Coup de Pouce - (02)January-February 2020

(Comicgek) #1

Ma vie PERSO


se passer et cela ruine souvent toute possibilité
que la rencontre sociale puisse être agréable,
plaisante et gratifiante», explique Danielle
Amado, psychologue clinicienne spécialisée
dans le traitement de l’anxiété sociale.
Du plus loin que je me souvienne, de-
puis mon adolescence en fait, je mène un
combat intérieur sans fin contre moi-
même pour surmonter cette angoisse et
continuer à planifier des sorties sociales. Je
l’avoue: je me suis souvent désistée le jour
même en invoquant des prétextes bidons,
parce que je ne me sentais pas assez en
forme pour «affronter les autres».

aux hôtes ou en allant jouer avec les enfants.
Pourtant, on ne lui demande pas de divertir
tout le monde ou de tenir un discours tou-
jours impeccable ou sensationnel. Tout ce
qu’on lui demande, c’est d’être là et de rester
elle-même», rappelle la psychologue.
Le pire, c’est que la fin de l’événement ne
rime pas avec la fin de mes tourments... Dès
que je pose le pied dehors, je me mets à sur-
analyser ma soirée. Je repense à ce que j’ai dit
et pas dit, à ce que j’aurais dû dire et ne pas
dire. Je me tape sur la tête pour la blague qui
a été mal reçue, pour les nouvelles que j’ai
oublié de demander ou pour ne pas avoir
assez souri. «Après une
sortie, les gens qui font
de l’anxiété sociale ont
tendance à focaliser sur
ce qui s’est mal passé et
cela vient confirmer
leur crainte de partici-
per à d’autres ren-
contres sociales, com-
mente la psychologue
Danielle Amado. Pour
éviter cela, il faut garder
en tête l’objectif initial
de la sortie, qui est de
passer du temps avec les
gens qu’on aime. Cela aide ensuite à se
concentrer sur les choses qui ont été
agréables, puis de s’attribuer les mérites sur
ce qui s’est bien passé pendant la rencontre
plutôt que de ressasser ce qui a mal été.»
Heureusement, avec le temps – et plu-
sieurs rencontres avec ma psy –, j’ai appris
à mieux contrôler mon esprit qui dérape
les jours ou les heures précédant le jour J
et qui me donne envie de tout annuler. Je
réussis mieux, aussi, à déterminer où com-
mence et arrête mon anxiété. Surtout, j’ai
compris que je ne suis pas la seule à faire
des sorties, toujours en compagnie de la
même amie, l’anxiété.

Le pire, c’est que la plupart du temps, je
réussis à passer un bon moment une fois sur
place. Je choisis soigneusement mes inter-
locuteurs. Je m’éclipse quand je sens que je
m’enfonce dans une discussion déplaisante.
J’use d’humour pour me dépêtrer des situa-
tions inconfortables. Je fais tout pour que
les autres n’y voient que du feu!
Reste que, au lieu d’être des moments de
divertissement, voire de ressourcement, mes
sorties, moi, elles m’épuisent. «L’anxiété so-
ciale est épuisante, parce qu’on est en mode
surprotection de soi, en mode combat. Pour
compenser, la personne peut développer
des mécanismes d’évitement clairs, comme
décliner les invitations, ou des mécanismes
de contournement, comme s’éclipser durant
la soirée en allant donner un coup de main

«


Du plus loin que je me souvienne,


je mène un combat intérieur sans


fin contre moi-même pour surmonter


cette angoisse et continuer à planifier


des sorties sociales.


(^) »
AMÉLIE COURNOYER, JOURNALISTE, ANXIEUSE,
MAIS HEUREUSE. •
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JANVIER-FÉVRIER 2020
COUPDEPOUCE.COM

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