Paris Match - France (2018-07)

(Antfer) #1

76 parismatch DU 00 xxxx aU 0 xxxxxx 2000


Dans un bayou
de Louisiane, au début
du voyage.

ces légers détails corrigés, la troupe démarre. Derrière Johnny,
outre Pierre Billon, roulent Philippe Fatien, Fabrice « Billy » Le
Ruyet, Claude Bouillon, le musicien Maxim Nucci, Sébastien
Farran, son manager, le photographe Dimitri Coste, ainsi que
deux accompagnateurs français, Pierre et Carole Lacarrière, qui
veillent sur la troupe avec une voiture suiveuse. Ce sont eux qui
ont conçu l’itinéraire en suivant les consignes de Johnny. Billon
se souvient : « Il voulait refaire le parcours d’“Easy Rider”. Mais
à l’envers. Dans le film, Peter Fonda et Dennis Hopper vont de
Los Angeles à New Orleans, donc ils sont sans cesse éblouis
par le soleil. Nous, nous sommes allés de New Orleans à Los
Angeles, pour avoir le soleil dans le dos. »
Goetghebeur, qui filme tout ça un peu à l’arrache, est sur-
pris par la vitesse de la troupe. « Johnny roulait vite, trop vite
même. Comme s’il était pressé de s’enquiller les 500 kilomètres
quotidiens. » Mais, pour le chanteur, en réalité chaque étape
est l’occasion d’être seul, totalement seul face à la beauté des
paysages américains. « Je ne vais pas refaire l’histoire, explique
Billon, mais, pour lui, c’était un voyage dans l’Amérique de son
enfance. Le lundi, il était Marlon Brando ; le mardi, il se voyait en
James Dean et le mercredi, en Clint Eastwood. Là, enfin, il était
l’anonyme parfait, puisque, en plus, nous dormions dans des

motels bien cheap à 45 dollars la nuit, loin des
palaces qu’il fréquentait en tournée. » Tous les
motards du gang ne se connaissent pas, mais un
rituel s’installe dès la première étape. « Chacun
sortait de sa chambre, installait sa chaise en plas-
tique devant la moto et racontait ce qu’il avait
vu dans la journée, se souvient Goetghebeur.
Comme ils avaient du mal à rouler en groupe,
ils voyaient tous des choses différentes. » Au
programme, pas de soirées alcoolisées – « On a
dû boire une fiole de bourbon en tout et pour
tout », avoue Billon –, mais une discipline de fer.
« Enfin... c’est plutôt la discipline qui s’est impo-
sée à nous! Quand tu fais ce genre de voyage,
tu es tellement crevé, le soir, que tu t’endors
comme un bienheureux à 22 h 30. Et le lende-
main, tu te lèves à 7 heures pour prendre la
route dès 8 heures. » Johnny est un membre du
groupe comme les autres, manipulant même
mieux que certains la machine à café bon mar-
ché de sa chambre et se jetant sur son téléphone
dès sa descente de moto pour appeler sa femme
et ses filles, restées à Los Angeles. « On faisait
tous pareil. Dès qu’on mettait un pied à terre,
on appelait bobonne. Fallait quand même les
rassurer, certains d’entre nous avaient allègre-
ment dépassé les 70 piges. »
La traversée du Texas n’est guère passion-
nante, les routes à deux voies s’étirant sur des
centaines de kilomètres de plaine. Les huit
fantastiques dévalisent dès qu’ils le peuvent
les stations-service locales. « Johnny était du
genre à vouloir acheter tout et n’importe
quoi, rigole Pierre Billon. Heureusement que
Philippe Fatien et Billy étaient parmi nous, car
ils savaient comment lui faire entendre raison.
Le premier, spécialiste de la restauration, l’a
empêché d’acquérir des restaurants. Le second,
agent immobilier, d’acheter des ranchs. » Si le
Nouveau-Mexique leur permet de se recueillir
sur la tombe de Billy the Kid, autre idole de Johnny, c’est avec
une certaine impatience que tout le monde attend l’étape de
repos à Santa Fe. « Pas pour les mêmes raisons, soupire Pierre
Billon. Johnny savait que les filles et Laeticia viendraient pas-
ser deux jours avec lui à ce moment-là. Et nous, on savait que
ça allait être terrible pour la carte Bleue. Parce que Johnny
aimait faire du shopping. Et particulièrement à Santa  Fe. »
Goetghebeur sourit. « Il n’arrêtait pas de me dire : “Mais pour-
quoi tu n’as pas de tatouages? Pourquoi tu n’as pas de bagues?
Pourquoi tu n’as pas de bracelets ?” Après Santa Fe, il a arrêté
de me poser ces questions... » Billon tient à préciser : « Entre
nous, il n’était plus question que Johnny arrose tout le monde,
tout le temps. L’époque des pique-assiettes, que j’ai connue avec
lui dans les années 1980, était terminée grâce à Laeticia. Et si
elle avait aidé Johnny à faire son casting pour ce road-trip, c’est
aussi parce qu’elle savait que nous étions des types réglo, qui ne
feraient pas n’importe quoi. Et qui oseraient même dire non à
Johnny s’il commandait une bouteille de vodka. Donc, si Johnny
réglait le dîner du lundi, il ne payait plus de la semaine. »
Mais c’est aussi à Santa Fe que Johnny avoue à ses cama-
rades qu’il se sent « essoufflé ». « Comme un con, raconte Billon,

PAS DE SOIR ES


ALCOOLIS ES,


MAIS MACHINE


CAF ET DISCIPLINE


DE FER

Free download pdf