Paris Match - France (2018-07)

(Antfer) #1

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C’est une technique de rééducation
efficace des membres déficients.
Elle utilise l’illusion visuelle,
comme l’explique le professeur

PasCal Giraux*


Par le docteur Philippe Gorny

vidéos du membre sain qui est artificielle-
ment latéralisé pour parfaitement mimer
le membre malade en fonction. La syn-
chronisation motrice entre l’image vue sur
écran par le patient et son membre para-
lysé ou faible est alors facilitée. Comme le
membre du côté sain tend naturellement à
inhiber celui du côté lésé, il s’agit d’effacer
cette inhibition par l’illusion visuelle et les
nouveaux circuits de neurones qu’elle crée.
En quoi consiste la rééducation?
Dans le cadre des AVC, les séances
(en hôpital de jour ou non) sont quo-
tidiennes pendant six semaines. Elles
durent de deux à trois heures dont trente
minutes de thérapie miroir (au-delà, c’est
fatigant). Notre arme est l’IVS (Intensive
Visual Simulation), un dispositif sophis-
tiqué conçu par la société stéphanoise
Dessintey, avec poste de travail, système
informatique, caméra et un écran où le
membre déficient apparaît sain. Quand
le sujet travaille, la vidéo se superpose au
membre malade et donne l’illusion visuelle
que ce dernier fonctionne, même s’il ne
bouge pas ou peu. Le patient doit seule-
ment faire ce qu’il voit. Il a alors l’impres-
sion de visualiser sur écran ce qu’il fait.
Pour les douleurs chroniques, on utilise le
même dispositif mais l’intensité des mou-
vements suivis reste faible et lente car le
fait de se voir bouger est douloureux. Un
bouquet d’autres techniques complète
l’IVS et maintient la motivation des
patients : mobilisation manuelle par le thé-
rapeute, entraînement électromécanique
motorisé (robot), réalité virtuelle, etc.
Quels sont les résultats?
Ils varient avec l’importance des
lésions, l’âge du sujet et les comorbidi-
tés. En moyenne, chez 200 patients
que nous avons ainsi traités, 20 % de la
capacité motrice est récupérée par le
seul effet de l’IVS. Plus de 50 centres
en sont maintenant équipés en
France et ailleurs. n
* Chef du service de
rééducation adulte,
CHU de Saint-Etienne,
hôpital Bellevue.

paris match. Quel est le principe de
cette thérapie?
pascal Giraux. Elle a été promue
en 1995 par le docteur Vilayanur Rama-
chandran (San Diego, Californie) pour
lutter contre les douleurs chroniques des
membres fantômes chez les amputés. Il
s’agit de donner l’illusion au cerveau que
le membre disparu est toujours présent et
fonctionnel (effet antalgique). On l’ap-
plique : 1. Aux douleurs post- traumatiques
de membres devenues chroniques (3 %
des cas). 2. Aux déficits moteurs des
membres (paralysies et parésies) après un
AVC, problème majeur qui touche près
de 60 000 personnes en France par an.
L’objectif est ici de récupérer une fonction.
Quelles sont ses bases physiologiques?
Le cerveau a la capacité de créer de
nouvelles connexions entre les neurones.
La vision, par exemple, active l’ensemble
des circuits sensitifs et moteurs au point
que la perception optique d’un mouve-
ment peut donner l’impression de le faire :
10 % environ des neurones dits « miroirs »
(découverts en 1996) forment des cir-
cuits actifs qui sont à la fois aptes à perce-
voir et à générer un mouvement, ce que
des études d’imagerie fonctionnelle ont
prouvé. On peut donc exploiter l’enchaî-
nement stimulation visuelle, perception de
celle-ci et activation motrice.
comment est-elle mise en œuvre?
La technique originelle utilise un
miroir placé entre les membres (supé-
rieurs ou inférieurs) de la personne. Celle-
ci regarde les mouvements du membre
valide et s’efforce de les suivre avec son
membre déficient placé de l’autre côté
du miroir. Nous avons perfectionné et
simplifié cette technique avec des

Rééducation motRice


PAR LA THÉRAPIE MIROIR


votRe

santé


Les sujets vuLnéRabLes


Fausses idées
Les personnes vulnérables au Sars-CoV-2
ne sont pas toujours celles qu’on croit. On
a, par exemple, pensé que les asthmatiques
seraient particulièrement touchés. Il n’en
est rien. Une étude menée en mai-juin à
l’hôpital Bicêtre (Paris) chez 768 patients
hospitalisés pour une pneumonie due au
Covid-19, dont 37 asthmatiques, a montré
que ces derniers n’avaient pas de risques
accrus de développer une forme grave, ni
une mortalité augmentée (plutôt diminuée)
s’ils suivent leur traitement. D’autres études
dans le monde l’ont confirmé. Explication :
les corticoïdes inhalés qu’ils prennent pour
réduire l’inflammation pulmonaire semblent
les protéger. Idem chez les sujets atteints
de mucoviscidose, moins affectés que
la population générale car souvent sous
azithromycine, un antibiotique qui prévient
les infections bactériennes et possède des
propriétés antivirales (souvent associé
à l’hydroxychloroquine dans les formes
débutantes de Covid-19).
En début de pandémie, nombre
de médecins ont estimé que les patients
cancéreux constituaient un sérieux groupe
à risque. Ils furent confinés à l’excès, ce
qui provoqua de graves retards dans
leur prise en charge. Des chercheurs du
Rambam Hospital (Haïfa, Israël) ont mené
une étude (mars-juin 2020) au cours de
laquelle ils ont comparé 164 personnes
atteintes de cancer venues pour recevoir
leur traitement à un groupe témoin de
107 sujets en bonne santé. Ils ont constaté :


  1. Que les patients cancéreux et les
    témoins développaient des taux similaires
    d’anticorps 2. Que le profil immunitaire
    des deux groupes était différent : les
    cellules myéloïdes, vitales pour l’immunité
    et gravement touchées par le Sars-CoV-2,
    avaient chuté de 90 % chez les témoins
    mais de 50 % seulement chez les sujets
    cancéreux car leurs traitements interfèrent
    souvent avec le virus et les protègent
    en partie!


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