Paris Match - France (2020-11-19)

(Antfer) #1

culture
séries


« “Les Simpson” dénoncent
l’american way of life. Homer
est l’Américain moyen ven-
tripotent, qui dépense beaucoup d’énergie à ne surtout pas en
dépenser! C’est un ersatz de Trump », décrit Xavier Leherpeur,
journaliste aux commandes de l’émission « Une heure en séries »
sur France Inter. « Dès le départ, le créateur Matt Groening voulait
dénoncer, ajoute Yoann Hervo, directeur artistique dans le dessin
animé. Il n’a pas travaillé ses personnages pour qu’ils deviennent
des produits marketing, au contraire! A une époque où les comics
inondent la culture underground, c’est dingue de voir un dessin au
trait tremblant, et des couleurs criardes qui ne vont pas du tout
ensemble. La prise de risque est énorme. » Grâce aux « Simpson »,
l’opinion publique comprend que l’animation peut s’adresser aux
adultes. Non seulement Homer et son foyer ont 32 saisons et
687 épisodes à leur actif, mais ils ont fait des petits. « Les Griffin »
(« Family Guy »), « American Dad! », « Futurama », « Désenchan-
tée », tous ont hérité des traits grossiers de Marge et Homer. Un
moyen de ne pas se mouiller et d’annoncer la couleur : interdit
aux enfants. « Cette rondeur dans l’animation sert aussi de che-
val de Troie. En apparence, ça n’a rien d’agressif donc ça permet
de glisser des messages facilement », souligne Xavier Leherpeur.
Maîtres en la matière : les héros de « South Park ». Pour Yoann
Hervo : « C’est fort parce que c’est du papier découpé, un support
pour les tout-petits. La distance avec le propos est d’autant plus
grande et la patte graphique est inimitable. » Derrière la provoc

volontaire et la vulgarité, le message est fort :
euthanasie, racisme, homophobie, guerre...
En vingt-trois ans, tous les sujets sociaux et
politiques y sont passés. « Ce sont les meil-
leurs, les “Charlie Hebdo” de notre secteur! Ils
sont les derniers à pouvoir tout se permettre
parce qu’ils sont installés. Aujourd’hui, une telle
série ne pourrait pas voir le jour. » Dernières
mouvances : le semi-réalisme de « BoJack
Horseman » et le tracé presque enfantin de
la parodie de « Retour vers le futur », « Rick
et Morty ». « L’animation permet les plus grandes folies, dit Julie
Scully. On peut emmener nos personnages sur la Lune ou dans
le futur, ça ne coûte pas plus cher! »
Pour autant, côté scénario, l’originalité pèche depuis les pion-
niers. La famille reste la base de création avec systématiquement
un personnage lucide qui sert de miroir au téléspectateur. Un
élément scénaristique clé, surtout pour le public étranger. « Ces
formats sont très américains. Ils nous parlent en Europe parce
que la famille, c’est universel et celles-ci sont déculpabilisantes.
Et on adore détester les Etats-Unis. C’est un plaisir coupable de
voir dénoncer ce que nous trouvons évident », dit en souriant le
journaliste de France Inter.
Avec les années, le petit plaisir a perdu de son mordant.
« Duncanville » en est l’exemple probant. Fin, drôle et réaliste
mais parfois trop bien-pensant. « Tant mieux que la société
change et que des voix se soient élevées,
mais il y a plus de frilosité chez les produc-
teurs. Il ne faut pas oublier que tous les
créateurs de ces shows ont eu au départ
des intentions de sales gosses », conclut
Yoann Hervo. Ce n’est pas un hasard si
Bart Simpson tient son nom de « brat »...
qui signifie « morveux ». n Clémence Duranton

a voir
« Duncanville »,
disponible sur Prime Video.

après le début
triomphal de
« duncanville »
aux etats-unis,
la Fox a
commandé
la saison 2


  1. « Amarican
    Dad! ».

  2. « Les Griffin ».

  3. « Les
    Simpson ».

  4. « South Park ».


1 2
3

4
Free download pdf