Coup de Pouce - (02)January-February 2020

(Comicgek) #1
«J’ai littéralement capoté. Je voyais tout ce que j’aurais
dû faire et que j’avais laissé tomber pour 1001 raisons.
J’étais toujours irritable. Mon conjoint et mes enfants
en ont souffert aussi. Franchement, j’ai rêvé de tout
sacrer là et partir six mois, loin, toute seule, pour me
retrouver. J’ai pleuré, tempêté. Finalement, en nom-
mant tout ce qui arrivait, en écrivant beaucoup et
avec la patience de mes proches, j’ai réussi à passer à
travers. J’ai souvent lâché: “Maudite quarantaine!”,
pour dédramatiser un peu. Puis j’ai fait des change-
ments positifs et là, enfin, je me sens mieux», raconte
Nathalie, 44 ans.
Plus on a enterré notre soi véritable pour faire
plaisir aux autres ou pour emprunter une voie im-
posée, plus son émergence au mitan de la vie risque
d’être bouleversante. «Il faut résister à la tentation
de se blâmer. Tout ce qu’on a vécu nous amène à
reprendre notre vie en main. Il faut même arriver à
avoir de la gratitude pour tout ce chemin», croit
Marie-Josée Michaud. C’est la somme de nos expé-
riences qui fait de nous la personne que l’on est. Et
il n’est pas trop tard. Cette crise permet une deu-
xième chance, qu’il faut saisir. «À 49 ans, j’ai cru que
ma vie était finie, que je ne pourrais plus rien faire

de nouveau. Je me suis donné un bon coup de pied
au derrière! Depuis, j’ai publié six livres et j’ai
d’autres projets pour 2020», raconte Maryse, 56 ans.

TRAVERSER POUR SE RETROUVER
S’en sortir sereinement sans trop de cheveux blancs
est possible. «Mais cela reste un processus qui exige
temps, courage et énergie», précise Marie-Josée
Michaud. D’abord, il faut accueillir les remises en
question. «Plus on résiste à ce qui se passe, plus c’est
difficile. Accueillir ce bilan favorise la sortie de la
crise», soutient Judith Petitpas. De son côté, Jean-
François Vézina suggère de développer une curiosité
sincère à l’endroit de ce que l’on vit. «Les émotions
vécues sont un véritable CNN qui refile de l’informa-
tion sur nos réels besoins», compare-t-il. Des indices
utiles pour la suite des choses.
Toutefois, quand on traverse une période incon-
fortable, il est tentant d’agir impulsivement pour s’en
sortir au plus vite. Attention: un flot de regrets pour-
rait attendre au tournant. Quitter son emploi, son
chum ou son pays prématurément n’est pas souhai-
table. Apprendre à tolérer les incertitudes et les
doutes à l’heure des bilans est nécessaire. Cette ré-
flexion permet d’abord d’assumer les choix effectués
dans la première moitié de la vie, de faire du ménage
dans nos relations ou nos décisions, de pardonner ou
d’user de résilience pour ensuite pouvoir faire des
choix éclairés. Et c’est cette aptitude – la tolérance à
l’inconfort – qui fait en sorte que certaines personnes
sont moins perturbées par ce passage. «Revisiter cha-
cune des croyances et des valeurs qu’on a adoptées au
fil du temps permet de se redéfinir. Il peut être béné-
fique aussi de prendre du temps pour retrouver qui
on était plus jeune avant d’adopter notre personnage.
Il faut se donner la chance de se découvrir», dit
Marie-Josée Michaud.
«Et puis, vous verrez, ce passage est très salutaire.
Il deviendra moins forçant d’être en relation avec
les autres, parce que c’est tellement plus naturel
d’être vraiment qui on est véritablement», indique
Judith Petitpas.•

POUR ALLER
PLUS LOIN

/// Mieux vivre la crise de la quarantaine.
Judith Petitpas, éditions La Semaine, 2020.
/// Se réaliser dans un monde d’images. Jean-
François Vézina, éditions de l’Homme, 2004.
/// 80 heures par semaine. Quand
l’hyperperformance devient toxique. Marie-Josée
Michaud, éditions La Semaine, 2019.

«En fait, au mitan de la vie


se déroule en quelque sorte


une autre étape de notre


processus d’individuation.


C’est une transition.»



  • JUDITH PETITPAS, AUTEURE DE MIEUX VIVRE
    LA CRISE DE LA QUARANTAINE


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JANVIER-FÉVRIER 2020
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Ma vie PSYCHO


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