Paris Match - France (2020-11-12)

(Antfer) #1

68 parismatchDU 12 aU 18 novembre 2020


Il vote pour la


l galIsatIon de


l’avortement alors qu’Il


est contre. c’est un


mod r dans l’ me et un


as du compromIs


Sonvrai
maillonfaible,
c’eStHunter,
etSeScontratS
encHine
etenukraine

malonguecarrière», écrit-ilen 2007 dans
sonlivre«PromisestoKeep». Vraiment?
JoeBidenn’acertespasdéméritéentant
quesénateur,maisil a faitquelquesfaux
pasquiauraientpuluicoûtercher.Ainsi,
en1991,lorsqueAnitaHill,brillante
juriste,accused’agressionssexuellesle
jugeClarenceThomas,candidatrépubli-
cainà laCoursuprême.Présidentdela
commission judiciaire du Sénat,Joe
Bidendirigelesauditionsetinterrogela
jeunefemme sansménagement.Lui,
l’homme de l’empathie, semble
hermétiqueà sadouleur,aupointqu’elle
a soudainl’impressiondeseretrouversur
lebancdesaccusés.Commeunavant-
goûtdumouvementMeToo,beaucoup
d’Américainessesententdetoutcœur
avecAnitaHill.Etcelle-cirefuserales
excusestardivesqueluiadresserale can-
didatà l’électionprésidentielle.
CarBidenresteunhommed’un
autretemps.Dugenretroptactileavec
lesfemmes, cequilui vaudra d’être
attaquéparuneancienneprotégée,Lucy
Flores,quil’accusedel’avoirserréed’un
peutropprès.On lui reprocheaussi
d’avoirvotéen 1994 pourl’accordde
libre-échangenord-américain(Alena),
qui,enprovoquantdesdélocalisations
industriellesmassivesverslaChine,a
misdesmillionsd’ouvriersauchômage.
Ouencore,lamêmeannée,d’avoirété
l’auteurdela trèscontroverséeloisurle
crimequia envoyé des centainesde
milliersdeNoirsenprison.Alatêtede
la commissiondesaffairesétrangèresdu
Sénat,il a aussivotéenfaveurdela
guerre en Irak en 2003. Il fait un
deuxième tour de piste à la présiden-

tielle,en 2008 : moinsde 1 %devotesà
laprimairedel’Iowa.Al’époque,note
Shailagh Murray, ex-journaliste du
«WashingtonPost» etancienne«senior
advisor» d’Obama,«personnenemise
unkopecksurseschances». Bidena déjà
65 ans.C’estuncaciqueduparti.Il lui
restepourtantunatout: il ne s’est jamais
brouillé avec personne.
C’estundes traitsdesa
personnalité. Il a même
pardonné à son rival démo-
crateMichaelDukakis,qui
avaitfaitfuiterl’histoiredu
plagiaten 1988 : «J’ai eu
après un drôle de senti-
ment. Je me suis rendu
comptequejen’étaispas
encolèredutout.Pourquoiperdremon
temps?»
Sa compétence, sa stabilité comme
son âge et sa couleur de peau vont
séduirent Barack Obama. La star de
l’élection présidentielle de 2008 cherche
uncolistierquisoitsonopposé.David
Axelrodvient sonderBidenet parle
cash: «Ona unpetitsouciavecvous,il
vousarrived’êtretrèsbavard.Ya-t-il
moyenderéglerça?» Laréponse de
Bidendurerauneheure...
Le«WashingtonPost» l’aunjour
qualifiéde«Lamborghinidesgaffes».
Le jour même du lancement de la
candidatured’Obama,Bidenlequalifie
de«Noirpropresurlui». Lorsdeleur
premierdéjeuner,il proposedepayer
l’addition,commesi uncandidatde
couleurmanquaitforcémentdemoyens.
MaisBidena aussidesarguments: il
affirme avoir rangé ses ambitions

présidentielles au rayon des souvenirs,
et le futur président veut un vice-prési-
dentloyal,quineluifassepasd’ombre
maisquiauraassezdepoidspourlui
dire: «Monsieurle président,vousvous
trompez.» VadoncpourBiden.«Une
desmeilleuresdécisionsdemaprési-
dence», dit aujourd’hui Obama, qui va
bénéficier de son entregent
au Sénat pour faire voter,
au moment de la crise des
subprimes, en 2009, un
planderelancedel’écono-
mie,puisl’Obamacare,la
premièreassurancesanté
universelleauxEtats-Unis
(«a fuckingbigdeal», un
«putain de gros truc»,
commente Biden, surpris par un micro
ouvert au moment de l’annonce). Mais
le vice-président est aussi celui qui lui
déconseilledelancerleraidsurBen
Laden ou d’envoyer des troupes
supplémentaires en Afghanistan. Autant
d’avisquineserontpasécoutés.Biden
agacesouvent Obama,avecsoncôté
«causeurimpénitent». Son copain de fac
Frederick Sears n’a pas oublié le visage
exaspéréduprésident,à quiJoedeman-
daitdeposeraveclui.Maisl’affection
entre«Joe» et«Barack» estpourtant
réelle.Etlesfillesduprésidentadorent
lespetites-fillesdu«VP».
A la Maison-Blanche, Joe Biden a
vécu alors un nouvel âge d’or. Travailler
aux côtés du premier président noir des
Etats-Unis, qui fascine le monde, a l’air
d’unbâtondemaréchal.JoeBidenoccu-
pait la maison du rond-point de
l’Observatoire,magnifique résidence
assignéeauxvice-présidents,voyageaità
bordd’«AirForceTwo», oùl’onvoyait
Jill,sa femme,toujours enseignante,
corriger ses devoirs. Dans ce bonheur
tranquille,latragédiefaitdenouveau
irruption.En2013,Beau,le filsaîné,
procureur général du Delaware, promis à
un destin présidentiel, apprend qu’il est
atteint d’un cancer du cerveau incurable.
Il meurtdeuxansplustard,nonsansavoir
faitpromettreà sonpèredetenterune
dernièrefoisderéalisersonrêve: devenir
présidentdesEtats-Unis.Submergé par
ledeuil,JoeBidenestd’autantmoins
capabled’affronterunenouvellecam-
pagnequ’Obamal’endissuade.Leprési-
denta fait sonchoix: cesera Hillary
Clinton,jugéeplussolide,plusambitieuse
aussi.Bidenjurenepasluienavoirvoulu:
«Il défendaitsonhéritage,aprèstout.» La
victoire de Trump va changer la donne.
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