinois et trumpien, un certain vague à l’âme voltairien ait pu
envahir Augustin de Romanet. Le PDG d’ADP, qui a poussé l’amour
des flux jusqu’à être l’un des premiers patrons à attraper la « flu »
de Wuhan, ne doit la dernière bonne nouvelle qu’à lui-même. Mais
même la consolidation de son rang de premier exploitant aéroportuai-
re mondial par l’acquisition de 49 % d’un opérateur indien, annoncée le
mois dernier au moment où les B ourses mondiales découvraient le co-
ronavirus, n’a pu être digérée correctement par les investisseurs. Le
karma de l’arpenteur des tarmacs a, depuis, été mis à rude épreuve. La
proposition, par le régulateur tricolore, d’une boussole de rentabilité
des activités aéronautiques très en dessous de ses espoirs reviendrait à
retirer au groupe entre 80 et 200 millions d’euros de revenus par an de
2021 à 2025, calcule l’analyste d’Oddo BHF. Au pire moment puisqu’il
suffirait de voir disparaître 35 % du trafic aérien sur une année pour
que les ratios d’endettement approchent des seuils inconfortables, esti-
me UBS. Le soutien boursier d’une privatisation ayant pris du plomb
dans l’aile, la capitalisation du groupe est repassée, jeudi, sous les
10 milliards d’euros pour la première fois en trois ans. De l’art d’être vol-
tairien et de croire au ciel...

// Budget de l’Etat 2020 : 39 9,2 milliards d’euros // PIB 2019 :2. 47 9,4 milliards d’euros courants
// Plafond Sécurité sociale :3.428 euros/mois à partir du 01-01-2020 // SMIC horaire : 10 ,15 euros à partir du 01-01-202 0
// Capitalisation boursière de Paris :1.827,78 milliards d’euros (au 06-01-2020)
// Indice des prix (base 100 en 2015) : 10 3,55 en décembre 2020 // Taux de chômage (BIT) :8,6 % au 3etrimestre 2019
// Dette publique :2.415,1 milliards d’euros au 3etrimestre 2019

=
Les chiffres de l’économie

Garde rouge


crible


EN VUE


Jérôme Salomon


D


engue, Zika, chikungunya,
H1N1, Ebola, coronavirus...
Bactéries, virus et autres agents
infectieux n’ont guère de secret pour
Jérôme Salomon. Depuis ses études de
médecine, ce quinqua bardé de diplô-
mes n’a cessé de croiser leurs chemins.
Son premier stage, il l’a d’ailleurs fait à
la Direction générale de la santé au
moment de l’explosion des maladies à
prions. Il en fera son sujet de thèse deux
ans plus tard. Passionné par les ques-
tions de santé publique, le jeune c hef de
clinique se retrouve dès 1999 a u cabinet
de Bernard Kouchner, alors ministre
de la Santé de Lionel Jospin, au côté de
Martin Hirsch, Dominique Martin,
François Bourdillon... Tous
aujourd’hui aux manettes des grandes
institutions sanitaires du pays. Cela
facilite la communication en temps de
pandémie! Chargé de la coordination
et de la communication sur le corona-
virus, le directeur général de la

santé, dont la bonhomie rassurante est
désormais connue de tous les Français
grâce à ses bulletins vespéraux sur la
progression du coronavirus, est cepen-
dant en première ligne. Celui qui fait
écran entre les politiques et l’opinion
doit aussi aider Emmanuel Macron,
dont il était proche pendant la campa-
gne présidentielle, à choisir l a
meilleure stratégie pour limiter l’épidé-
mie : bloquer davantage le pays au ris-
que d ’aggraver la crise é conomique ; o u
bien jouer la montre, en espérant que
les beaux jours rendent a priori le virus
moins dangereux, au risque d’être
accusé de laxisme – ce qui en matière
de santé publique peut avoir des effets
dévastateurs. Avec les pays q ui se barri-
cadent les uns après les autres, la
seconde option semble de moins en
moins tenable.

(


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Pages 2 à 6

Krach historique à la Bourse de Paris



  • A la Bourse de Paris, le CAC 40 a
    enregistré la plus forte chute de
    toute son histoire. L’indice, qui a
    commencé à coter en 1987, a plongé
    de 12,28 %, à 4.044,26 points. Les
    investisseurs ont vendu massive-
    ment des actions après l’interdic-
    tion, pour les Européens, d’entrer
    sur le sol américain décrétée par le
    président américain Donald
    Trump. La chute s’est accélérée en
    séance avec les annonces de la Ban-
    que centrale européenne, jugées
    décevantes par les marchés finan-
    ciers. L’institut monétaire a laissé
    ses taux directeurs inchangés,
    annoncé une nouvelle vague de
    prêts très bon marché aux banques
    et une enveloppe supplémentaire


de 120 milliards d’euros dans le
cadre de son programme de
rachats d’actifs.
Toutes les valeurs du CAC 40 ont
terminé la séance dans le rouge.
Hermès enregistre la baisse la plus
limitée (–5,82 %) suivi d’Essilor-
Luxottica (–7,17 %) et de L’Oréal
(–7,27 %). A l’inverse Renault signe
la pire performance et clôture en
retrait de 21,94 %, suivi de Unibail-
Rodamco (–21,61 %) et d’Arcelor-
Mittal (–18,51 %).
Ailleurs, en Europe, Londres a
plongé de 10 %, pire chute depuis
1987, Francfort a cédé 12,24 %, du
jamais-vu depuis 1989. La Bourse
de Milan a, quant à elle, reculé de
16,92 %, un record historique.
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